Au Temps des Légendes

Prologue : Emma d'Angleterre

Avertissements : On pourrait croire qu'ils sont à moi, mais non. J'en suis navrée, mais comme beaucoup d'entre nous, je ne suis pas JKR, juste quelqu'un qui aiguise sa plume en jouant avec son univers.

Dédicace : Cette fanfiction est dédicacée à Samantha Kieran – connue sous le pseudo de One Ring, Sammy Kieran ou encore Samrazorbill – qui m'a aidée à ne pas me laisser aller alors que j'étais en exil loin de ma famille et mes amis, à l'époque où je couchais sur clavier les premières lignes de cette fanfiction. Sammy qui depuis tout ce temps continue à me poser des questions sur cette histoire qu'elle veut voir achevée. Un grand merci Sammy.
À mes relecteurs, mon tendre Kciop, ma charmante Tsunamie, qui ont repris ces premières lignes avec patience et bienveillance.


Notes Historiques :

18 octobre 1016 – Knut signe un traité de paix avec le roi Aethereld, mettant fin à trois années d'invasions danoises.

30 novembre 1016 – Knut devient roi d'Angleterre et prend Emma pour femme qu'il avait arrachée à Aethereld des mois plus tôt.

2 février 1017 – Naissance de Rowan, princesse d'Angleterre.


« Le commencement est un moment d'une délicatesse extrême… »

Franck Herbert – Dune volume 1


Suggestion Musicale : Arcana « Dark Age of Reason »

Un orage. Quoi de plus accueillant pour le futur héritier des Royaumes Unis, songea sombrement le roi Knut en sirotant son vin et regardant la foudre zigzaguer dans le ciel d'Angleterre. Il soupira. Ce n'était pas la première fois que la reine entrait en couche. Loin de là. Entre ses différents époux, elle avait déjà mené à terme plus de dix grossesses. Mais c'était le premier de ses héritiers, à lui, qu'elle allait mettre au monde. S'il n'avait été fou de cette femme...

Mais voilà, il était fou d'Emma. Il avait même fait la guerre à son époux Aethereld pour elle. Sa beauté était si pure… si rare… Quand il l'avait vue la première fois qu'il s'était rendu à la cour d'Angleterre, émissaire du Danemark, il avait cru à l'apparition d'une fée, une déesse ancienne. Et puis, il s'était rendu compte qu'elle était humaine et avait souhaité de tout son être la faire sienne, quitte à utiliser tous les moyens.

Et le seul qu'il connaissait était la violence. Il avait mis le pays à feu et à sang, brisé la paix établie par Aethereld, rejeté ses dieux nordiques en s'alliant à l'église, et l'avait prise pour femme, s'attirant la colère de ses voisins Normands qu'Edouard, le fils d'Emma et Aethereld avait rejoints. Mais qu'importe car Emma était sienne et Edouard perdrait la plupart de ses alliers lorsqu'il posséderait un héritier du sang royal d'Angleterre. Et c'est ce qu'elle s'apprêtait à lui donner cette nuit-là.

Un nouvel éclair sillonna le ciel et frappa le vieux chêne dans la cour qui prit feu. Knut sursauta. Quel étrange présage…

« L'enfant ne tardera plus votre majesté. » Déclara un soldat qui se tenait à l'entrée de la salle du trône.

« Très bien. Faites préparer le sceau et appeler l'Enchanteur. »

- A vos ordres Altesse ! » Répondit le soldat en frappant son bouclier de sa lance et se précipitant à la recherche du magicien.

Knut fit tourner le liquide rouge sang à la lumière des flammes dans sa cour. Puis il avala le verre d'une traite et le jeta vers les flammes. « A mon héritier ! » déclara-t-il en regardant les étoiles qui perçaient à présent le manteau de nuage poussé par le vent.

Une femme hurlait en même temps que la foudre s'abattait dans la cour. Un dernier cri pour une naissance. L'enfant était là, dans les bras de la sage-femme et la regardait silencieux. La Reine sourit tendrement et une larme coula lentement le long de sa joue sur laquelle elle cristallisa. La Dame de Compagnie de la Reine saisit la pierre précieuse et l'attacha à une chaîne, comme elle le faisait pour chacun des enfants féeriques qu'elle avait vu naître. Elle passa l'objet au cou de l'enfant qui alors seulement poussa son premier cri.

Comme si le signal avait retenti, des soldats entrèrent dans la chambre. Ils prirent l'enfant des bras de la sage-femme paniquée et l'éloignèrent de la Reine. Emma se redressa dans son lit, mais fut retenue par sa Dame de Compagnie.

« Que lui faîtes vous ? Où est Knut ? »

- Dame Emma, ce sont les ordres. Le Roi veut pouvoir toujours reconnaître son héritier. »

Emma regarda avec horreur le magicien du Roi pénétrer dans la chambre, un tison ardent ensorcelé à la main se dirigeant vers l'enfant.

« Non ! vous ne pouvez pas, l'enfant est trop jeune ! Il mourra si vous le blessé !

- Ma tendre Emma, c'est pour le bien de l'Angleterre ! déclara Knut en entrant dans la chambre. Mon fils doit toujours se souvenir de qui il est !

- Knut empêchez les, pour l'amour du ciel ! Ce n'est qu'un nouveau-né ! Vous ne savez même pas s'il vivra assez longtemps pour être baptisé ! Cria la Dame de Compagnie.

- L'enfant vivra ! Les cieux ont pris la vie du chêne pour la donner à l'enfant ! » Rétorqua le roi.

Les soldats écartèrent les tissus qui enveloppaient l'enfant et l'enchanteur appliqua le tison sur la poitrine du bébé. Le bébé grimaça puis laissa éclater ses sanglots après plusieurs secondes. Pas des cris de douleur, mais la peine d'un enfant qui ne comprend pas ce qui se passe.

« C'est fait votre Altesse. L'enfant est fort, il n'a pas pleuré de douleur, » déclara le Sorcier en s'écartant.

Knut s'approcha de l'enfant et le sortit du linge maculé de sang, le levant au-dessus de sa tête, ses yeux plissés de plaisir à la vision du nouveau-né si fort. Mais son visage pâlit en découvrant l'inconcevable.

« Mais c'est une fille ! Hurla-t-il, en regardant avec plus d'attention le bébé.

- N'écoutez vous donc jamais ce que la Reine vous dit ? Marmonna la Dame de Compagnie.

- Knut je t'avais dit que je ne portais pas l'enfant assez en avant pour qu'il s'agisse d'un garçon ! répondit la Reine qui tendit les bras vers l'enfant qui continuait à pleurer doucement, à présent saisit par la faim.

« Ce n'est pas un garçon… Balbutia Knut qui semblait prisonnier d'une transe. Maudit Enchanteur, tu m'avais pourtant promis…

- Majesté. Je vous ai dit que votre héritier serait un grand guerrier, que son destin serait glorieux et que dans mille ans, on parlerait encore de lui. Je n'ai jamais parlé de son sexe, déclara l'Enchanteur d'un ton calme.

- Est-il possible pour une femme, de réaliser tant de destruction et de miracles ? demanda Knut incrédule.

- Ne chantons nous pas encore les exploits de Guenièvre, Dame du Lyonness ? et la Chute de Troie provoquée par Hélène ? » Demanda la Dame de Compagnie.

Knut les dévisagea tour à tour. Il vit la flamme qui brillait dans les yeux de sa femme, le détachement de l'Enchanteur qui répondait malgré tout aux regards défiants de la Dame de Compagnie. Il avait l'impression que quelque chose de grave se passait ici et qu'il en était exclu. L'enfant qui sanglotait jusqu'à présent se mit à crier.

Knut dévisagea le nouveau-né aux pâles yeux verts et aux duvets d'un cuivre tirant sur le blond. C'était un beau bébé, plus beau que tous ceux qu'il avait tenu dans ses bras, la septième fille d'Emma. L'enfant se tue en plongeant son regard dans les yeux de cet homme qui devait incarner la figure paternelle. Knut la porta au-dessus de sa tête.

« Peuple d'Angleterre, saluer la princesse Rowana d'Angleterre. Que dans milles ans, son nom et ses faits d'armes soient encore chantés. Ensemble réunifions ce sacré Pays ! »

Les soldats s'inclinèrent devant leur souverain et leur princesse qui se remit à pleurer. Emma s'était redressée dans son lit et sa Dame de Compagnie gifla Knut tout en lui prenant l'enfant des bras.

« N'es-tu pas fou ? Faire de tels vœux pour une petite fille qui ne veut que prendre son premier repas. Qui es-tu pour souhaiter à cet enfant un tel destin ? La guerre n'est jamais une solution Knut. Je croyais que tu le savais ! Aethereld au moins l'avait compris ! » S'écria Emma d'une voix stridente à la limite de l'hystérie.

Le Roi dévisagea la Dame de Compagnie et sa Reine, muet de stupéfaction. L'enfant pleurait toujours, mais se tue dès que ses lèvres touchèrent le sein de sa mère auquel elle s'accrocha goulûment.

« Maudite femelle ! Ne prononce plus jamais ce nom devant moi ! Bien sûr que la violence résout les problèmes ! C'est la violence qui t'a faite mienne, c'est le sang des Anglais qui a coulé pour toi. Ne l'oublie jamais Emma. Tu n'es Reine que parce que je le veux encore ! Tu peux être remplacée à tout moment. Quant à ta fille, profite bien d'elle car tu ne la reverras plus. Elle sera envoyée auprès des meilleurs chefs de guerre et deviendra une Valkyrie Emma, une princesse de feu et de sang ! »

Knut fou de rage se tourna vers ses soldats.

« Prenez lui l'enfant quand elle l'aura nourrie et amenez-le à une nourrice. Ma fille ne subira pas plus longtemps l'influence de sa mère. Et toi Enchanteur, vient avec moi, nous devons parler du futur ! »

Et sur ce, il quitta la chambre écumant de rage et on entendit un vase se fracasser contre le mur extérieur. Emma s'affaissa tremblante dans le lit, l'enfant pleurant contre elle, sentant qu'on l'arracherait bientôt à sa mère. La Dame de Compagnie murmura quelque chose à la sage-femme qui acquiesça et força les soldats à sortir.

« Dame Emma, ne pleurez point, murmura la Dame de Compagnie alors que la sage-femme revenait vers elles.

- Oh, mes tendres Amies. J'étais si heureuse de porter un enfant fort. Le vent et les étoiles m'avaient prévenue, mais je ne les ai pas écoutées. Et maintenant Knut veut me priver de Rowana comme il m'a privée d'Edouard, Alfred et Godfigu. »

Emma éclata en sanglots en pensant à jeunes enfants exilé à la cour du Duc de Normandie. Sa Dame s'approcha d'elle et l'entoura de ses bras.

« Douce Emma, ne pleure pas. Peut-être est-il seulement temps pour nous de retrouver les nôtres, » déclara la sage-femme tout en caressant ses cheveux.

La jeune Dame de Compagnie lui montra la chaîne dorée à laquelle pendait la larme cristallisée et tira de son décolleté une chaîne identique pour montrer qu'elle partageait son avis. La Reine porta la main à sa propre chaîne et au cristal qu'elle portait depuis sa naissance. Les larmes continuaient à couler sur son visage, mais celui-ci prit une expression plus déterminée que jamais.

« Vous avez raison, douce Lily, douce Viviane. Je ne peux pas le laisser faire. Je ne suis pas un de ses sujets et je ne l'ai jamais été. Rowana, ma tendre petite fille. Cet homme ne fera pas de toi un monstre assoiffé de sang.

- Dépêchons nous Emma, ou Knut et les soldats se douteront de quelque chose. Un bateau nous attend pour la France, commença Viviane.

- Je ne peux pas partir. Si je pars, il le saura tout de suite. Tu sais que je ne passe plus inaperçue depuis longtemps. Et l'Angleterre a besoin de sa Reine.

- Emma, depuis quand te considères-tu comme la Reine de ce pays ? demanda Viviane avec plus de venin dans sa voix qu'elle ne l'aurait voulu.

- Depuis qu'Aethereld m'a confié son pays… murmura-t-elle en baissant les yeux.

Viviane la dévisagea avec un regard dur. Des flammes brûlaient dans ses yeux et Emma y lut un grand combat intérieur. Ce fut Lily qui parla tout en posant une main sur l'épaule de la Dame de compagnie pour l'apaiser.

- Viviane, laisse Emma. Elle aimait Aethereld et lui a promis de veiller sur son peuple. C'est ce que tu fais-toi aussi pour sa descendance. »

La Dame de Compagnie regarda à nouveau la Reine et l'enfant qui tétait goulûment. Oui, elle aussi par amour consacrait sa vie à protégée SA descendance. Elle détourna les yeux et chassa du même geste les larmes qui lui montaient aux yeux.

« Et bien, puisque tu as pris ta décision.

- Viviane, s'il te plaît… Tu as été la meilleure Dame de Compagnie que dont on puisse rêver. Promets-moi de…

- Je n'ai pas à te le promettre. Tu sais que je le ferai de toute manière. »

Emma sourit et se redressa dans son lit. Elle embrassa tendrement le nouveau-né avant que La sage-femme ne la prenne dans ses bras. Viviane se baissa vers la Reine et dessina le signe de la lune sur son front, salut d'adieu de leur peuple. Emma sourit tristement en lui rendant son salut. Elle caressa une dernière fois le duvet pèche sur la tête de sa fille. Celle-ci regardait silencieuse tout ce qui se passait autour d'elle. L'enfant ne pleura pas, mais une larme coula sur sa joue quand Lily referma le linge sur son visage.


Le vent avait recommencé à souffler dès le moment où la frêle embarcation avait quitté la tour. L'enfant endormie souriait à la sage-femme qui avait refusé de la laisser porter, même par Viviane qui était depuis déjà cinq siècles la protectrice de cette lignée. Bientôt ils auraient rejoint la mer, la France et chez elles. Mais Lily était inquiète.

Elle craignait d'emmener l'enfant auprès des autres héritiers d'Emma qui résidaient à présent avec le frère de celle-ci, le Duc de Normandie. Elle était un otage trop précieux entre les mains de cet ambitieux, et que dire de Rowana, à présent reconnue comme unique héritière de la couronne par Knut ? Edouard serait bientôt en âge de la réclamer, mais il était si paisible et pacifique qu'il mourrait avant d'avoir posé pied en Bretagne, s'il n'entrait pas dans les ordres avant. Godfigu n'avait pas la trempe d'une Reine, et Alfred était si emporté que lui ne survivrait pas assez longtemps à une guerre pour reprendre le pouvoir. Il ne restait donc que Rowana. De cela Lily était sûre, Viviane s'étant assurée le jour où le roi Knut avait pris de force Emma pour Reine de maudire sa descendance afin que tout enfant revêtant l'habit royal meure au bout de quelques saisons dans d'atroces circonstances. Alors comment protéger Rowana efficacement jusqu'au jour où la couronne deviendrait sienne ?

Lily aurait pu emmener l'enfant auprès du peuple dont était issue la grand-mère d'Emma, mais elle avait depuis trop longtemps compris que cette lignée s'était affaiblie et n'était plus assez fée pour s'y sentir chez elle. Viviane les regrettait beaucoup plus qu'Emma. Elle avait montré en de nombreuses occasions qu'elle égalait l'Enchanteur royal, et peut-être même le véritable Enchanteur, mais elle avait elle aussi décidé de quitter ce havre de paix illusoire. Non, Lily ne pouvait y cacher Rowana, du moins, pas tant que l'enfant n'aurait pas grandi et serait capable de vivre par elle-même, de choisir par elle-même.

Viviane s'approcha et murmurant une chanson douce, réchauffa le cœur ombragé de Lily. Chaque problème trouvait sa solution en son temps. Elle sourit de loin à Viviane alors que celle-ci parlait avec le pêcheur à qui elle venait d'acheter la barque.

« Vous êtes sûre que vous saurez manœuvrer ce navire ma Dame ? Je veux dire, enfin, vous me comprenez, bégayait le pêcheur.

- Je vous comprends tout à fait, mais j'ai grandi sur une île, alors la mer me connaît. Et nous étions d'accords. Le prix que vous m'avez demandé était assez cher. »

Le pêcheur rougit et baissa les yeux. Quand Viviane avait décidé quelque chose, seule Emma parvenait à la faire plier. L'homme hocha finalement la tête et quitta l'embarcation à la nage. Viviane soupira de soulagement et regarda son amie.

« Alors ma Chérie, vers quelle destination nous dirigeons nous ? Les sirènes veilleront à ce que nous arrivions à bon port, déclara Viviane.

- C'est donc pour cela que tu passais toutes tes nuits loin du palais ! Et moi qui croyais que tu avais enfin trouvé un humain à épouser. »

Viviane foudroya Lily du regard, puis rit voyant qu'elle la provoquait.

« Emma m'a fait changer d'avis sur beaucoup de choses. Mais je continue à penser que s'il y a si peu de mâle parmi les nôtres, c'est que notre peuple est destiné à s'éteindre. À quoi bon aller au-devant d'ennuis et créer de nouveaux monstres.

- Et à quoi servirais-je si les fées n'ont plus d'enfants ? Ne croies-tu donc pas que nous ayons le droit à un avenir, nous aussi ? murmura Lily en s'asseyant à côté de la barre. Ne croyais-tu pas en Merlin ? »

Viviane détourna le regard. Ces yeux s'étaient assombris au nom de Merlin.

« J'y ai cru et je l'ai suivi, il y a de cela cinq siècles. J'ai vraiment cru que Myrdin, l'immortel, parviendrait à nous sauver. Mais il s'est laissé accaparer par les hommes et a été détruit. Alors à quoi bon essayer de nous sauver ?

- Un jour, il reviendra. Ne l'oublie pas, il l'a promis.

- Oui, oui, je me souviens. 'Quand les quatre éléments se seront unis, alors Merlin se dressera à nouveau face aux ténèbres et l'équilibre sera rétabli.' Mais pour moi c'est du charabia. Mère était plus forte pour dénouer les prophéties.

- Preuve que tu n'es pas aussi chimère que tu le prétends.

- Oh toi jeunette ! Tu as envie de me taquiner et je ne suis pas d'humeur, » grogna Viviane en époussetant sa robe et bloquant la barre.

Elle se dirigea vers le bord et tirant une pincée de poudre de sa bourse en même temps qu'un coquillage dans lequel le vent jouait et tirait une douce mélodie, elle appela les sirènes. Lily fut comme toujours émerveillée par la facilité qu'avait son amie à passer sans y penser d'un monde à l'autre.

Bientôt le bateau fut entouré de Sirènes qui saluaient Viviane avec de grands sourires et se bousculaient pour apercevoir le bébé dans les bras de Lily. Viviane leur parla dans leur langue que Lily n'avait jamais comprise, encore un signe qu'elle n'avait pas le sang aussi pure que Viviane qui affichait toujours son corps de jeune fille alors qu'elle avait facilement deux siècles de plus qu'elle, qui semblait une vieille femme.

Viviane se retourna perplexe vers la sage-femme et l'enfant, puis vers la doyenne des sirènes qui avec qui elle parlait. Et ce, plusieurs fois de suite. Emma commença à s'inquiéter quand elle perçut le mot Emrys, l'immortel dans l'ancienne langue de Bretagne. Lily remarqua alors que les sirènes avaient toutes les yeux fixés sur le bébé, comme on regarde un messie. Elle dévisagea alors la petite fille de plus près, mais ne voyait rien qui la différenciait des autres bébés. Si ce n'est cet horrible tatouage magique qui la marquerait à vie. L'enfant ouvrit lentement ses yeux et Lily vit.

Elle vit le regard de jade de la petite fille qui n'y était pas quelques heures plus tôt, et les cheveux aux reflets cuivrés qui tiraient à présent plus vers un blond presque blanc. Elle vit la peau de l'enfant déjà dorée alors qu'elle n'avait pas encore connu le soleil. Elle avait toutes les caractéristiques des Chimères – ou Atlantes – et notamment de leur Reine actuelle. Et elle vit la forme qu'avait prise la larme qui pendait sur le ventre de l'enfant : une épée fine gardée par un dragon. Lily releva les yeux et croisa le regard de Viviane qui venait de le voir aussi.

« Les Sirènes refusent de mener l'enfant en Avalon. Elles disent que l'enfant doit d'abord rencontrer l'Emrys et apprendre. Elles disent aussi que je dois te laisser, que ma route doit suivre celle de l'enfant, et non plus la tienne. »

Lily frissonna. Elle était soulagée, l'enfant n'était sûrement pas un nouvel Emrys, pas avec un sang aussi dilué. Mais elle était triste de devoir l'abandonner aux soins de Viviane. Au fond d'elle-même, Lily savait pourtant que c'était la meilleure chose à faire. Son corps marqué par les rides du temps ne lui permettaient plus la mobilité ni l'énergie qu'il fallait pour éduquer une enfant au destin aussi mouvementé. Et la Reine ne permettrait pas à l'accoucheuse de fées de quitter son poste, aussi rare fussent les occasions où l'on faisait appel à elle.

Lily releva la tête vers son amie et sourit.

« Ne t'inquiète pas Viviane. De toute façon, tu ne voulais pas rentrer en Avalon, voilà le prétexte qui te sauve.

- Tu es sûr que tu vas me laisser faire ? demanda-t-elle, le front toujours plissé. La Reine ne va pas apprécier de laisser en liberté un nouveau sang-mêlé.

- Je n'ai jamais été aussi sûr de toute ma vie, » répondit Lily en passant sa main dans ses cheveux d'un blanc maculé.

L'enfant leva les yeux vers la 'viellefemme et esquissa les prémisses d'un sourire. Les Sirènes chantèrent alors. Viviane furieuse du bruit alors que le voyage se devait discret, se retourna, mais Lily se contenta de lui sourire. Viviane approcha et prit l'enfant dans ses bras.

« C'est ici que je descends Lily. Ne t'inquiète pas pour moi. Je n'ai pas tes dons concernant les enfants, mais je connais pas mal de trucs. Je peux me débrouiller comme je l'ai fait pour Lancelot. Tout ira bien.

- Viviane je… »

Mais Viviane la fit taire en la prenant dans ses bras. Lily pleurait, sachant qu'elle ne reverrait plus sa consœur. Lily serra très fort celle qui l'avait élevée comme sa fille avant de la confier aux guérisseurs d'Avalon qui l'avaient formé à son métier de Sage-femme. Elle s'écarta finalement alors qu'elle sentait les larmes lui monter aux yeux.

« Allez, ce n'est qu'un au revoir ma tendre Amie. Et puis, tu râlais depuis si longtemps qu'aucune chimère ne s'intéressait d'assez près aux connaissances des guérisseurs, isolés qu'ils sont sur leur île. Profites-en pour donner un bon coup dans la fourmilière et transmettre ton savoir. Tu trouveras toujours de quoi t'occuper Lily. Et puis je ne suis pas seule. Rowan est avec moi.

- Viviane, veille bien sûr l'enfant. L'Enchanteur avait raison sur un point. Elle sera une grande Dame et dans mille ans, on chantera encore son nom. Mais son chemin sera difficile. »

Viviane frissonna, mais hocha la tête. La septième fille d'Emma, son dernier enfant…

Protégée par le vent qui poussa de la mer la brume, Viviane disparut avec la petite-fille vers les terres. Lily soupira. Peut-être aurait-elle dû lui dire pour l'enfant et Merlin… Ce que Merlin avait laissé aux autres Chimères que Viviane avait refusé de lire. Les sirènes chantèrent. Lily sortit de sa torpeur et après un dernier regard en arrière reprit la mer vers Avalon.


Knut était toujours assis sur son trône. Il regardait dans le vide, essayant de comprendre la fureur qui l'avait saisie. L'Enchanteur qui le suivait depuis qu'il était devenu chef de guerre l'avait aidé à se calmer mais avait confirmé qu'il fallait éloigner l'enfant de sa mère et de ses préceptes pacifiques. Les soldats étaient allés chercher une nourrice à qui confier le bébé jusqu'à ce qu'il puisse être entraîné par les meilleurs guerriers du pays.

Knut avait également réalisé qu'une fille serait mal acceptée par ses vassaux. Mais il était trop tard, et la naissance de la Princesse Rowana, reconnaissable au tatouage de Griffon sur sa poitrine était déjà proclamé à travers tout le pays. À présent, il attendait l'arrivée de la nourrice pour aller arracher l'enfant à Emma. Elle lui en voudrait certes. Mais il était persuadé que comme toute femme qui se doit d'obéir à son époux, elle accepterait. Oui, tout irait pour le mieux, pensait le roi en se redressant au bruit de pas.

Un soldat entra en toute hâte dans la salle du trône et tombant à genoux déclara :

« Je supplie votre majesté de pardonner à ses hommes.

- Parle imbécile avant que la colère ne me reprenne ! grogna-t-il.

- Le Prince, ainsi que Dame Viviane et Dame Lily… »

Knut descendit de son trône et attrapa le soldat par son col.

« Qu'est-il arrivé à la Dame de Compagnie et ma fille ! Et bien parle !

- Ils ont disparu ! Tous autant qu'ils sont. Il n'y a pas traces d'eux !

- Parbleu ! C'est un coup de Viviane ! L'Enchanteur m'avait prévenu qu'elle me prendrait mon plus grand trésor. Faites battre le rappel des troupes ! Deux femmes et un bébé ne peuvent aller bien loin. Le bébé porte un tatouage de griffon sur la poitrine, hurla Knut en lâchant le soldat qui alla frapper le sol de pierre en gémissant. Et appelez-moi l'Enchanteur ! Il saura où se trouve Viviane.

Knut enrageait et promettait de mettre le monde à feu et à sang pour les retrouver, se maudissant d'avoir annoncé trop tôt la naissance de l'enfant.


Notes de l'auteur :

(3 mars 2003)

Bon alors petite note historique. Emma et Knut ont réellement été souverains d'Angleterre. Avant cela, Emma était marié à Ethereld le précédent roi avec qui elle avait un fils, Edouard qui se réfugia en France à la chute de son père. Myrdinn, c'est le nom cymry de Merlin (dialecte anglais de 500 après JC). Dans la même lignée, Emrys veut dire Immortel.

Bon, pour ceux qui n'ont pas compris, je vais essayer d'écrire une fanfiction sur l'origine de Poudlard et un peu plus. J'ai choisi en fait de suivre la vie de Rowena Ravenclaw, qui est, je ne sais pas pourquoi mon fondateur préféré.

Désolée à ceux qui m'avaient lue pour « Of Slayer and Sorcerer » mais ce que j'écris dans cette fic aura un écho pour OSS2. Voilà !

Important, après avoir complété mes recherches sur internet, j'ai fait pas mal de bourdes historiques. N'hésitez donc pas à me laisser votre petite note pour corriger tout ça!

Comme toujours, lire et commenter ! Merci d'avance !

(7 Avril 2010)

La relecture, travail long et fastidieux. Mais il faut s'y atteler pour signifier les progrès fait depuis 2003 et rendre justices aux derniers chapitres qui dépendent tant de l'accroche des premiers chapitres. Bonne lecture à vous.