Une histoire sans nom
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En parallèle de « Hunter Academy », je vous présente une petite fic de trois chapitres.
Je préviens de suite, c'est un UA et il est plutôt spécial.
Déjà, vous le verrez (ou pas) j'ai modifié ma façon d'écrire. J'ai essayé une nouvelle formulation, quelque chose de plus soutenue, en dehors de ma zone de confort.
Ce premier chapitre est plutôt sombre et triste. Mais, nulle inquiétude, il y a une lumière au bout de chaque tunnel...
Enfin, cette histoire m'a été fortement inspirée par trois livres.
Je vous expliquerez tout ça à la fin, peut-être reconnaîtrez-vous, (ou pas) deux des livres dans ce premier chapitre. Quant au troisième, il sera plus présent dans la suite.
Ah et, l'histoire se déroule sur 44 ans ! De 1973 à 2017 !
Cette histoire m'a tuée... C'est mon petit bébé, alors, j'espère qu'elle vous plaira...
Bonne lecture !
(Relue, corrigée et approuvée par Caly)
Disclaimer : Tous les personnages appartiennent à Eric Kripke à la CW, etc. Je ne détiens aucun droit sur cette série et n'en tire aucun profit. À part peut-être mon plaisir personnel.
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Chapitre 1
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1973 – Pontiac, Illinois, USA.
Il est des histoires qui commencent le plus normalement du monde, à savoir : une naissance. Tel fut, et sera le cas, pour cette histoire, car le 10 juillet de cette année-là, vint au monde un bébé à la maternité du O.S.F-Saint-James. Les parents de ce petit garçon étaient des êtres très pieux et accrochés aux valeurs de l'église qu'ils défendaient tous les dimanches et chaque jour que leur Dieu faisait. Ils décidèrent donc d'un accord tacite de nommer leur nouveau-né comme un des enfants de leur Sauveur, et parmi tous les noms angéliques que la Kabbale leur offraient, les parents choisirent le prénom « Castiel », en référence à l'archange Cassiel : l'ange des larmes et de la solitude...
Un prénom signifie énormément de chose, à lui seul il représente l'identité même de la personne au-delà de la simple appellation. Et, un jour pas si lointain que ça, Castiel comprendrait que, des larmes il allait en verser et la solitude il allait la connaître...
1979 – Lawrence, Kansas, USA.
Six ans après la naissance de Castiel, un autre petit être naquit ce 24 janvier 1979, au Lawrence Memorial Hospital, dans la ville éponyme, lors d'un hiver doux mais pourtant pluvieux. Dean, car tel était son nom, fit le bonheur de ses parents et notamment de sa jeune maman qui ne voulait jamais cesser de le bercer, allongée sur son lit d'hôpital sous le regard attendrissant de son mari John Winchester.
Quelques jours plus tard, cette nouvelle famille au demeurant très ordinaire, repartit dans leur humble demeure. Mary et John avaient acheté une charmante petite maison, voilà de cela une dizaine d'années, au bord d'une route, et voisine à d'autre demeures semblables. La résidence, que certain pourrait qualifier de « maison typique américaine » malgré l'absence du drapeau aux couleurs des USA, se démarquait des autres de part ses murs extérieurs peints en vert pastel, assortis au jardin si bien entretenu. Les fleurs hétéroclites offraient un panel de couleurs vives et charmantes à qui viendrait rendre visite aux Winchester.
Et, dans cette ville paisible, la petite famille vivait en harmonie avec les habitants. John, ex-marine, mais désormais mécanicien de bonne renommée, subvenait plutôt bien aux besoins de sa femme mère et au foyer et de leur jeune premier fils.
1983 – Lawrence, Kansas, USA.
Les affaires et la vie allaient bon train pour les Winchester, qui décidèrent alors d'avoir leur second enfant. Le jeune garçon, car c'était de nouveau un garçon, vint au monde dans le même hôpital que son aîné, un 2 mai 1983. Dean, maintenant âgé de quatre ans, accueillit ce nouvel arrivant si fragile comme le grand frère qu'il voulait être pour lui. Et, même s'il aspirait à reprendre l'entreprise automobile de son père, il s'engagea cependant à soulager sa mère pour s'occuper du petit Sam. Car, tel était le prénom du nouveau-né : Samuel Winchester, comme le père de Mary. La petite famille accueillit comme il se devait ce bébé qui égayerait encore plus une maisonnée déjà si joyeuse.
1984 – Drogheda, Comté de Louth, Irlande.
Quelques mois après la naissance de Sam Winchester, une autre venue au monde semble intéressante à évoquer pour la suite de l'histoire. Loin du rêve Américain et des hôpitaux salubres, dans un dispensaire pour les indigents, une jeune femme arriva en pleure, prête à accoucher. Veuve depuis peu de temps, et malade de surcroît, la pauvre future maman savait sa fin arriver. Une infirmière bien proche de la retraite assista un médecin, qui souhaitait avidement rentrer chez lui, pour mettre au monde l'enfant. Après les cris de la mère et les pleurs du bébé, l'inconnue allongée sur le lit sale demanda de voir son petit avant de mourir. Elle sentait sa fin venir, Dieu l'a rappelé à elle, mais la maman voulait tenir le nourrisson dans ses bras. La pauvre créature pleura sur le visage de son fils, car oui c'était un garçon, avant de fermer les yeux pour partir vers un monde meilleur. L'infirmière récupéra le bambin des bras de la défunte et se tourna vers le docteur, qui buvait enfin son Whisky de fin de journée.
- Qui était-elle ?
Le médecin se resservit un verre d'alcool tout en répondant avec nonchalance.
- Aucune idée. Une miséreuse, de toute évidence. C'est toujours la même histoire, ici ! Encore un gosse qui finira à l'orphelinat, au frais du pays, une bouche de plus à nourrir, à cause de tous ces traîne-misère ! Enfin... Bonsoir !
Il se leva, enleva ses gants et se dirigea vers la sortie en s'adressant une dernière fois à la vieille femme.
- Emmenez le p'tit à Dublin. L'orphelinat saura quoi en faire.
Une fois le docteur partit, l'infirmière suivit ses conseils à la lettre. Après avoir contactée la morgue pour s'occuper du corps de la défunte mère, la vieille dame prit un taxi, au frais déjà bien faible du dispensaire, pour se diriger vers Dublin. Les presque trois quarts d'heure de route qui séparaient les deux villes semblèrent bien plus longue à la future retraitée qui menaçait de s'endormir à chaque virage. Puis, lorsqu'au milieu de la nuit, elle arriva à l'orphelinat en question, elle fut heureuse de se décharger du fardeau qui l'incombait. Un fardeau sans nom, qui plus est. Connaissant les formalités administratives qui lui demanderaient l'identité de l'enfant, l'infirmière maudit la mère de ce dernier d'avoir gaspillé les dernières minutes de sa vie à pleurer sur son nourrisson plutôt qu'à lui donner un prénom. De ce fait, cette charge retomba sur la dame et, comme elle montait les marches de l'orphelinat qui se nommait « Saint Michael », elle nomma le bébé « Michael », sans trop d'imagination et de recherches. Et, lorsqu'elle toqua à l'énorme porte en bois en attendant qu'une Sœur ou un Frère vienne lui ouvrir, elle tourna le dos à l'orphelinat et découvrit une librairie de l'autre côté de la rue, éclairait par le faible halo d'un réverbère. La devanture affichait : « Davies & Sons ».
Enfin, Sœur Abaddon vint lui ouvrir et l'infirmière lui donna le bébé du nom de Michael Davies. Chaque jour suffit sa peine, la vieille femme courut aussi vite que ses jambes arthrosiques le lui permettaient, pour rentrer chez elle à Drogheda. Sa bouteille de Whisky l'appelait depuis Dublin.
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Comme je le disais, les prénoms signifient énormément pour chaque personne. Et, il n'y a aucun hasard derrière les noms. Ces garçons, que rien ne liait : ni le pays, ni l'État, ni même leurs histoires antérieures, avaient cependant un avenir similaire. Quelque chose, que certain pourrait appeler « Destin », rentrera bien vite en action pour chacun d'eux...
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1983 – Pontiac, Illinois, USA.
Alors que quelque part dans le Kansas, cette année-là, Sam Winchester venait au monde loin de Castiel, ce dernier avait déjà dix ans. Sur l'autorité suprême de ses parents religieux, le garçon étudiait dans une classe Catholique et n'avait que la Sainte Bible pour seul livre de chevet. Or, au plus grand damne desdits parents religieux, Castiel était un garçon curieux de tout, en soif d'apprendre tout ce que la vie pouvait lui offrir et pas seulement dans une église. Depuis petit, il demandait sans discontinuer : « Pourquoi ? » ou « Comment ? » à chaque fois que quelqu'un lui apprenait telle ou telle petite chose. Ses parents, qui avaient pourtant choisi le prénom de leur fils pour l'archange « Cassiel », ne comprenaient pas pourquoi leur enfant n'était pas muet comme l'ange en question. Et si, petit, le garçon parlait beaucoup trop, il avait appris à ses risques et périls à mieux tenir sa langue et garder ses questions pour lui-même.
Son père et sa mère, heureux d'avoir enfin un jeune enfant taciturne qui se dévouait à l'église, n'étaient pas préparés à ce que ledit enfant allait leur faire subir à leurs dépens. Car, Castiel avait une inclination pour une certaine personne dans son école, qu'il tentait de protéger et de garder secrète. Malheureusement pour eux, les parents de Castiel surprirent leur fils en train d'embrasser cette personne derrière le jardin de la maison. Lorsqu'ils séparèrent les deux jeunes gens, la mère poussa un cri horrifié, car la personne que Castiel aimait éperdument était un garçon...
Alors que la maman s'évanouit presque de chagrin, le père quant à lui jeta sur son fils un regard indigné, se demandant au plus profond de lui-même ce qu'il avait bien pu rater dans son éducation et pourquoi, pour l'amour de Dieu, cela devait-il leur arriver à eux ?
N'étaient-ils pas, depuis leurs venues au Monde, des êtres pieux et fidèles ? Dieu leur envoyait-il une épreuve ? Un test pour prouver leur bonne foi ?
Le père, qui ne répondait jamais aux questions de son fils, ne répondit pas non plus aux siennes. Il préféra, dans un premier temps, attraper Castiel par le col de sa chemise pour le ramener le plus rapidement possible chez eux. Il ordonna à sa femme de se remettre de ses émotions et de se relever pour « discuter calmement » de cet incident à la maison.
Ils ne discutèrent pas, et tandis que le copain de Castiel prit la poudre d'escampette pour quitter la demeure des Novak, le patriarche ferma à clef derrière lui lorsque toute la petite famille fut sous le même toit. La mère, toujours sous le choc, commença à pleurer à chaudes larmes, maudissant tout et tout le monde pour l'ignominie qui venait de se produire.
- Père ? entama le garçon. Laissez-moi vous expliquer que...
L'homme lui jeta un regard noir.
- Que quoi ? Que tu portes la honte sur notre famille et notre ville ? Pour l'amour du Ciel ! Si l'église venait à apprendre ceci, nous serions traités comme des pestiférés ou pire, comme des apostats !
À ces mots, la maman pleura plus fort encore, ce qui mit les sentiments de Castiel à rude épreuve. Le pauvre garçon ne voulait pas décevoir ses parents, il avait tellement essayé de ne pas éprouver cette attirance envers son camarade de classe. Mais, si la Bible et l'église ne pouvaient pas chasser ce désir chez lui, le père trouverait un moyen plus drastique et plus radicale pour remettre son fils sur le droit chemin...
1985 – Lawrence, Kansas, USA.
Un mal insidieux et invisible rongeait la famille Winchester. Dean, qui venait de fêter ses six ans, s'occupait toujours avec bienveillance et amour de son cadet de deux ans. Cependant, il est des choses dans le monde que même l'amour et la bienveillance ne peuvent sauver en aucune façon. Quelques mois auparavant, le médecin venait de prévenir John de ce qui l'attendait, et bien que sa femme et lui voulurent cacher cette triste vérité à leurs enfants, l'aîné n'en était pas aveugle pour autant.
À mesure que le temps passait, Dean voyait que la santé de son cher père déclinait peu à peu et qu'il passait de plus en plus de temps à l'hôpital. Mary trouva alors un petit boulot dans un restaurant de Lawrence pour joindre les deux bouts à cause des factures médicales qui commençaient à s'empiler vicieusement sur le bureau. Sans même comprendre ce qu'il se tramait, Dean arrêta de se rendre à l'école, malgré l'obligation scolaire, son jeune âge et les sempiternelles protestations de sa mère. Pourtant, Mary devait bien s'avouer que son fils l'aidait énormément, pas seulement dans les soins de Sam, mais également dans la maison, pour les petites besognes qu'un garçon de six ans pouvait s'occuper : quand sa mère partait au travail, tôt le matin en rentrant tard le soir, Dean veillait à ce que son « Sammy » ne manque de rien et la demeure respirait toujours le propre, le linge était étendu, le café préparé et la table mise. Chaque jour, la vie donnait son lot de charge au jeune Dean, qui remplissait ses devoirs avec ardeur pour ne pas penser à ce qui devait arriver tôt ou tard : la mort de son père. Il se refusait à y songer, il croyait au plus profond de son âme d'enfant que son papa s'en sortirait et sa mère ne le contredisait pas, car elle aimait à croire que leur foi ferait la moitié de la guérison de John.
Néanmoins, la maladie fut plus forte que l'amour ou la foi de la famille, lorsqu'un jour Mary rentra plus tôt de son travail, sous le regard interrogateur de Dean. Elle prit Sam dans ses bras et demanda gentiment à l'aîné de la suivre dans la voiture, l'heure arrivait, ils devaient tous se rendre à l'hôpital.
Ce même hôpital qui, des années plus tôt avait fait le bonheur de la famille avec la naissance des deux enfants, devint à ce jour l'endroit que les survivants détesteraient le plus au monde. Mary se gara hâtivement et, avec ses mains tremblotantes, essaya de détacher le petit Sam de son rehausseur jusqu'à ce que Dean lui vienne en aide. La maman, dont les larmes lui montaient aux yeux, expliqua le plus calmement possible à son fils.
- Dean... Tu devrais aller voir ton père, seul à seul. Il veut te parler. Vas-y. Sammy et moi, nous te rejoindrons plus tard...
Sans un mot, le garçon acquiesça et se dirigea seul vers l'hôpital, où le personnel qui connaissait désormais bien la famille Winchester, laissa aller le jeune fils vers la chambre de son père.
Du haut de ses six ans, Dean ouvrit la porte et entra dans une pièce sombre, à peine éclairée par quelques rayons de soleil qui se frayaient difficilement un chemin à travers les interstices des volets.
Ce halo, presque angélique, illuminait un homme, allongé sur un lit blanc et percé de dizaines de tubes en plastique qui rejoignaient un pied à perfusion en métal. Dean eut comme un mouvement de recul, face à la vision de son père alité et amaigrit, sentait la Mort planer au-dessus de lui. Un sentiment de tristesse, et de colère, s'empara du jeune garçon lorsqu'il se dirigea vers son père.
- Salut fiston.
Une boule d'angoisse se coinça dans la gorge de Dean, mais il s'assit sur un fauteuil aux côtés du malade, qui lui pourtant, souriait à la vue de son enfant.
- Comment te sens-tu, Dean ?
Le jeune garçon ne comprenait pourquoi son père s'inquiétait de ses émotions, pourtant il avoua, sans même s'en rendre compte.
- Je suis en colère.
John sourit, ce qui choqua derechef son fils qui n'eut cependant pas le temps de réfléchir à cet étrange sourire, car son père lui dit, avec tout l'amour du monde.
- C'est normal que tu sois en colère. Moi aussi, je suis en colère. Mais, je veux que tu saches une chose. Très importante. Sois en colère. Tu en as le droit. Ne laisse personne te dire le contraire. Ni ta maman, ni ton frère quand il sera grand, ni tes amis à l'école, ni même les professeurs. Personne. Et si tu veux casser des choses, briser des objets, pour extérioriser ta colère, alors vas-y. Fais-le. Casse tout. Brise tout. Sois en colère. Même contre moi, mon fils. Tu as le droit. Plus que quiconque, tu en as le droit. C'est Humain, la colère. Sois en colère.
Une larme coula le long de la joue de Dean, qu'il essuya avidement, désirant ne point montrer ses émotions face à son père qui semblait si courageux. Mais John ne sentait plus depuis longtemps un tel courage en lui, il sentait que la fin arrivait et il voulait avant tout parler à son aîné, lui révélant alors avec une grande douleur.
- J'aurais voulu vivre encore dix ans. Vingt ans. Cent ans. Voir le jeune homme et l'adulte que tu serais devenu. Ton frère et toi. Mais, je le verrai peut-être, tu ne crois pas ?
Dean ne répondit pas, la vie après la mort n'était pas une chose à laquelle il réfléchissait, car dans son esprit d'enfant, quand quelqu'un meurt, il part pour toujours. Peu importe où, personne ne le revoit jamais plus.
Et ce fut exactement ce qui arriva à John, quelques jours plus tard. Il partit pour toujours, quelque part, et personne ne le revit jamais plus...
1994 – Dublin, Irlande.
De 1845 à 1851 l'Irlande connut le pire épisode de son histoire, la « Grande Famine », qui condamna trois millions d'Irlandais à la mort ou à l'exil et, bien que cette tragédie se fut passé depuis plus de cent ans, l'orphelinat « Saint Michael » semblait encore en subir les conséquences. En réalité, les vivres ne manquaient plus dans le pays, cependant, les Sœurs et Frères qui s'occupaient de l'endroit, gardaient les meilleures denrées pour les plus hauts représentants de l'ordre avec qui ils avaient quelques accointances pour le bien de tous, sauf des orphelins.
Michael Davies venait miraculeusement de fêter son dixième anniversaire. « Miraculeusement », car il n'était pas rare que les orphelins que la Capitale récupérait, mouraient bien vite de faim, de froid ou tout simplement de maltraitance, avant de rejoindre leurs homologues défunts dans le petit cimetière derrière l'énorme bâtisse sombre.
La nourriture principale se composait essentiellement de gruau que, même sans saveur, les enfants dévoraient avidement à chaque repas.
Michael connut son meilleur ami Timothy grâce aux binômes que les Sœurs composaient pour que tous les enfants de l'établissement se rendent utiles à l'établissement lui-même. Depuis qu'ils furent en âge de marcher, les deux garçons avaient pour corvée de nettoyer la bibliothèque de l'orphelinat. Personne n'y allait jamais, car aucun des jeunes ne savait lire. Mais, à force d'errer dans cette salle géante, Michael apprit à lire tout seul, puis enseigna sa technique à Timothy. Les livres devinrent alors pour eux un moyen d'évasion, loin de cet endroit austère.
Mick et Tim, car tels étaient leurs surnoms entre eux, survivaient à « Saint Michael » autant qu'ils le purent. Les orphelins, que des garçons, n'avaient pourtant pas tous l'étoffe de survivants. Certains mouraient, d'autre pleuraient tous les soirs, tournaient en rond dans le dortoir en criant famine, et un petit garçon nouveau dans l'orphelinat, chantait des ballades pendant la nuit quand tout le monde dormait. Une de ses énièmes nuits, Mick fixait le plafond et Tim, à côté de lui, lui murmurait des phrases par-dessus la mélodie du nouvel arrivant.
Right proudly high in Dublin town,
Hung they out a flag of war.
'Twas better to die 'neath an Irish sky,
Than at Suvla or Sud el Bar.
And from the plains of Royal Meath,
Strong men came hurrying through,
While Brittania's Huns with their long-range guns,
Sailed in through the foggy dew.
- Mick ? répéta Tim, car son ami n'avait pas entendu. Tu es d'accord ?
- Pour quoi ?
Mick se concentrait souvent sur les chansons de petit garçon, des berceuses irlandaises la plupart du temps et bien que très tristes, elles éveillaient chez Mick comme une joie profondément enfouie en lui. Tim se rapprocha pour lui expliquer, de nouveau.
- Pour partir d'ici !
- Quoi ? Pour aller où ?
- Peu importe ! À Dublin, par exemple, pas besoin de quitter la ville !
Mick écouta la fin de la chanson avec attention où les mots, et les phrases, semblaient presque soutenir le désir de Tim.
But to and fro,
In my dreams I go,
And I kneel and pray for you.
For slavery fled,
Oh, glorious dead,
When you fell in the foggy dew.
- Aucun de nous deux ne connaissons Dublin, Tim. Nous serions à la rue et sans argent, qu'est-ce que tu crois qu'il nous arrivera ?
- Rien de pire qu'ici ! Mick, tu sais très bien que personne n'est jamais adopté, et pourtant, as-tu déjà vu des adolescents à l'orphelinat ? Non ! Et tu sais pourquoi ?
- Oui... Tout le monde connaît la légende. Le Dr Hess vient chercher les jeunes garçons pour les emmener en Angleterre et personne ne les revoit jamais plus.
Tout à fait vrai, à ce propos, cette fameuse « Dr Hess » qui hantait les cauchemars des orphelins n'était nul autre qu'une riche Anglaise, qui venait d'acheter, quelques années plus tôt, l'orphelinat tout en aidant financièrement à le faire tourner. Même si tout l'argent partait dans d'autres trafiques, les plus grands garçons, âgés de plus de douze ans, s'en allaient en effet à Londres, à « Kendricks Academy », plus exactement pour parfaire leurs éducations. Quant à la nature même de leur futur, personne ne se doutait, ni ne se doutera jamais, de ce qui leur arrivait. Comme son ami réfléchissait à sa plaidoirie, Tim reprit sa complainte pour qu'il fasse le bon choix, celui que lui-même désirait avidement.
- Je t'en prie, Mick, tu sais que nous devons partir ! Ou tu préfères encore te faire enfermer dans le cellier à charbon par Frère Ketch ?
Mick tressaillit. Il n'était, ainsi, pas rare que les petits orphelins se faisaient régulièrement enfermer dans cette fameuse pièce exiguë aux murs noirs de suie, pour quelques raisons souvent injustifiées. Parfois, par simple plaisir de la part des dirigeants ou parce qu'un garçon avait eu l'audace, l'impolitesse même, de dire qu'il mourrait de faim. Autre les flagellations dont les « petits garnements » furent infligés, le cellier de charbon n'en était pas moins la terreur de chacun d'eux. Et Mick, pour aucune raison recevable, en avait souvent occupé la pièce en question. Au plus profond de lui-même, là où les chansons du petit nouveau lui éveillaient des sentiments inconnus, Mick savait que Tim avait raison. Le temps de partir arriva...
…
À suivre...
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Informations :
- Je suis resté fidèle, la plupart du temps, aux histoires des personnages que SPN leur ont attribué. J'ai peut-être modifié quelques petites choses, mais tout en restant dans l'identité du personnage en question.
- Concernant la date de naissance de Castiel, puisque, étant un Ange, il n'en a pas à proprement parlé dans la série, j'ai choisi celle de Jimmy Novak. Que l'on peut voir sur son permis de conduire dans un des épisodes de SPN.
- Voici les références littéraires et musicales :
« Quelques minutes après minuit » de Patrick Ness : pour l'histoire de Dean Winchester. Le dialogue de John à son fils au sujet de la colère est presque mot pour mot celle du livre en question.
« Oliver Twist » de Charles Dickens : pour la partie concernant Mick. Ce n'était pas mon idée, en réalité. Mais, durant la JIB8, Adam Fergus (l'acteur qui interprète Mick) a comparé son personnage à celui d'Oliver Twist. Donc, après avoir vu le film et lu le livre, je me suis fortement inspirée de l'histoire de Dickens pour cette fanfiction.
« Sinead O'Connor & The Chieftains - The Foggy Dew » : la ballade Irlandaise que chante le petit garçon (sans nom) dans l'orphelinat. Vous pouvez l'écouter sur YouTube, c'est une magnifique musique. (Découverte, sans surprise et par logique, sur la station « Irish Pub Radio ».)
- Concernant le titre de mon histoire, en réalité, je n'ai pas réussi à savoir comment l'appeler ! Au départ, elle se nommait « Destin » puis « Destiné », j'ai même pensé à « Carry on my wayward son », à un moment... Mais rien ne me semblait bien probant. Alors je ne l'ai pas nommé, à proprement parler, tout comme les chapitres... Pire, je n'ai même pas créé de « couverture » pour promouvoir l'histoire sur mon Twitter...
Voilà...
À jeudi prochain pour la suite !
Si vous le voulez...