Salut ! Désolée du retard, j'ai très peu de temps perso pour écrire mais ne vous en faites pas, l'histoire avance bien, le projet est toujours en cours ! Bonne lecture à tous ;)
Chapitre 7 : Transfer
Jim était sur le pont principal, attendant le feu vert de Scotty avec beaucoup d'impatience. Les réparations avaient pris une semaine et désormais, ils en voyaient le bout. Son ingénieur en chef lui avait garanti qu'ils pourraient effectuer des tests de réacteurs d'ici la fin d'après-midi, et peut-être relancer les réacteurs le soir. Après ça, leur direction prendrait celle de Filandria. Jim avait déjà demandé à Chekov de leur préparer un itinéraire sûr.
Il pianota sur l'accoudoir de son fauteuil, prenant son mal en patience plus qu'il ne le pouvait. Il changeait de position sur son fauteuil, encore et encore, se levant, faisant les cent pas, s'affalant à nouveau dans son fauteuil. Il n'avait qu'une hâte, lancer à nouveau l'Enterprise et quitter cette maudite nébuleuse. Elle ne faisait que leur porter le mauvais œil et son équipe de recherche se battait entre elle pour la nommer. Ce fichu nuage de poussière spatial aurait leur peau.
Le bruit strident de l'intercom se déclencha et Jim sauta de son fauteuil en appuyant sur le bouton, répondant précipitamment.
_Scotty ! C'est bon ? On peut repartir ?
Il y eut un léger grésillement avant d'entendre une voix.
« Capitaine, il s'agit de Spock. Je vous informe que nous venons de terminer les simulations informatiques. Nous attendons l'accord du Lieutenant Scott. »
Jim jura intérieurement avant de répondre à l'intercom.
_Reçu, Spock. Merci.
Il se rehaussa dans son fauteuil.
Jim se gratta l'arrière du crâne, pensif. Depuis le violent accident, Spock l'évitait. Ou alors s'était lui. Enfin, il ne pensait pas l'éviter volontairement, ou peut-être que Spock ne le faisait pas exprès, mais ils ne s'étaient presque pas parlés en face à face. Ou très peu. Pas assez. Jim se faisait probablement des films, la situation actuelle était tendue et peut-être qu'il y faisait plus attention depuis sa conversation avec Bones.
« Capitaine, on est bon ! »
Jim se précipita sur l'intercom.
_Merci Scotty ! Sulu, c'est bon pour vous ?
_Quand vous voulez, Capitaine !
Jim hocha la tête, s'orientant sur l'intercom.
_Allez-y Scotty.
Quelques secondes plus tard, le système électrique se coupa en moins d'une seconde, le temps d'un battement de cils. Une fois qu'ils avaient basculés sur le système d'énergie principal, Jim ordonna :
_Faites les vérifications. Déflecteurs, communication, moteurs. (Il enclencha à nouveau l'intercom). Scotty ?
« Tout est en ordre Capitaine ! »
Jim se tourna vers son pilote :
_En avant Sulu. Vitesse subluminique.
Sulu s'activa et l'Enterprise bougea. Jim sentait son cœur battre la chamade dans sa poitrine, à la fois excité et tendu. L'Enterprise reprenait son envol.
_Contrôle.
_Tout est en ordre, Capitaine.
Il hocha la tête à l'enseigne qui venait de lui répondre.
_Passez en vitesse supraluminique.
Le vaisseau s'accéléra.
_Monsieur Chekov, quelles sont vos recommandations de vitesse ?
Chekov pianota sur son écran avant de répondre.
_Distorsion 2, Capitaine. Il faudra la réduire d'ici huit jours.
_Maintenons le cap.
Il ouvrit l'intercom pour les Machineries.
_On est bon ?
« On est même très bien ! »
Jim laissa son sourire conquérir son visage.
_Merci Monsieur Scott.
Il bascula l'intercom sur le canal général de l'Enterprise.
_A tout l'équipage, ici le Capitaine Kirk. Comme vous avez pu le constater, le vaisseau a repris sa trajectoire. Tout ça, c'est grâce à vous tous. Vous pouvez vous en féliciter. Nous entamons la route vers Filandria, où nous pourrons profiter d'une permission bien méritée. Soyez fiers de vous. Kirk, terminé.
Il coupa l'intercom et leva la tête sur son équipage de pont, qui se mit à applaudir tout en dévoilant leur joie. Les sourires étaient sur tous les visages. Jim se détendit, souriant et applaudissant également.
_Vous êtes un merveilleux équipage.
_Et nous sommes fiers de servir à vos côtés Capitaine, répondit Uhura en souriant.
Elle fut approuvée par tout l'équipage de pont. Jim était touché par sa réponse. Il la remercia d'un geste, sachant parfaitement que son regard saurait transmettre sa reconnaissance.
Puis les applaudissements cessèrent, et tous retournèrent à leur travail. Jim s'appuya à nouveau contre le dossier de son fauteuil, sentant un immense poids se libérer de la poitrine. Une bonne chose venait d'être faite, et il était certain qu'il pourrait passer de biens meilleures nuits.
Jim suivait de près l'avancée de l'Enterprise à travers la nébuleuse. Il ne pouvait pas prendre de dispositions préventives face aux orages, mais il restait encore beaucoup à faire dans les réparations. Si le principal avait été fait, il restait encore de nombreux systèmes qui étaient à réparer, à vérifier et à remettre en marche.
Il était obligé de consulter tous les rapports d'avaries et de décider quelles réparations suivantes il allait prioriser. Les systèmes de survie de l'Enterprise étaient en bon état de fonctionnement. Mais l'allée botanique, une partie des quartiers à vivre et des foyers avaient été touchés. Des dysfonctionnements électriques principalement, mais Jim ne voulait pas prendre le risque que des problèmes non résolus n'aggravent leur situation.
Ça lui prenait un temps considérable, et beaucoup plus d'énergie qu'il ne l'aurait cru. Il avait repris ses mêmes habitudes, consultant la masse de données en ingurgitant probablement plusieurs litres de café. Quand Spock le rejoignit sur le pont à la fin de son quart, ils échangèrent sur l'état du vaisseau et sur le fonctionnement de la chaîne de propulsion. Tout semblait en ordre et Scotty avait jugé que la surveillance pouvait être un peu plus relâchée. Jim ne trouva donc rien à redire quand Spock pris congé de son service.
Il resta encore un moment après la fin de son quart sur le pont avant de se décider à retourner dans ses quartiers. Pour une fois depuis longtemps, il fit attention à l'heure d'aller dîner, veillant à ne pas oublier un rendez-vous qu'on lui avait donné. Ça allait lui faire du bien, maintenant que sa belle se comportait mieux et qu'elle était à nouveau fonctionnelle.
Jim avait ce sourire niais sur le visage, tant il était soulagé que les choses rentrent doucement dans l'ordre. Ça lui faisait du bien. De si bonnes nouvelles, ça faisait longtemps qu'il n'en avait pas eues. Et puis, ça lui faisait oublier tout ce qui n'allait pas. Il passa la porte, son sourire toujours sur le visage. Jusqu'à ce qu'il rencontre un obstacle juste après, qui montra peu de résistance. Jim eut juste le temps de la rattraper.
_Capitaine !s'exclama Uhura.
_Lieutenant ! Désolé !
Jim la relâcha quand elle fut sur ses pieds.
_Je suis vraiment désolé, je n'ai pas fait attention en sortant…
Il se gratta l'arrière du crâne, gêné. Uhura lui adressa un sourire.
_Rien de grave Capitaine. Je voulais vous proposer d'aller dîner avec nous.
Jim fit une grimace.
_Ah, j'ai un autre engagement pour ce soir. Demain ?
Uhura lui sourit à nouveau.
_Demain.
Ils se dirigèrent tous les deux vers le turbolift. Le silence entre eux ne dura que quelques secondes.
_Vous avez eu une conversation avec Spock récemment ?
Jim fut surpris par la question.
_Sur le pont, il y a… quatre heures peut-être ?
La lieutenant secoua négativement la tête.
_Je pensais plutôt à une discussion privée. Il m'a l'air… soucieux.
Jim sentit un frisson lui parcourir le dos alors que son cœur loupait un battement. De quoi auraient-ils dû parler en privé ?! Spock savait quelque chose sur lui ?! Uhura savait quelque chose ?! Une alarme dans la tête de Jim hurlait : assurément une alerte rouge. Sa peur le fit réagir en employant l'humour.
_A quel moment Spock n'a pas un air soucieux, hein ?
Il essaya de rire à sa blague, mais Uhura était vraiment sérieuse. Elle soupira en détournant la tête alors qu'ils montaient dans le turbolift. Elle aussi, avait un air soucieux maintenant. Jim s'inquiéta à son tour.
_Il y a un problème avec Spock dont je dois être informé ?
Uhura secoua la tête.
_Non, ce n'est rien. Je me fais sûrement des idées.
Le semblant de sourire qu'elle lui adressa ne le convaincu pas une seconde, mais il laissa couler. S'il y avait vraiment quelque chose, Spock viendrait le lui dire. Pourvu que toute cette histoire n'ait rien à voir avec ce que Jim ressentait pour Spock. Enfin, ressentir était un grand mot… non ? Y'avait juste un truc.
_Bonne soirée Capitaine ! A demain !
Uhura sortit du turbolift en lui faisant un signe. Jim la salua.
_Bonne soirée Uhura !
Et les portes se refermèrent, laissant Jim légèrement perturbé par la conversation.
Il continua son chemin jusqu'au mess des officiers. Kéra l'attendait près de la porte et son visage s'éclaira quand elle le repéra.
_Capitaine ! Les autres viennent tout juste de rentrer.
Jim lui adressa un grand sourire.
_Désolé pour l'attente. Vous allez bien ?
Elle hocha la tête.
_Autant que vous semblez l'être !
La bajoran se mit à rougir alors qu'ils allaient prendre leurs plateaux. Kéra passa devant, les orientant vers la table où Caleb et Hedik s'étaient installés. Carol était également présente à leur table et plusieurs enseignes se joignirent à leur suite. Jim se retrouva encerclé par des membres de son équipage qu'il avait peu vu, ou avec qui il avait effectué des réparations du vaisseau, dont Yoren et Shura.
L'ambiance à la table était joyeuse. Chaleureuse, drôle, vraiment agréable. Jim était assis entre Caleb, qui essayait encore de draguer Carol, et Yoren, qui vantait les mérites de Scotty, exploits véritables où il ne manquait pas de rajouter des anecdotes plus qu'hilarantes. Shura parla de sa sœur jumelle, qui avait un caractère très similaire à celui de Scotty. Puis la conversation dériva sur la famille, les amis, ce qu'ils allaient faire durant leur permission. Si Jim n'était pas personnellement à l'aise avec ces sujets, les récits de son équipage lui firent oublier cet inconfort.
Il enregistra ce moment dans sa mémoire. Parce que le sentiment qu'il ressentait lui réchauffait le cœur bien plus qu'il ne l'aurait cru. Il était heureux, vraiment heureux que son équipage puisse s'exprimer aussi librement en sa présence alors qu'il était leur Capitaine. Certaines anecdotes étaient personnelles et pouvaient être compromettantes, mais tous semblaient l'avoir oublié, le considérant comme un égal à la table.
Ce sentiment d'appartenance qu'il ressentait, il le chérissait plus que tout. Ça lui rappelait aussi pourquoi il avait intégré Starfleet, et ce qui lui avait plu dans l'idée de faire partie d'un équipage. Cet esprit de camaraderie, d'entraide, de complicité et d'unité. Tous debout face à l'inconnu de l'espace, prêt à découvrir les merveilles de l'univers tous ensemble. Sa soirée s'étendit aux quartiers de détente, toujours en compagnie des mêmes personnes.
Ce soir-là, quand Jim ferma les yeux, il se dit qu'il venait de passer l'une des meilleures soirées de sa vie.
Jim regardait les clichés qui défilaient avec beaucoup d'attention. L'Enterprise continuait sa lente avancée à travers la nébuleuse. Il ne voulait pas avancer leur vitesse pour préserver leur moteur Warp et il prêtait une très grande attention aux clichés des débris toujours présents. L'identification signalait de vieilles épaves rémiennes et romuliennes, de petits vaisseaux dont certains modèles ne possédaient même pas d'armement.
Les morceaux de débris qu'ils rencontraient étaient de plus en plus éparpillés, signifiant qu'ils étaient plus anciens encore. Cette nouvelle était plus que rassurante. Ça limitait les chances qu'ils se fassent attaquer et l'Enterprise n'avait clairement pas besoin d'entrer en combat spatial. D'après Scotty, les déflecteurs étaient restaurés à 98% de leur efficacité. Ils avaient connus largement pire, mais leur intégrité était fragilisée et avec de l'armement lourd, ça ferait mal.
_Capitaine, un appel extérieur pour vous.
Jim sortit de ses pensées en fronçant les sourcils. Il fit pivoter son fauteuil vers Uhura, qui expliqua à la suite :
_L'Amiral Lorne McLaren.
Jim fut encore plus surpris. Il se leva de son fauteuil.
_Passez-le moi dans mes quartiers. Dites-lui que j'arrive.
Il entra dans le turbolift, curieux de connaître le motif de l'appel. Jim connaissait assez bien Lorne. Il avait fait sa rencontre grâce au Capitaine Pike, tous les deux avaient fait leurs classes ensemble. Lorne McLaren était quelqu'un de respectable avec beaucoup d'humour. Jim avait bu plus d'un verre avec lui, et il faisait partie des rares hauts-gradés avec qui il s'entendait bien.
Dès qu'il fut dans ses quartiers, il récupéra l'appel. Aussitôt, le visage de Lorne apparut à l'écran. Depuis l'enterrement de Pike, la dernière fois qu'il l'avait vu, ses cheveux avaient grisé.
_Jim ! Je suis content de te revoir !
Le concerné lui adressa un grand sourire et le salua de la main.
_Salut Mac ! Moi aussi ! Tes cheveux m'ont l'air d'avoir bien décoloré depuis la dernière fois qu'on s'est vus !
Lorne se pencha en avant et plissa des yeux à l'écran.
_Et toi tu m'as l'air d'avoir perdu quelques cheveux non ?
Jim se passa les mains dans ses cheveux beaucoup top précipitamment. Quand il entendit le rire moqueur de McLaren, il le fusilla du regard.
_Ma crinière t'enterrera.
Il n'avait pas pu s'empêcher de sourire en même temps qu'il le disait. Lorne se mit à rire à nouveau.
_Il faut vraiment qu'on se revoit quand tu reviendras. Je suis encore posté à la base stellaire 32, mais ça ne sera pas un problème.
Jim hocha la tête.
_Oui. J'ai entendu dire que tu visais le poste de Président. Je suis sûr que tu feras un bon dirigeant.
Lorne lui adressa un sourire.
_Merci. J'ai encore beaucoup de travail pour ça et au moins un mandat ou deux avant de me présenter ! Si un jour tu en as marre de l'exploration, n'hésites pas à me faire signe ! J'aurais bien besoin d'une tête-de-nœuds comme toi pour m'aider. Même si tu n'en donnes pas l'air, tu as un don pour la diplomatie quoique tu en dises ! Sans compter sur ton génie insoupçonnable. Un type comme toi ferait des merveilles dans les hauts rangs de la société.
Jim se gratta la nuque en souriant, gêné. Il détourna la conversation.
_Je suis sûr que tu ne m'appelles pas pour flatter mon égo, ni pour me recruter sur un autre poste. De quoi voulais-tu me parler ?
Lorne se redressa sur son siège mais son air était toujours décontracté. Jim comprit que la conversation restait toujours amicale.
_Eh bien, j'ai entendu dire que le poste de Commander sur ton bâtiment allait prochainement se libérer, donc je voulais te demander une faveur. J'ai quelques bons éléments qui mériteraient vraiment une promotion en tant que commandant en second, et je voudrais qu-
Jim l'arrêta d'un geste.
_Attends, va moins vite. Le poste de Commander ?
Le blond sentit un frisson parcourir son corps alors qu'il se sentait bouillonner. Lorne ne remarqua pas son changement d'attitude.
_Oui, sur l'Enterprise. J'ai une amie au département des transferts, tu sais, Pat, la jolie blonde qui me fout les jetons mais super sympa elle m'a dit qu'elle avait reçu la demande de ton Commander… euh… Spock, c'est ça ? Pat me rend un service pour mes gars, comme ça je suis prévenu un peu en avance.
Jim sentit la chaleur envahir son corps tant il était en colère. Il fit un effort considérable pour paraître calme.
_Oui, je vois très bien. Tu as une liste de noms que tu veux que j'examine ?
Le sourire de McLaren était si sincère et soulagé que Jim s'en voulait presque de réagir de cette façon.
_Oui, ce serait génial. Tu n'as pas d'impératifs, ne t'en fais pas.
Jim hocha la tête.
_Tu as un nom précis que tu veux que j'examine plus attentivement ?
McLaren lui sourit en répondant.
_A vrai dire, oui. Edward Roddenberry. Il a servi sous mes ordres sur l'USS Liberty. Il est actuellement Lieutenant-chef sur l'USS Excalibur.
Jim fit de gros efforts pour rester concentré sur la conversation.
_C'est un beau bâtiment, l'Excalibur. Une classe Constitution. Il est sûr de vouloir partir ?
_Il est sous les ordres du Capitaine Sol Khârn.
Jim fit une grimace. Il avait eu le malheur de rencontrer ce Capitaine et de lui avoir parlé. Après ça, il était certain de le détester.
_Envoie-moi ta liste, je l'examinerai.
Lorne lui adressa un regard reconnaissant.
_Merci beaucoup Jim.
Il hocha la tête.
_Je vais devoir y aller Mac. A une prochaine.
_A une prochaine, Jim. Fais attention à toi.
Et la communication se coupa.
Jim laissa sa fureur remonter. Spock avait demandé un transfert de poste et il avait fallu que ça soit quelqu'un d'autre qui le lui apprenne. Spock avait décidé de partir. Il s'en allait. Pas une seule fois il en avait fait l'allusion, ni ne l'avait averti de la démission de son poste.
Il alla s'assoir sur une chaise, sentant son sang pulser à ses tempes. Il voyait rouge. Plus que rouge. Encore une fois, Spock l'avait court-circuité, il était passé outre la chaîne de commandement. Il l'avait complètement outrepassé dans ses fonctions. Ce que Jim ressentait en cet instant, mis à part sa colère, c'était la douleur. Ça lui faisait mal, d'apprendre qu'il partait. D'apprendre qu'il avait pris cette décision sans lui en parler avant. Ça lui faisait mal, de l'apprendre comme ça.
Il avait donc si peu d'estime aux yeux de Spock, finalement ? Jim s'était cru, au-delà d'être son Capitaine, son ami. Il pensait qu'il se serait confié à lui. Jim aurait mal pris la nouvelle, assurément, mais il aurait été moins blessé que de l'apprendre de quelqu'un d'autre. Les gens de l'extérieur étaient plus au courant de ce qu'il se passait dans ses rangs alors qu'il était présent. A quel moment c'était une situation normale ?!
Jim se prit la tête dans les mains, cherchant à calmer sa respiration. Ses mains tremblaient, son sang pulsait et il avait chaud tant la réaction avait été forte. Et alors que l'idée du départ de Spock, de son initiative, faisait doucement son chemin dans son esprit, avec toutes les conséquences qui allaient de pair, il sentit son cœur se serrer.
Il ne pouvait pas vivre de plus grand rejet que ça. Encore. A croire qu'il n'était bon qu'à faire fuir les personnes à qui il tenait vraiment. Il devait être un bon raté pour ne pas savoir pour quelle raison il les faisait fuir. Entre Tony, qui était parti avec le programme de sa vie et Spock, qui quittait son commandement…
Jim eut le sentiment de n'être bon qu'à être jeté. Qu'est-ce qu'il avait fait à Spock pour qu'il le rejette autant de cette façon ? Qu'est-ce qu'il avait fait de travers ? Il avait enfreint la Première Directive une fois de trop ? Il avait touché son bras une fois de trop ? Il avait mis une fois de trop son équipage en danger ?...
Il était un trop mauvais Capitaine ? Cette pensée le plomba. Il aurait aimé que Pike soit toujours en vie. Il aurait préféré qu'il vive, plutôt que lui. Pike n'aurait jamais vécu ce genre de situation à sa place. Il aurait su tout gérer d'une autre façon. L'Enterprise n'aurait subi aucuns dégâts, Spock lui serait resté assez fidèle pour ne pas démissionner de son poste.
Il ferma les yeux. Il remerciait soudainement Mac de lui avoir fait toutes ces flatteries. Jim devait se ressaisir. Il valait mieux que ça. Il était capable de diriger, peut-être pas à la perfection, mais il en était capable. Il devait avoir une meilleure estime de lui.
Un son provenant de son PADD lui indiqua qu'il avait reçu les informations que McLaren lui envoyait. La liste. Celle pour remplacer Spock. Celle qu'il devrait consulter pour combler le manque important d'un poste à son bord. Jim serra les dents. Il regarderait cette liste. Il avait dit à Mac qu'il le ferait et il allait tenir sa parole. Si Spock voulait partir… alors qu'il parte.
Jim pouvait se reposer sur son équipage, à défaut de se reposer sur son premier officier. Il saurait être un bon Capitaine sans lui. Si Spock voulait agir de cette façon avec lui, alors Jim ferait pareil. Il resterait professionnel, plus que Spock ne l'aurait été dans sa manœuvre.
Il attrapa son PADD et s'installa à sa table, ouvrant le premier fichier. Celui du dossier d'Edward Roddenberry, le protégé de Mac. Malgré l'attention et tout le sérieux qu'il portait à la lecture du dossier, Jim était toujours animé par sa colère, et cette douleur d'avoir été trahi. Il essaya de la terrer, se concentrant sur son travail. Il devait examiner chaque proposition, comparant les compétences de chacun, l'expérience vécue et les commentaires de leurs supérieurs.
Il s'était mis dans la peau d'un recruteur et si le poste allait prochainement être vaquant, il devait élargir sa liste de choix. Jim consulta donc la base de données de Starfleet, retint quelques éléments qu'il jugea compétents, puis il passa au personnel qui méritait une promotion au sein de son bâtiment : de toutes les personnes à son bord, en toute objectivité, Bones et Sulu étaient les meilleurs candidats pour obtenir une promotion et devenir Premier Officier.
Seulement, Jim doutait de la volonté de Bones d'être promu, encore moins de cette façon. Mais pour Sulu… Jim voyait un véritable potentiel. Sulu serait capable de monter les échelons, de diriger son propre vaisseau et qui sait, continuer vers un avenir encore plus prometteur. Il avait à de nombreuses reprises été témoin des capacités de Sulu à commander, à savoir se montrer ferme et à prendre des décisions difficiles en toute objectivité. Il avait de bonnes capacités de leader, ça ne faisait aucun doute.
Jim sélectionna alors une courte liste de potentiels remplaçants et attendit devant l'écran. Sa rancune et la colère qu'il ressentait envers Spock le poussait à lui balancer cette liste à la figure, accompagnée de paroles peu glorieuses. Sa peine le poussait à demander des explications à Spock, d'aller le trouver en ingénierie et de lui demander ses raisons de partir.
L'espace d'un instant, il crut que McLaren s'était peut-être trompé. Que Pat avait dû mal comprendre, que l'information était fausse. Une rapide vérification dans la base de données de la hiérarchie réduisit cet espoir. La requête était présente au nom de Spock. Aucun doute possible. Jim sut alors qu'il ne pourrait pas le voir en face. Parce que s'il le voyait, il sortirait de ses gonds.
Il regarda l'heure. Son quart était terminé depuis un moment désormais. Il avait passé le plus clair de son temps à regarder les dossiers des officiers de Starfleet. Organiser un tel remplacement allait lui prendre du temps et ça allait être un sacré travail qu'il allait devoir mener pour s'habituer à fonctionner avec quelqu'un d'autre. Dire qu'il avait mis des mois à se coordonner avec Spock…
Jim laissa son PADD sur sa table et se dirigea dans la salle de bains, ressentant un immense besoin de prendre une douche. Il avait besoin de se changer les idées, de se détendre, de reprendre pied. Plus il y pensait et plus l'acte de Spock le blessait. C'était comme se faire poignarder avec une extrême lenteur et de ressentir la lame s'enfoncer douloureusement.
Il n'arrivait pas à accepter le fait que Spock ne lui ait rien dit. Qu'il ait agi dans son dos, qu'il l'apprenne par quelqu'un d'autre. Qui d'autre encore était au courant ? Il sentit cette pression sur son cœur, oppressante. Spock ne le respectait peut-être pas assez. Après tout, il était un vulcain et Jim avait tout pour leur déplaire. Imprévisible, irréfléchi, instinctif,…
Il sortit de sa douche et regarda son reflet dans le miroir avant de détourner la tête. Il n'avait pas envie de faire face à cet air pitoyable qu'il avait sur le visage. Il se sécha et passa sa serviette autour de ses hanches, le temps de retourner à sa chambre et de se laisser tomber sur son lit. Le regard fixé sur le plafond blanc immaculé, il en venait à s'inquiéter pour la suite. Il ne savait pas quoi faire, il ne savait pas comment réagir.
Au moins, sa colère était retombée. C'était mieux comme ça. Il n'était pas bon, pour gérer sa colère. Il était plus doué pour cacher sa peine. Ou pas. Il soupira et se força à se lever et s'habiller. Il était en train d'enfiler un t-shirt gris de Starfleet quand l'intercom de sa porte sonna. Jim ravala sa salive en terminant de s'habiller, son cœur s'accélérant alors qu'il appréhendait un face à face avec Spock. Il ouvrit la porte.
_Capitaine !
Jim retint un soupir de soulagement quand la porte s'ouvrit sur Uhura.
_Lieutenant ! Que puis-je pour vous ?
Uhura fronça les sourcils.
_Je venais vous chercher pour dîner. Vous vous souvenez ?
Jim mit plusieurs secondes avant de se rappeler de leur conversation de la veille. Et de ce que Uhura lui avait dit. Ce souvenir lui serra le cœur. Elle devait savoir. Les mots sortirent de sa bouche plus vite qu'il ne l'aurait cru.
_Vous étiez au courant.
Le ton amer aussi, il n'avait pas pu le retenir. Uhura haussa un sourcil.
_Au courant de ?
Jim se sentit bête, mais il était lancé. Le cœur serré, il répondit sur un ton neutre :
_De la mutation de Spock. Vous me parliez de ça, hier, n'est-ce pas ?
L'air choqué sur le visage d'Uhura fut authentique. Elle recula d'un pas.
_Comment ça, la mutation de Spock ?! Je n'ai jamais entendu parler de ça.
Jim détourna le regard un instant. Il ne savait pas s'il devait être soulagé ou surpris qu'Uhura ne le sache pas. Puis il la regarda à nouveau. Elle semblait blessée. Ça lui fit de la peine.
_Je suis désolé de vous l'apprendre. Je pensais qu'à vous au moins, il l'aurait dit…
Uhura secoua la tête.
_Non, il ne m'a rien dit. Comment vous l'avez su si… ah. L'appel de l'Amiral ?
Il hocha la tête. Uhura lui lança un regard compatissant. Jim prit une profonde inspiration.
_Vous pouvez garder l'information pour vous, s'il vous plait ? J'aimerai en discuter avec lui avant que l'équipage ne l'apprenne. J'aimerai… comprendre.
Même si la vérité risquait d'être douloureuse. Il se mordit la lèvre, se rendant compte qu'il n'avait pas bien réussi à rester neutre.
_Aucun problème, je comprends. Je suppose que vous ne venez pas diner.
Jim se força à sourire.
_Une autre fois, promis. J'ai encore pas mal de travail.
Elle hocha la tête, cet air triste présent sur son visage. Il l'avait blessée malgré lui. Elle le salua et il fit de même avant de fermer la porte.
Jim se sentait mal. Il ne savait pas comment réagir face à ce qu'il venait d'apprendre. A sa connaissance, les personnes dont Spock était le plus proche étaient Uhura et lui. Du moins, c'est ce qu'il avait cru jusque-là. Il ne connaissait pas Spock autant qu'il le croyait, visiblement.
Afin de se changer les idées, Jim sortit de l'un de ses placards une bouteille de bourbon qu'il avait gardé de côté. Il l'entama et s'en versa un verre avant de s'installer à sa table, se réservant la vue sur l'espace.
Il resta plongé dans ses pensées un long moment. Si bien qu'il ne vit pas le temps passer. Quand l'intercom de sa porte sonna, Jim crut que c'était son imagination. Ça, ou peut-être le fait que son esprit soit ralenti au fur et à mesure des verres qu'il avait bu. La sonnerie se fit insistante, alors il se força à se lever, se fichant d'être aperçu en étant alcoolisé. Après tout, il n'était pas en train de travailler. Il avait aussi le droit de se détendre.
La porte s'ouvrit sur Uhura, qui était revenue. Il fronça les sourcils.
_Désolée de vous déranger mais… Je pense que vous devriez lire ça.
Elle lui tendit un livre. Ancien mais en bon état, couverture rigide avec une reliure en cuir. L'inscription sur la couverture était indéchiffrable, mais Jim reconnaissait les symboles vulcains. Uhura reprit :
_J'ai marqué les pages que vous devez impérativement lire. Je m'étais procuré ce livre pour mieux comprendre la culture de Spock, mais je pense qu'il vous sera plus utile.
Jim regarda l'ouvrage. Il releva la tête vers Uhura en fronçant les sourcils.
_Je ne comprends pas.
Uhura posa une main sur son bras.
_Si vous tenez à comprendre de quoi je parlais hier, lisez. Ça vous aidera.
Jim ne comprit toujours pas, mais elle avait su éveiller sa curiosité.
_D'accord. J'y jetterai un œil.
Elle lui adressa un sourire.
_Bonne nuit Capitaine.
_Bonne nuit Uhura.
Elle tourna immédiatement les talons et Jim resta dans l'encadrement de la porte encore un moment, pensif.
Il retourna à sa table, examinant le livre. L'odeur des vieilles pages était assez révélatrice sur la datation de l'écrit, mais il semblait rare. Jim adorait les livres en papier, il prenait beaucoup plus de plaisir à tourner les pages lors de sa lecture qu'à faire défiler les mots sur un écran. Lorsqu'il l'ouvrit, il remarqua les marques-pages insérés à l'intérieur par Uhura. Curieux de comprendre, il commença sa lecture sur un chapitre intitulé : « Katra ».
Jim referma le livre et le posa sur sa table de chevet, se passant les mains dans les cheveux. Il resta là, un moment, à fixer le mur en face de son lit, le regard vide, perdu. Des tas de questions se bousculaient dans sa tête, des tonnes d'informations étaient enregistrées dans sa mémoire sans qu'il ne sache quoi en faire.
Il se leva pour aller boire de l'eau, secoué parce qu'il avait lu. En une nuit, il en avait appris plus sur les us et coutumes des vulcains qu'après tout ce temps passé aux côtés de Spock. Il avait lu le livre entier. Parce qu'il voulait être sûr de bien comprendre ce que Uhura sous-entendait en ayant marqué des pages spécifiques, et que cette idée, l'idée qu'elle ait raison, ça le rendait incapable de penser à autre chose.
Et puis, ce qu'il avait lu sur cette histoire de katra, de sensibilité télépathique, sur ce qu'ils appelaient « baiser » chez eux… Bon sang. Jim était incapable de donner un ordre d'idée sur le nombre de fois où il avait touché les mains de Spock. Il y avait cette fois où il avait tiré Spock par la main pour le sortir d'un gouffre, cette fois où il s'était accroché à lui parce qu'il s'était blessé à la jambe, cette fois où il avait caressé sa main quand il le consolait…
Jim sentit le rouge monter et colorer ses joues et ses oreilles. Il avait caressé la main de Spock. Ses doigts. Bon Dieu de merde ! Bordel de merde ! Il jura plus d'un million de fois dans sa tête en s'agrippant les cheveux. C'était là que les choses avaient commencé à devenir bizarres entre eux ! Cette foutue fois où il avait craqué devant Spock ! Il avait touché sa main, ses doigts,… Nom de Dieu c'est ce contact qui l'avait fait fuir ! Spock avait simplement tenté de le réconforter et lui…lui il l'avait…
Paniqué, Jim faisait les cents pas dans ses quartiers, jurant encore mais à voix haute alors qu'il réalisait l'écart de comportement encore plus énorme qu'il avait eu avec Spock. Il avait merdé. En long, en large et en travers. Il attrapa son PADD et lança une communication interne, droit vers le pont médical. Le visage de Bones apparut en écran projeté dans son salon.
_Jim ? De quoi-
_Bones, il faut que tu viennes maintenant ! Dans mes quartiers ! Urgence !
A l'écran, Bones fronça les sourcils et se retourna pour vérifier que Jim n'avait alerté personne en criant, mais il n'y avait personne. Jim insista alors.
_J'ai harcelé sexuellement Spock.
Bones s'approcha d'un seul coup de l'écran, les yeux grands ouverts.
_Tu as QUOI ?!
Jim était trop paniqué pour trouver amusante la tête plus que choquée de Bones en projection holograpghique. Ce dernier se leva de sa chaise.
_J'arrive.
La communication se rompit.
Jim se passa les mains dans les cheveux, tirant à moitié dessus. C'était pour ça que Spock prenait autant de distance avec lui ! Et en additionnant ces gestes, il y avait la façon dont il lui parlait, il y avait toutes ces fois où il le touchait de manière informelle, toutes ces fois où il le cherchait… Si Spock l'avait remarqué, nul doute qu'il pouvait penser que c'était du harcèlement et qu'il veuille partir sans lui en parler.
Il entendit Bones frapper à sa porte avant de composer lui-même le code d'urgence pour entrer dans ses quartiers. Il déboula dans le salon équipé de son tricordeur et de sa trousse de secours. Bones arriva en lui fichant presque l'appareil dans les yeux.
_Tu as ramené ton tricordeur ?! Sérieusement ?!
_Vu ce que tu viens de me dire, je m'inquiète plus que jamais pour ta santé mentale !
Bones insista en lui collant le tricordeur encore un moment. Quand il lut les résultats de l'appareil, il poussa un soupir de soulagement.
_Dieu merci, tu es saoul.
Jim lui lança un regard noir.
_J'étais ivre hier. J'ai décuvé. Bones, je suis sérieux.
Bones le scruta du regard.
_Eh bah, vu ta tête, désolé de ne pas te prendre au sérieux. Et tu empestes l'alcool.
Le médecin lui indiqua la salle de bains et Jim s'y rendit pour attester des dires de Bones. Bon. A force de se tirer les cheveux furieusement, il ressemblait plus à un fou tout droit sorti d'un asile. Les cernes n'aidaient pas. Il s'arrangea les cheveux et rejoignit Bones.
_Laisse-moi t'expliquer.
Il récupéra le livre qu'Uhura lui avait prêté et le tendit à Bones. Il commença ensuite son récit, à partir de l'appel de l'amiral McLaren.
Son récit lui prit un certain temps et Bones ne l'interrompit que pour avoir plus de précisions. Au fur et à mesure qu'il racontait, Jim passa par la colère, la douleur, la tristesse, la panique. Il était paniqué à l'idée d'avoir blessé Spock en agissant comme il l'avait fait. Peut-être que Spock avait déposé une plainte contre lui et qu'il ne serait mis au courant que lorsque Spock aurait débarqué. Il se prit à nouveau la tête dans les mains.
_Je sais pas quoi faire, Bones. Si je lui dis de rester, ça pourrait être pris de travers. Et si je le laisse partir, ça pourrait être mal pris également.
Bones feuilletait les pages du livre.
_Spock est logique. Droit, ferme, et avec un fort caractère. Il ne se laisserait pas marcher dessus même si tu étais son Capitaine et surtout si tu lui fais des avances sexuelles. Le connaissant, il t'aurait recalé plus fermement si ça l'avait dérangé. Il doit savoir que tu ne connaissais pas la signification de ce… « baiser vulcain » comme ils disent. Quoiqu'avec les mains, c'est super bizarre. Enfin, tout ça pour dire que cette histoire de harcèlement te monte à la tête pour rien. Tu as lu le passage sur… (il feuilleta les pages) voilà. Sur le mot « Tihila » ?
Jim se pencha au-dessus de l'épaule du médecin pour comprendre.
_J'ai lu tout le livre, Bones. Ça veut dire « ami, frère, amant ». Super rare comme lien.
Bones se tourna vers lui.
_Et dans tout ce qu'il y a dans ce livre, c'est le passage du baiser vulcain que tu retiens et pas celui-ci ?! Bon sang Jim, faut vraiment que tu me dises qui a dit que tu étais un génie, que je lui dise à quel point il s'est foiré !
Jim ne releva pas la pique. Il relut les premières lignes par-dessus l'épaule de Bones. Ça décrivait très bien ce qu'il ressentait en présence de Spock. Il n'y avait pas accordé plus d'importance parce que c'était quelque chose de vulcain, que Jim était humain et qu'il n'avait aucune capacité « télépathique » ou quoique ce soit. Et puis ça en revenait presque de la légende vulcaine, cette histoire !
_Bones, c'est extrêmement rare et je suis humain !
Le médecin secoua le livre dans sa main.
_Je ne vois rien qui parle de race dedans. Moi je lis « katra ». C'est comme l'âme, non ? Ou l'esprit ? J'ai pas lu ce qu'il y a marqué mais en tout cas ça n'a pas l'air d'être une histoire de biologie. Et aux dernières nouvelles, nous possédons un esprit.
Jim croisa les bras, dubitatif.
_Parce que tu y crois, à ces histoires de liens invisibles ou d'âmes sœurs ?
Bones haussa les épaules.
_Je serais fou de ne pas y croire avec toutes les bizarreries qu'on voit ! Une main verte géante de l'espace, une autre dimension parallèle, des retours dans le temps, un manoir hant-
_Oui, oui, j'ai saisi ! (Jim se pinça l'arête du nez). Si c'est la cause du départ de Spock… Je ne peux pas laisser faire ça. Dans tous les cas, je ne peux pas le laisser partir.
Bones soupira.
_Tu devrais en discuter avec lui, avant de prendre une décision qui pourrait changer le cours de ta vie.
Jim baissa la tête. La pensée que Spock ne lui ait rien dit du tout, qu'il l'ait tenu à l'écart… ça le rendait triste. Vraiment triste.
_Si c'est ça, Spock ne me le dira jamais.
_Même si tu lui poses la question ? Après tout, un vulcain ne ment jamais non ?
Jim eut un faible sourire en entendant sa dernière phrase.
_Les vulcains possèdent l'art de détourner les questions sans y répondre. Je veux être sûr que ça soit ça, avant de lui parler. J'ai… j'ai besoin de vérifier avant de lui faire face.
Bones eut à son tour un air triste sur son visage.
_Alors… tu serais prêt à faire ce que je pense pour lui ? Quitter l'Enterprise ?
Jim tourna la tête vers la vue qu'il avait de l'espace. Il ne se lasserait jamais de voir ce paysage. De s'émerveiller devant l'immensité sombre à l'extérieur du vaisseau. Il tourna à nouveau la tête vers Bones.
_Je crois que je lui dois au moins ça.
Il ramena un autre verre qu'il posa devant Bones et reprit le sien, y versant ce bourbon qu'il avait entamé la veille. Ils trinquèrent et dégustèrent leur verre dans le plus grand des silences.
Jim se tenait devant l'écran, hésitant encore à lancer l'appel. Après son verre avec Bones, il avait décidé de se ressaisir et de prendre sa part de responsabilités. Il devait avant tout déterminer de quoi il s'agissait. Il s'était lavé et habillé et il avait déjeuné avec Bones à l'infirmerie, discutant des autres blessés et des ragots. Puis il avait repris son quart, était resté quelque temps sur le pont et il était retourné dans ses quartiers. Et là… là il hésitait.
Il appuya sur le contact pour lancer la communication. Jim ne savait pas s'il allait déranger ou non, mais il savait que son interlocuteur donnerait rapidement de ses nouvelles. Après quelques secondes d'attente, le visage familier apparut à l'écran.
_Jim ! Quel plaisir de vous voir !
Jim afficha un grand sourire, sincère.
_Plaisir partagé, Ambassadeur Spock. J'espère que vous vous portez bien.
Les rides sur le visage de Spock formèrent presque un sourire. Même les traits de l'âge allaient bien à Spock.
_Je me porte bien. La Nouvelle Vulcain demande encore beaucoup de mon temps, mais c'est toujours un plaisir de discuter avec vous. Comment ça se passe de votre côté ?
Jim eut un faible sourire.
_Disons que ça pourrait aller mieux. Je vous appelle en quelque sorte à ce sujet.
Spock haussa un sourcil. Jim se gratta la nuque, hésitant sur la manière de se lancer.
_Ce que j'ai à vous demander est assez… personnel.
Il voyait l'inquiétude sur le visage de l'Ambassadeur.
_Je ne pourrais pas répondre au nom de Spock.
Jim secoua la tête.
_C'est votre expérience, que je souhaite avoir.
Spock Prime hocha la tête. Jim se lança.
_Quelle était votre relation avec votre Jim Kirk ?
L'Ambassadeur afficha un tic nerveux. Jim connaissait bien ce tic.
_Nous entretenions une relation de Capitaine à Commander.
Jim secoua la tête.
_ Je ne parlais pas de ce genre de relation. Le terme exact serait « t'hi'la » ou « t'hy'la » ?
Spock hésita avant de répondre. Jim sentit son cœur se serrer. Il sut avant même que Spock ne lui dise quoique ce soit que ses doutes étaient fondés.
_C'est « t'hy'la ». Vous n'en avez pas discuté avec Spock ?
Jim ne put s'empêcher de sourire. Il reconnaissait là cet art de dévier les questions. Il avait appris à jouer au même jeu.
_L'avez-vous fait ?
Il pouvait voir l'air songeur de Spock.
_Nous avons pu rester professionnels et nos routes ont fini par diverger et… se perdre.
Jim baissa les yeux. Il avait eu un aperçu de ce que Spock avait pu perdre. La fusion mentale qu'il avait partagée avec Spock Prime avait marqué sa mémoire plus qu'il ne l'aurait cru. Maintenant qu'il avait connaissance de cette histoire de « t'hy'la », il comprenait pourquoi cela avait laissé plus de marques que ce qui lui avait été expliqué sur la fusion mentale. Spock Prime était désormais… seul. Il serra la mâchoire, levant la tête vers Spock.
_Est-ce que vous regrettez votre décision ?
Spock Prime fut songeur. Il réfléchissait vraiment à la question. Jim le laissa faire, pensant de son côté à tout ce que l'Ambassadeur avait pu vivre. Il entendit le vulcain reprendre une longue inspiration avant de donner son verdict.
_Non.
La réponse eut l'effet d'une gifle. Jim serra la mâchoire alors que Spock s'expliquait.
_Ce que nous avons vécu était… unique. Ce que nous avons fait, les épreuves que l'on a vécu, ces découvertes, auprès de Jim, de l'équipage de l'Enterprise, et des années plus tard encore, m'ont comblé. On peut dire que j'ai eu une vie belle et remplie. Si cela était à refaire, je le referais.
Jim baissa la tête pour cacher cette peine qu'il ressentait. Spock reprit.
_Toutefois… Je me suis souvent demandé comment aurait pu évoluer le cours de notre vie, si nous avions partagé nos sentiments.
Jim leva la tête vers Spock. Il pouvait voir cet air triste dans son regard. Son intonation de voix et son visage ne reflétaient aucune émotion, mais ses yeux… Voir cette peine dans son regard, ça lui donnait envie de le toucher, pour le réconforter. Il n'était peut-être pas son Spock, mais il restait une version de lui très similaire. Jim hocha la tête.
_Je vous remercie Ambassadeur.
Spock inclina la tête.
_Portez-vous bien, Jim.
Jim hocha la tête et coupa la communication. Le silence s'abattit sur la pièce, devenant encore plus pesant que ce qu'il venait d'apprendre.