Chapitre 1 : « Cécité, mon amie » par Emyliane

Il y a des moments dans la vie où on se demande quel mal on a fait dans ces vies antérieures pour que celle qu'on vit présentement soit aussi merdique.

Notez qu'Emma ne parlait même pas de son enfance compliquée, de l'abandon, des familles d'accueil, des trahisons ou de la prison. Elle parlait de là, maintenant, à Storybrooke.

La vie allait mieux. Sans être trop optimiste, elle aurait même eu tendance à dire que tout allait bien. Bon, il y avait quelques malédictions par-ci par-là, des coups de gueules avec Regina, un apprentissage de la parentalité compliqué avec Henry (l'adolescence est toujours compliquée), des incompréhensions avec Snow et David (sur le fait que oui, à 32 ans il n'y avait plus de couvre-feu), les pleurs de Neal à longueurs de journée (qu'est-ce que ça pleurait un bébé !), etc. Mais voilà, ça signifiait, un fils, des parents, un frère. Une famille. Un rêve de gosse devenu réalité. Un véritable conte de Noël, une histoire digne de Disney ! La princesse perdue, l'orpheline qui finit par non seulement retrouver ses parents mais aussi par les sauver.

C'était dégoulinant de mièvrerie mais c'était au fil du temps son début de « ils vécurent heureux ».

« Ils » : elle, son fils retrouvé, sa famille (re)trouvée et Hook trouvé. Grand, beau, brun ténébreux avec une touche de sarcasme. Son idéal de petite fille. Et le cuir lui allait bien.

Bref sa fin heureuse.

Sauf que… elle en était a priori encore aux épreuves. Parce que les relations homme/homme, femme/femme, elle comprenait. Elle était plutôt ouverte d'esprit sur ce genre de chose. Et honnêtement dans un monde où la magie existe, être gay était à ses yeux quelque chose de presque insignifiant. Mais même elle avait des limites. Et ÇA, c'était une limite.

Elle parlait là de Hook qui lui jurait un amour éternel et de David slash prince charmant, qui promettait de défendre son honneur et son bonheur envers et contre tout. Son amour vrai et Son père. Ensemble…

Choqué ? Ça ne pouvait pas être autant qu'elle. Par amour pour Snow, elle était heureuse d'avoir été celle à les surprendre, la pauvre ne s'en serait probablement pas remise. Elle regrettait de ne pas avoir déménagé plus tôt avec Henry, elle se serait épargné cette vision. Ou pas… ils auraient pu faire ça n'importe où !

Hook et David… quand elle repensait à Neverland, quand elle se souvenait d'avoir été heureuse qu'ils s'entendent et se rapprochent… Sainte mère de Dieu… Hook et son père…

Elle aurait peut-être dû s'en douter… dans le dessin animé Peter Pan, le Capitaine Crochet semblait avoir un petit quelque chose avec Mr. Mouche. Ce petit quelque chose qu'il avait visiblement avec son père, à présent.

Snow ne s'en remettrait pas. Comment son… comment leur Amour Vrai avait-il pu faire ça ? Pouvait-on en avoir plusieurs ? Etait-ce la raison de cette tromperie ?

Regina en avait eu plusieurs : Daniel et maintenant Robin. Mais pouvait-on en avoir plusieurs… en même temps ?

Parce qu'Emma avait vu Snow et David roucouler beaucoup trop longtemps ensemble pour penser qu'il puisse si facilement la trahir. Mais après tout, avec la fin de la malédiction ils avaient gardé un peu de ce qu'ils avaient été durant et David n'y avait pas été très fidèle.

Cela amenait à une seconde question… depuis quand ? Depuis quand ces hommes en qui elles portaient toute leur confiance couchaient-ils dans leur dos et sous leur toit avant de leur revenir souriant ?

La tristesse et la rage se mêlaient en elle et elle se surprenait à présent à vouloir rejouer la scène. À ouvrir en grand cette porte entrouverte et à les confronter, les humilier… les blesser. Pourquoi devait-elle être la seule à en souffrir alors qu'ils étaient les seuls à faire quelque chose de mal ? Où était la règle d'or des contes ? Le bien gagne, le mal souffre et vive les fins heureuses !

Mais elle n'avait rien fait. Elle avait tourné les talons aussi silencieusement que possible en essayant d'ignorer les sons sortant de la chambre, elle avait reprit en main son café abandonné sur la table et elle était sortie. Tout simplement.

Tout ça à cause d'un bonnet ! Elle avait oublié ce fichu bonnet (essentiel quand des reines des neiges déclenchaient des hivers précoces à chaque crise de panique ou de colère) et sa patrouille passait à côté de l'appartement. Elle avait pensé que c'était une bonne idée de faire un bref arrêt pour le récupérer. Erreur !

Enfin… mieux fallait le savoir tôt que tard. Elle aurait pu être bien plus engagée avec Hook qu'elle ne l'était. Ils auraient pu vivre ensemble… être marié ou avoir des enfants !

En sortant, elle avait appelé Snow. Elle devait s'assurer qu'elle n'allait pas débarquer à l'improviste et voir ce qu'elle avait vu. Elle aurait pu avoir Neal dans les bras et le lâcher face au choc de la découverte. Vision théâtral peut-être, mais Snow pouvait être une drama queen parfois.

Mais Snow était avec Ruby à parler bébé et couches. Emma pouvait presque compatir pour cette dernière.

Emma devait réfléchir à comment le dire à Snow. Ou peut-être devait-elle confronter David et Hook en premier.

Emma ne savait pas quoi faire ou comment agir. Si Hook avait couché avec n'importe qui d'autre que son père (exception faite s'il avait couché avec sa mère, le problème aurait été le même), Emma l'aurait aussitôt confronté. Cela aurait correspondu en un étonnant mélange de baffes, de castration, d'insultes et d'objets lancés à son visage. Elle aurait peut-être hésité à le dire à ses parents mais ils auraient fini par en entendre parler (inconvénient des petites villes) et ils l'auraient défendue (par l'arc pour Snow et par l'épée pour David). Hook aurait fini par être calomnié et rejeté par la ville (Snow et David réunissaient facilement les foules sous leur bannière, Regina pouvait le confirmer) et il aurait fini seul sur une barque entouré de toutes les morues qu'ils voulaient.

Sauf que le problème était toujours le même : la morue était un mâle, son père.

Pas de vengeance par l'épée donc.

Mais enfin, Emma n'avait jamais été du genre à avoir besoin de quelqu'un et son arme à feu fonctionnait très bien. Par ailleurs, elle était sûre que Ruby pourrait soutenir toutes les idées de vengeance qui leur traverseraient l'esprit à sa mère et elle. Deux de ses amies venaient d'être affreusement trompées, après tout qu'une fois loup elle creuse les trous pour les enterrer ou qu'elle les dévore, Emma ne dirait pas non.

Bon, peut-être qu'elle était un peu excessive. Snow avait aussi son mot à dire dans l'histoire et Emma n'avait toujours pas trouvé comment lui dire.

Alors qu'elle revenait avec précaution vers le poste du Sheriff (des plaques de verglas parsemaient la ville), Emma songea à un autre souci. Il était absolument hors de question qu'elle revienne dans cet appartement. HORS DE QUESTION !

La solution évidente aurait été de prendre une chambre chez Granny mais Hook et sa famille (de manière générale) y étaient beaucoup trop souvent. Hook surtout qui, son bateau absent, avait bien dû trouver où se loger. Elle n'allait donc certainement pas y louer une chambre.

Henry, lui, allait simplement rester chez Regina, dans sa chambre avec ses affaires le temps qu'Emma trouve autre chose. Pour quelques jours, elle allait bien trouver quelqu'un prêt à au moins lui prêter un canapé. Ou elle pouvait demander une chambre d'ami à Regina.

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