Hello,
Voici donc mon dernier bébé. Il vient d'un "cap ou pas cap" de Leia. Et euh, j'ai un peu pété les plombs (comme d'habitude on pourrait dire). Donc j'espère que vous apprécierez. Merci d'ailleurs à elle pour m'avoir aidé pour le résumé. Et comme d'hab' merci aux gens du Discord de me supporter XD
Bonne lecture
Posté le 17.12.2021 sur AO3 (venez sur AO3, pour avoir mes histoires à jour !)
Rather be the hunter than the prey
Clark expira longuement, souhaitant faire disparaître l'appréhension qui lui tendait les muscles. Tout allait bien se passer n'est-ce pas ? Rencontrer les enfants de son petit ami ne devrait pas poser trop de problèmes à Superman, non ? Il n'y avait pas de quoi s'inquiéter.
Bien évidemment, Bruce lui avait un peu parlé de ses enfants, quatre garçons et une fille. Le plus jeune avait neuf ans, le plus vieux la vingtaine. C'était d'ailleurs le seul qui soit le fils biologique de Bruce. Une erreur de jeunesse apparemment. Bien qu'il insiste toujours que l'erreur était la mère, pas le fils.
— Maître Bruce, monsieur Kent, salua Alfred, le majordome, alors que Bruce et Clark passaient la porte de l'immense manoir du milliardaire.
C'était la première fois que Clark entrait dans la demeure, et l'intérieur était à la hauteur de l'extérieur. Le plafond du hall d'entrée était grandiose. Un énorme lustre pendait au milieu du hall encadré par deux escaliers. Et sur le lustre, un petit garçon était assis, se balançant doucement.
— Bruce ! cria le garçon.
Clark sentit son cœur s'arrêter dans sa poitrine lorsque l'enfant sauta du chandelier. Il regarda avec horreur et fascination le garçon exécuter des figures complexes en l'air avant d'atterrir parfaitement sur les épaules de Bruce.
— Dick, soupira l'homme. Combien de fois t'ai-je dit de ne pas grimper sur le lustre ? Ça pourrait être dangereux.
Ha, donc le mini-kamikaze devait être Richard Grayson, le plus jeune des garçons de Bruce. Clark espérait que ses enfants n'étaient pas tous comme ça.
— Bruce ! Bruce ! Bruce ! continua de chanter Dick, faisant fi de paroles de l'adulte, en se glissant dans ses bras.
— Maître Richard, intervint alors Alfred. Nous avons un invité. Il serait donc poli de le saluer.
Ce n'est qu'à ce moment-là que Dick tourna son visage vers Clark. Et il avait les yeux du plus beau bleu que Clark n'ait jamais vu, les joues rondes d'un enfant, d'épais cheveux noirs en pagaille et un adorable petit nez.
— Ha, bonjour, salua Dick en faisant un signe de la main. Je suis Dick !
— Enchanté, sourit Superman. Je suis Clark Kent.
— Oh Clark…
— Oui, nous en avons parlé, fit Bruce. Tu t'en souviens ?
Clark sentit son ventre se réchauffer à la pensée que Bruce parle de lui lorsqu'il n'était pas là pour l'entendre.
— Oui, oui, répondit l'enfant sans porter plus d'attention aux adultes.
D'une torsion, Dick s'échappa des bras de Bruce pour s'enfuir dans les méandres du manoir. Clark ne put que le regarder partir le sourire aux lèvres.
— Excuse-le, soupira Bruce. Il ne tient pas en place.
— Il a l'air d'être un enfant adorable.
— Un peu trop, fit Bruce en observant Alfred suivre Dick. J'ai peur que certaines personnes aient de mauvaises intentions à son égard.
Clark eut à peine le temps de réfléchir à une réponse pour essayer de rassurer Bruce, qu'un cri sembla traverser tout le manoir.
— JASON !
Un adolescent dévala l'escalier en courant sous un nouveau soupir de Bruce. Il fut rapidement suivi par un autre garçon un peu plus âgé.
— Voici Jason et Tim, soupira une nouvelle fois Bruce.
— Rends-moi ça ! grogna le plus âgé en agrippant l'épaule de son frère.
— Dans tes rêves !
Bien qu'ils soient à moitié en train de se battre en bas de l'escalier, Clark pouvait tout de même avoir un bon aperçu des garçons. Jason était assez grand pour un adolescent, il avait une étrange mèche blanche dans ses cheveux noirs, des yeux bleus qui tiraient fortement sur le vert et un regard presque ancien. Tim était plus mince que son frère, bien qu'il soit plus âgé. Ses fins cheveux noirs lui tombaient sur la nuque, sa peau était d'une pâleur presque maladive, ses yeux aussi clairs que de l'eau de source.
— Tim ! Jason ! coupa alors Bruce de sa voix de commandant.
Clark pouvait presque sentir la sueur lui dégouliner le long du dos tant il redoutait ce ton de voix. Les deux garçons tournèrent seulement leur tête dans leur direction.
— Voici Clark, continua Bruce en faisant un geste en direction du journaliste.
— Bonjour Clark, fit poliment Tim, sans pour autant lâcher son frère.
— Ouais ouais, se contenta de faire Jason. Maintenant, lâche-moi, nerd !
Seul un grognement lui répondit.
Bruce soupira une nouvelle fois, mais il s'approcha des deux garçons se disputant. D'une poigne assurée, il agrippa le col du T-shirt de Jason.
— Ça suffit, gronda-t-il. Nous avons un invité, j'attends de vous un meilleur comportement. Vous ne voulez tout de même pas décevoir Alfred ?!
Les deux garçons semblèrent bien plus affectés par la menace du majordome qu'ils auraient dû l'être de l'avis de Clark.
— Allez dans vos chambres, ordonna Bruce. Dans le calme ! Et Jason, rends ce que tu as volé à Tim.
Les deux garçons s'en allèrent, le plus jeune en bougonnant. Il lança un objet à la figure de son aîné. Ce dernier le rattrapa avec aisance.
— Désolé, fit Bruce en prenant le bras de Clark. Ne fais pas attention à eux.
— Oh, euh, ce n'est rien, ne t'inquiète pas.
— Père, tout va bien ?
— Damian, salua Bruce en direction du jeune homme qui venait d'apparaître par l'une des portes du rez-de-chaussée. Voici Clark.
Le plus âgé des fils de Bruce se contenta d'un hochement de tête. Clark s'empressa de le saluer de la même manière. Le jeune homme était aussi grand que son père, ses cheveux noirs étaient coupés dans le même genre de style militaire, ses yeux étaient d'un beau vert émeraude, tranchant parfaitement avec sa peau hâlée. Sa mâchoire avait l'exact même angle que celle de Bruce, mais ses yeux étaient bien plus étirés.
— Dami ! Dami ! Dami ! interrompirent soudain les piaillements de Dick.
Le garçon apparut, courant, dans le dos de son frère. D'un bon souple, il s'accrocha à ses épaules, se laissant pendre derrière lui. Damian ne broncha même pas.
— Grayson, soupira-t-il.
— Dami ! sourit l'enfant en passant ses jambes autour des hanches de l'adulte.
Clark pouvait voir sur le visage de Damian qu'il n'était pas aussi gêné par la présence de son frère que ce qu'il voulait bien faire croire.
— Damian, Dick, intervint alors Bruce. Rassemblez vos frères et sœur dans la véranda, je crois qu'Alfred a préparé de la limonade.
— Bien Père.
— En avant Dami ! cria Dick en pointant devant lui de son bras tendu.
Le voir ainsi lâcher une partie de sa prise sur son frère rendit Clark anxieux, mais ni le jeune homme ni Bruce ne parurent inquiétés. Donc il se contenta de les regarder partir.
— Ils ont l'air de bien s'entendre, commenta-t-il donc.
— Oui, souffla Bruce, un léger sourire apparaissant sur ses lèvres. Ils sont proches.
Clark ne put s'empêcher de sourire lui aussi, et de se pencher pour poser sa bouche sur celle du milliardaire.
— Bonjour, fit soudain une voix légère juste à côté de Clark, le faisant à moitié sursauter.
Malgré tous ses super-sens, il ne l'avait pas entendu arriver. Juste à côté d'eux se trouvait une jeune fille. Ses traits étaient clairement asiatiques, ses yeux noirs semblaient plus sages et plus profonds que son âge le laissait penser, ses cheveux noirs étaient coupés dans un carré absolument mignon.
— Bonjour, répondit donc Clark en se séparant de Bruce.
— Cassandra, salua le milliardaire. Et si tu allais rejoindre tes frères dans la véranda ?
La jeune fille fit un léger bruit de bouche avant de s'en aller.
— Cassandra ne parle pas beaucoup, prévint alors Bruce en entraînant Clark vers la véranda. La faute à son père biologique.
Clark sentit quelque chose remuer désagréablement en lui. Quel père pouvait se considérer comme tel s'il osait faire sciemment du mal à son enfant ?
— Tous tes enfants ont l'air adorables, Bruce.
Seule une expression un peu surprise lui répondit. Mais ni l'un ni l'autre ne purent approfondir leurs pensées, car ils arrivèrent à la véranda. Étrangement, tous les enfants étaient assis en silence, un verre de limonade en main.
Clark put voir Bruce leur jeter un coup d'œil quelque peu suspicieux, tour à tour.
— Maître Bruce, Monsieur Kent, fit alors Alfred en apparaissant à la porte et en leur tendant un verre de limonade à chacun, avant de disposer des biscuits sur la table basse.
Clark se laissa entraîner par Bruce sur un canapé diablement confortable. Il sirota doucement sa boisson.
— Bien, souffla alors Bruce en reposant son verre sur la table basse et en se redressant un peu. Voici Clark.
D'un geste de la main, il désigna l'homme à côté de lui. Clark sourit avec un signe de la main. Seuls Dick et Cassandra lui rendirent son salut. Il s'efforça de ne pas se sentir déprimé à l'inaction des autres.
— J'espère que vous lui ferez un bon accueil, car il va venir plus souvent ici.
Clark ne put s'empêcher de sentir tout son ventre chauffer à cette remarque. Bruce et lui étaient un couple ! Suffisamment sérieux pour que son copain le présent à ses enfants ! Clark était tellement content !
Il y eut un instant de silence où chacun profita de sa limonade. Puis Dick s'approcha des biscuits.
— Pas trop Dick, rappela alors Bruce.
— Oui oui, répondit le garçon en enfouissant deux biscuits entiers dans sa bouche.
Bruce jeta alors un regard entendu à Damian.
— Qu'est-ce que tu fais dans la vie, Clark ? demanda alors Tim.
— Oh ! fit Superman heureux de cette interaction. Je suis reporteur pour le Daily Planet de Métropolis.
— T'as certainement pas l'accent ni le look de quelqu'un qui vient de Métropolis, remarqua Jason en grignotant un biscuit.
Clark se rendit alors compte que l'adolescent avait un accent de Gotham particulièrement prononcé, plus que n'importe lequel de ses frères et sœurs, et plus que Bruce lui-même.
— Oui, j'ai grandi dans le Kansas.
— C'est où le Kansas ? demanda Dick entre deux bouchées.
— Oh, c'est au milieu des États-Unis, répondit Clark. Je pourrais vous faire visiter la ferme de Ma et Pa si vous voulez. Ils ont des poules, des vaches et des chevaux.
— Des chevaux ! s'exclama alors Dick, en oubliant presque le biscuit qu'il tenait en main. Dami ! Ils ont des chevaux !
Le plus jeune monta sur les genoux de son aîné en braillant à propos des animaux.
— T'as lancé le monstre, Kansas, râla Jason, la mine boudeuse.
— Dick, calme-toi, tenta vainement Bruce.
— Mais Bruce, les chevaux ! sourit l'enfant. Tu crois que je pourrai monter dessus ? Comme avec ceux du cirque ?
Dick se redressa alors, posant une main sur l'accoudoir du canapé où il se trouvait. Puis il sembla dérouler tout son corps pour supporter tout son poids sur sa seule main, la tête en bas, comme si c'était quelque chose de parfaitement normal.
— Waow, ne put s'empêcher de faire Clark.
— Arrête ça, sale mioche, intervint alors Jason, lançant un biscuit sur Dick.
— Todd, grogna alors Damian.
Clark remarqua alors que le jeune homme était positionné de façon à pouvoir rattraper son petit frère si celui-ci faiblissait.
— Jason, on ne joue pas avec la nourriture, fit Bruce, le ton étrangement las, comme s'il s'était déjà répété bien trop de fois.
— Ouais, ouais, fit l'adolescent sans réellement porter d'attention aux mots de l'adulte.
— Kansas… Beau ? demande soudain la voix de Cassandra juste à côté de Clark.
— Ha ! Euh… oui, répondit le journaliste, perturbé de ne pas avoir vu la jeune fille se déplacer. C'est très beau, il y a beaucoup de champ de maïs. Je suis sûr que mes parents se feraient un plaisir de vous accueillir.
— Clark Kent, reporteur au Daily Planet, pointa bêtement Drake.
Mais il avait tout de même raison. Qu'est-ce qu'avait quelqu'un d'aussi banal que Kent pour capturer l'attention de Batman ? À moins que Père l'utilise pour contrôler sa propre image ?
— Il a l'air tellement à côté de ses pompes, ronchonna Todd en s'affalant sur un siège, dans le salon où ils étaient réunis.
— Moi je l'aime bien ! fit Richard en grignotant un énième biscuit.
— Grayson, ça suffit avec les sucreries, dut intervenir Damian. Ou tu ne vas rien manger au souper !
— Mais, Dami, chouina Richard.
L'enfant tourna des yeux bleus immenses vers Damian. Celui-ci savait que le garçon serait sa perte, qu'il lui fallait toute sa volonté pour lui résister. Mais, cette fois-ci encore, il réussit à rester ferme.
— Grayson, fit-il seulement.
À son grand soulagement, Richard abandonna le plat de biscuits.
— Revenons à notre problème, reprit Drake. Ce Clark Kent n'est pas digne de confiance tant que nous n'en savons pas plus sur lui, et sur ce que lui trouve Bruce !
— Nous devons mener l'enquête, déclara Damian. Qu'est-ce que vous en pensez ?
— Ouais ouais, grogna une nouvelle fois Todd. Tant que ça peut agacer Bruce, ça me va.
— Mais moi je l'aime bien Clark, murmura Richard.
— C'est pour en apprendre plus sur lui, mieux le connaître, tenta Drake. Tu n'as pas envie de mieux le connaître ?
— Okay, céda le garçon.
Damian se contenta d'un coup d'œil à Drake. Il n'était pas sûr d'apprécier cette manipulation envers le plus jeune. Mais il reconnaissait que Richard pouvait être une vraie tête de mule quand il avait une idée, et personne ne pouvait le faire céder.
— Cain ? demanda le plus âgé en se tournant vers la seule fille de l'assemblée.
Cassandra se contenta de sourire et de hausser les épaules.
— C'est décidé, conclut Drake. Nous allons investiguer ce Clark Kent afin d'être sûrs qu'il ne soit pas louche.
Todd et Damian hochèrent la tête, prêts à faire ce qu'il fallait. Que ce soit pour protéger Bruce ou l'agacer, dépendait d'eux, bien évidemment.
— Grayson ! Les biscuits !
— Robin, soupira Bruce en observant le garçon.
— Oooh, geignit Dick en se tenant l'estomac.
Bruce s'attendait à ce qu'il vomisse à tout moment, s'il devait en juger par la couleur de ses joues.
— Qu'est-ce qu'on avait dit sur les biscuits ?
— De ne pas trop en manger, répondit la voix de Damian à travers son communicateur.
— C'est pas de ma faute, pleurnicha Dick. Ils étaient trop bons.
Bruce se retint de justesse de lever les yeux au ciel. Avoir quatre adolescents lui avait fait oublier les "joies" d'avoir un enfant plus jeune. Dick était généralement un garçon très agréable, très énergique, mais il avait clairement un problème avec la nourriture sucrée. Il n'y avait plus qu'à espérer qu'Alfred réussirait à corriger cette mauvaise habitude avec sa bonne cuisine. Même si ça paraissait plutôt mal parti, vu que Dick raffolait de ses pâtisseries.
— B, besoin d'aide pour ramener Robin à la maison ? proposa Damian.
— Volontiers, soupira Batman.
— ETA dans cinq minutes.
Bruce ne pouvait assez remercier le ciel que Damian soit si enclin à prendre soin de Dick. Il lui était d'une aide précieuse. Même s'il sentait parfois un petit pincement au cœur, lorsqu'il était évident que Dick s'entendait mieux avec Damian qu'avec Bruce lui-même. Mais c'était une des conséquences de son absence qu'il ne pouvait pas changer. Il devait juste vivre avec, et prendre soin de Dick du mieux qu'il pouvait.
Tim s'installa derrière son ordinateur, faisant craquer ses doigts. Il avait beaucoup de travail à faire, et il ne parlait pas de Wayne Entreprise. Ni même de ses activités de Red Robin. Non, il avait de la recherche à faire, sur un certain Clark Kent. Rien de particulièrement complexe en somme, même si cela prenait du temps. Encore plus lorsqu'on voulait le faire sans que Bruce s'en aperçoive.
Parce que Tim était à peu près sûr que Batman prendrait très mal le fait qu'il se permette de faire une recherche approfondie sur son partenaire. Rien qu'à cause de l'invasion de la vie privée du journaliste, et surtout parce qu'il avait déjà dû le faire lui-même. Du moins, Tim l'espérait. Bruce n'était quand même pas si compromis par ses sentiments que ça, non ? Mais qui pouvait bien dire ce qui passait par la tête du Chevalier Noir ? En tout cas, pas Tim.
Tim était en train d'analyser l'historique des commandes Amazone de Clark Kent lorsque son communicateur sonna. Poussant un soupir, il décrocha, espérant que ce ne soit pas Bruce.
-Red Robin.
-Tiiiiiiiim, fit la voix plaintive de Dick.
Le jeune homme ne put s'empêcher de pousser un nouveau soupir. Rien qu'au son de la voix de Robin, il était évident qu'il n'était pas en patrouille et qu'il n'avait pas vraiment besoin de son aide.
— Qu'est-ce qu'il y a ? grommela-t-il, en espérant que Damian arriverait à capter rapidement l'attention de l'enfant.
— Il n'y a plus de biscuits.
Tim grogna, se pinçant l'arrêt du nez. Dick avait un problème avec les sucreries, mais ni Bruce ni Damian ne semblaient avoir assez de volonté pour empêcher l'enfant de manger trop de sucre.
— Dick, je suis occupé, pointa-t-il fermement.
— Mais Tim, pleurnicha l'enfant. Il n'y a plus de biscuits.
Et ni Alfred, ni Bruce ou Damian n'allaient lui en racheter au beau milieu de la nuit. Et Dick n'avait, en principe, pas le droit de sortir seul. Bruce avait été suffisamment traumatisé par trois Robin crapahutant seuls dans les rues de Gotham, pour en ajouter un quatrième. Alors Dick se rabattait sur Tim. Car il savait que Jason l'enverrait paître et que Tim détestait qu'on le dérange, qu'il ferait tout pour être à nouveau au calme.
— Dick, grogna une nouvelle fois Red Robin.
Il sentait déjà sa patience s'amenuiser alors que ça faisait à peine cinq minutes que l'enfant avait appelé.
— Tiiiim, couina-t-il.
Ce dernier poussa un nouveau soupir, regrettant le calme dans lequel il se trouvait avant l'appel. Il avait presque envie de maudire Bruce et tous les petits frères qu'il lui imposait.
— Grayson ! fit soudain la voix de Damian. Qu'est-ce que tu fais ?
— Dami !
— Pourquoi est-ce que tu ne dors pas encore ? Est-ce que c'est ton communicateur ?
— C'est pas ce que tu crois Dami !
— C'est exactement ce que tu crois, fit alors Tim, n'ayant aucune honte à cramer ainsi son petit frère.
— Drake, salua Damian.
— Al Ghul.
— Damian, s'il te plaît, sembla supplier Dick.
Tim put entendre le soupir de l'adulte même à travers le communicateur.
— Dick, donne-moi ce communicateur.
— Non ! Jamais !
Tim pouvait parfaitement s'imaginer l'enfant serrer l'objet contre son cœur pour le protéger. Puis, il y eut des bruits de bataille, des couinements, des grognements, et finalement, le rire de Dick. Quelques phrases murmurées plus tard, auxquelles Tim ne porta pas d'attention, la voix de Damian fit :
— Drake, tu es toujours là ?
— Ouais. Je crois que tu vas être bon pour une corvée de sucrerie demain.
Seul un claquement de langue lui répondit.
— J'espère qu'il ne t'a pas dérangé dans quelque chose d'important.
— J'étais en train de faire des recherches sur ce Clark Kent.
— Oh, et alors ? Quelque chose d'intéressant ?
— Pas vraiment, soupira Tim. Il a tout l'air du type complètement banal qu'il prétend être. La seule chose que j'aie pu trouver qui sort un peu de l'ordinaire, c'est qu'il a été adopté par les Kent, et qu'il n'existe pas de certificat de naissance à son nom.
— Rien d'ordinaire, mais rien de scandaleux non plus.
— Exactement, je vais continuer à chercher.
— Okay.
— Red Robin, out.
Sur ces mots, Tim coupa la communication et se reconcentra sur ses recherches.
— Ça vous fera douze dollars, chantonna la vendeuse.
Damian ne put s'empêcher de grogner légèrement avant de tendre l'argent à la jeune femme.
— Merci, murmura Cain juste à côté de lui.
Ses yeux noirs semblaient briller à la vue de sa glace, thé vert gingembre. Damian se contente d'un signe de la tête avant de goûter à sa propre glace, une simple boule citron vert. Du coin de l'œil, il surveillait Richard qui dévorait ses boules fraise pistache. L'enfant avait déjà une belle moustache rose et verte autour de la bouche. Damian leva les yeux au ciel en reprenant une bouchée de sa glace.
Sentant le regard de l'adulte sur lui, Richard s'interrompit un instant pour déployer toute la puissance de son sourire sur Damian.
— Merci Dami ! chantonna-t-il même, avant de lécher sa glace.
Damian dut user de toute sa volonté pour empêcher ses lèvres de s'étirer en un sourire. Richard serait sa perte. Le jour où cela arriverait, il fallait que Damian s'arrange pour que Drake et Todd ne soient pas témoins de son lâcher-prise. Sinon il serait le sujet de leurs moqueries pour le restant de ses jours.
Damian mordit dans sa glace, grimaçant sous le froid et l'acidité.
— On peut aller au zoo ? demanda Richard entre deux bouchées.
Ha oui, car en plus d'avoir un problème avec les sucreries, Richard avait un problème avec les animaux. Enfin plus particulièrement les éléphants. Damian, Bruce et Alfred en avaient discuté. Ils avaient conclu qu'aller voir les éléphants du zoo de Gotham faisait partie du processus de deuil de Richard. L'enfant avait déjà confié que les éléphants du cirque lui manquaient. Damian ignorait si c'était la stricte vérité ou une manière détournée de dire que ses parents lui manquaient.
Quoiqu'il en soit, Damian tourna son regard en direction de Cain, lui demandant implicitement son accord. D'un simple signe, elle montra que faire un petit détour par le zoo ne la dérangeait pas.
— D'accord, souffla Damian.
Richard tout entier sembla briller sous la puissance de son sourire. Et cette fois-ci, Damian ne put retenir le sien.
Jason mordit de son hot-dog avec voracité. Le fait qu'un vendeur de hot-dog se trouvait juste en face du Daily Planet était parfaitement convénient. Il n'avait même pas besoin de se passer de nourriture en attendant sa cible. Dans tous les cas, Jason était venu préparé à Métropolis. Son sac à dos contenait suffisamment de provisions, et de munitions, pour tenir un petit siège. Et il avait encore de la réserve sur sa moto.
Oui, Jason était venu en moto, même s'il n'avait pas encore légalement l'âge d'en conduire une. Mais bon, il n'était même pas légalement vivant, alors à quoi bon s'arrêter de vivre pour si peu. Et si vraiment, Jason pouvait toujours se servir du nom, de la renommée et de l'argent de Bruce. Ça lui apprendrait bien à le laisser crever la bouche ouverte sans même le venger, alors qu'ils étaient partenaires !
Jason mordit violemment dans son hot-dog, respirant furieusement par le nez. Ce n'était pas le moment de replonger dans sa rage folle. Non, il avait une cible à filer, ce qui emmerderait bien Bruce s'il venait à l'apprendre. Et Jason s'arrangerait pour qu'il l'apprenne. Même s'il devait faire foirer toute l'investigation de ses frères et sœur. Jason n'avait pas peur de Damian ou Tim ! Et Dick n'était qu'un avorton, tout juste bon à faire le singe de cirque.
Comme prévu à 1700 précises, la cible de Jason sortit de la tour de verre qui abritait le Daily Planet.
— Enfin, murmura Jason, alors qu'il observait l'échine courbée de Clark Kent, vêtue d'un costume de mauvaise qualité, tracer son chemin dans la foule de travailleurs rentrant chez eux.
Les mains dans les poches, et le capuchon de son sweat rouge relevé, Jason commença sa discrète filature. Il savait parfaitement qu'il avait l'air d'un adolescent normal, quoiqu'à la recherche de quelques ennuis. Personne ne pouvait deviner en le voyant qui il était et ce qui lui était arrivé.
À 1705, la cible de Jason s'arrêta pour observer une quelconque vitrine. Jason s'arrêta de marcher, s'accroupissant au sol pour refaire un lacet qui n'était même pas défait. À travers ses cheveux, il pouvait voir Clark examiner quelque chose.
À 1709, ils s'arrêtèrent une nouvelle fois, pour examiner une autre vitrine. Cette fois-ci, Jason fit semblant d'être particulièrement absorbé par son portable, au point de s'arrêter d'avancer.
À 1712, la cible de Jason entra dans un immeuble d'habitation banal, comme il en existait des milliers d'autres à Métropolis. Jason prit bien soin de noter le numéro de l'immeuble et la rue sur son portable. Malheureusement, il ne pouvait pas suivre sa cible dans l'immeuble pour savoir quel appartement il occupait. Jason se contenta donc de le regarder de l'extérieur monter les marches quatre à quatre, sans doute pressé d'arriver chez lui après une longue journée de travail.
Une fois que Clark Kent fut sorti de son champ de vision, Jason se détourna. Il fit le chemin inverse afin de retourner vers sa moto. Jason grignota une barre de céréale pendant qu'il mettait de l'ordre dans ses observations, appuyé sur sa moto. Finalement, il enfourcha l'engin, vissant son casque rouge sur sa tête, celui équipé d'un communicateur. Démarrant le moteur, Jason contacta Damian.
Certes, Tim était en charge de récolter toutes les données qu'ils trouvaient sur Clark Kent. Mais il était hors de question que Jason fasse son rapport à ce nerd. Il préférait appeler Damian, lui au moins avait des couilles.
— J'écoute, commença le jeune homme.
— Filature terminée, informa Jason. Clark Kent est le type le plus banal que j'ai jamais vu. J'ai son adresse.
— Bon travail, Hood, commenta Damian.
— Ouais, ouais. Red Hood, out.
Coupant la communication, Jason se concentra sur la route et le plaisir de conduire.
Tim fronça les sourcils. La lumière du Batcomputer illuminait le reste de la Batcave plongée dans la nuit. Il faut dire que ce n'était plus vraiment une heure pour être debout. Mais les résultats des analyses fournies par le Batcomputer étaient des plus intrigants. Et Tim savait qu'il ne pourrait pas se reposer tant qu'il n'avait pas réussi à comprendre le problème devant lui. Bruce n'était pas resté avec lui, car il avait rendez-vous avec ce Clark Kent. Pour ce que Tim en savait, il n'était toujours pas rentré.
— Qu'est-ce que tu fais ?
Tim faillit abattre son poing sur le visage de Dick par pur reflex. L'enfant venait d'apparaître juste à côté de lui, devant l'ordinateur.
— Dick ! gronda Tim. Ne me surprends pas comme ça.
Pour seule réponse, l'enfant leva ses yeux immenses sur lui. Ce qui permit à Tim de noter qu'ils étaient bien trop rouges et gonflés. C'était donc l'une de ces nuits…
Mais, même si Tim appréciait la nouvelle addition à leur petite famille, il fallait absolument qu'il trouve ce qui clochait avec ces analyses, c'était important. C'est donc sans grande honte qu'il demanda :
— Où est Damian ?
Car si Bruce n'était pas là pour aider Dick, alors le fils du Démon s'en chargerait avec plaisir.
Dick se contenta de hausser les épaules, une moue boudeuse sur le visage.
Tim se demande s'ils s'étaient disputés, aussi improbable que cela puisse paraître. Le Démon était complètement mordu de Dick, acceptant tout et n'importe quoi de sa part. Cela pouvait peut-être aussi expliquer le cauchemar.
— Qu'est-ce que c'est ? demanda Dick en montrant du doigt une donnée affichée sur l'écran.
— C'est compliqué, choisit de répondre Tim. Dick, tu devrais aller te recoucher.
— Hmmm, non, fit semblant de réfléchir l'enfant.
Tim leva les yeux au ciel. Comment se faisait-il que Bruce se retrouve avec des enfants plus têtus les uns que les autres ? Pourquoi Tim ne pouvait-il pas avoir un petit frère qui l'écouterait et qui lui obéirait ?
— C'est du chocolat ? demanda Dick en se penchant pour voir le contenu d'un des nombreux mugs qui ornait la console du Batcomputer.
— Touche pas à ça ! gronda Tim en ramenant son café contre son torse.
Les yeux de Dick parurent encore plus immenses sous le coup de sa surprise. Tim se fustigea mentalement. Il n'allait tout de même pas faire pleurer son petit frère ?! L'enfant avait l'air d'avoir suffisamment bataillé contre ses propres démons pour une seule nuit.
— Pardon, s'excusa Tim en se raclant la gorge. Tu veux que j'appelle Bruce ou Damian ? Est-ce que tu as Zitka avec toi ?
Zitka était l'éléphant en peluche de Dick, son doudou. Il ne dormait pas pour autant toutes les nuits avec et il avait tendance à l'égarer dans le manoir.
— Non, elle est avec Bruce.
Ha…
— Pourquoi ?
— Pour ne pas qu'il soit seul alors qu'il ne dort pas au manoir, fut l'explication de Dick.
Tim se demanda comment Dick avait réussi à faire emporter la peluche à Bruce. Probablement en la cachant quelque part dans ses affaires. Tim espérait que cela n'amènerait pas à la perte du doudou. Il voyait la catastrophe arriver d'ici !
— Tu sais que Bruce est sans doute allé voir son copain, Clark, il n'est pas tout seul.
— Oui, mais on ne sait pas si Clark fait de bons câlins ! bouda Dick. Avec Zitka, je suis sûr qu'il va bien dormir.
Tim préférait éviter de penser à ce que Bruce et Clark pouvaient bien faire seuls, dans un lit, au milieu de la nuit.
— Je vais appeler Damian, statua-t-il alors.
Damian savait être patient. On le lui avait appris dès son plus jeune âge, avec bien d'autres choses. Cette qualité était approuvée par Batman, contrairement à certaines autres capacités que Talia avait apprises à Damian. Cela l'avait peut-être mis en colère lorsqu'il était jeune, que son père n'apprécie pas ses talents à leur juste valeur. Mais en grandissant, il avait compris le point de vue de son père. Et surtout, il avait compris ce qu'il lui offrait, la liberté que ni Ra's ni Talia n'aurait jamais pu lui donner.
Alors, Damian attendit.
On était samedi après-midi, le temps était doux. Père et Clark Kent se trouvaient dans la véranda. Damian ignorait ce qu'ils y faisaient exactement, et il n'avait pas envie de le savoir. Tout ce dont il avait besoin, c'était de voir Clark seul un instant. Mais il était vain d'espérer que son Père laisse le journaliste seul. Heureusement, Damian avait un complice.
-Bruuuuuuuuuuce, fit Richard en arrivant en courant dans la véranda.
— Dick, qu'y a-t-il ? demanda Bruce.
De là où il était dissimulé, Damian pouvait voir les deux adultes porter leur attention sur l'enfant.
— Je ne trouve plus Zitka, chouina Richard.
Damian et Richard avaient pris soin de dissimuler l'éléphant en peluche dans la chambre du dernier. Cela forcerait Bruce à quitter la véranda et passer un certain temps à fouiller la chambre pas très bien rangée. Ils avaient aussi pris soin d'envoyer Alfred faire une course, de la glace au citron vert.
— Est-ce que tu as cherché partout ? demanda Père.
Il était évident qu'il ne souhaitait pas quitter les côtés de son petit ami. Et c'était justement pour ça que Damian avait envoyé Richard. Absolument personne ne pouvait lui résister. Damian avait même vu Alfred craquer quelques fois.
— Oui, fit Richard, une moue sur les lèvres.
Père poussa un léger soupir. Damian put le voir jeter un regard à Clark. Il devinait qu'il devait s'agir d'un regard d'excuse.
— Allons la chercher, fit Père en se relevant.
Damian se retrancha plus en arrière dans le couloir alors que Bruce et Richard passait devant lui. Lorsqu'il fut sûr qu'ils avaient atteint le hall d'entrée, Damian pénétra dans la véranda.
— Monsieur Kent, salua-t-il poliment.
— Oh ! sursauta Clark en replaçant ses lunettes sur son visage. Bonjour, euh, Damian. Je peux faire quelque chose pour toi ?
— T'éloigner de mon père, répondit sèchement Damian.
Il s'avança de sorte à être en face du journaliste. Les bras croisés sur le torse, il s'étendit de toute sa hauteur, dominant l'homme assis sur un fauteuil en osier.
— Je… Je…
— Arrête donc cette farce de reporteur maladroit, nous savons tous que tu en as après l'argent de Père. Si ce n'est pas ça, alors c'est pour un scoop.
Kent se contenta de faire le poisson rouge face à Damian. Celui-ci laissa un petit rictus tordre sa bouche. Tout cela était bien trop facile.
— Je… Je comprends, souffla Kent. Mais je ne suis pas là pour ça. J'aime sincèrement ton père.
Il y avait quelque chose d'étrange dans les yeux du journaliste. Un éclat particulier. Damian était sûr de l'avoir déjà vu quelque part, mais il n'arrivait pas à mettre le doigt dessus.
— Cela a intérêt à être vrai, Kent ! Sinon je me ferais un plaisir de détruire ta vie. Et tu penses bien que j'en ai les ressources, étant l'héritier de Père.
Enfin, Damian ne l'avouerait pas, mais celui qui avait le plus de ressources pour détruire une vie était probablement Drake. Mais ça, Kent n'avait pas besoin de le savoir. Et de toute manière, s'ils en arrivaient à cet extrême, Damian savait qu'il pouvait compter sur ses frères et sœurs.
— Ha, je… je…, continua de balbutier Kent.
— Damian, fit soudain la voix de Père.
Damian poussa un soupir mental, il avait été tellement sûr qu'il mettrait plus de temps à trouver la peluche de Richard. Est-ce que ce dernier l'avait aidé ? Non, Richard savait suivre un plan, même si cela allait à l'encontre des ordres de Batman. Père avait sans doute eu de la chance. À moins que Todd ait moufté quelque chose. Il avait bien trop traîné dans les couloirs du manoir lorsque Damian et Richard préparaient leur plan d'attaque.
— Père, salua Damian.
— J'espère que je ne vous interromps pas.
Au ton de sa voix, Damian pouvait dire qu'il savait exactement ce qu'il avait dit à son petit ami.
— Non, nous avions terminé, fit Damian en se détournant. Bonne après-midi.
D'une démarche sûre, il sortit de la véranda. Mais il était déçu de ne pas en avoir appris plus sur le reporteur, à part le fait qu'il semblait aimer sincèrement son père et qu'il était prêt à se battre pour ça.
Cassandra observa ses frères.
Ses frères.
Elle n'avait jamais imaginé qu'elle aurait des frères. Et pourtant. La vie restait pleine de surprise et de joie. Chaque jour qui passait, elle était reconnaissante envers Bruce de l'avoir tiré des griffes de son père et de l'avoir laissé entrer dans sa vie. D'avoir eu foi en elle.
Ses frères et elle se trouvaient dans l'un des salons du manoir. Et ils discutaient, encore, du petit ami de Bruce.
Cassandra les observait avec un doux sourire aux lèvres.
Ses frères avaient beau être des détectives hors paires, ils étaient pourtant aveugles. Cassandre, elle, voyait. Elle voyait le corps de Clark Kent, sa manière de se tenir, la largeur de ses épaules, le bleu de ses yeux. Comme il était toujours étonné lorsqu'il n'entendait pas Cassandra avancer. Comme son corps semblait toujours se tourner vers Bruce. Son sourire, ses cheveux. La manière dont ils interagissaient tous les deux, comme s'ils se connaissaient depuis des années, qu'ils avaient vaincu mille ennemis, qu'ils mourraient l'un pour l'autre.
Il n'y avait qu'une seule conclusion possible.
Clark Kent était Superman.
Il fallait juste que ses frères s'en rendent compte.
Mais ils se concentraient sur les mauvaises choses. Cassandra aurait pu les aider, bien évidemment. Mais elle avait aussi vu les éclats dans les yeux de Bruce lorsque ses fils se faisaient suspicieux de Clark. Elle ne voulait pas lui gâcher son plaisir. Peut-être devrait-elle l'avertir qu'elle avait deviné et qu'il lui faudrait essayer plus dur s'il voulait tenter de lui dissimuler quelque chose de ce genre.
Quoiqu'il en soit, Cassandra aimait sa famille, même dans leur aveuglement.
Dick avait une mission.
On comptait sur lui pour la mener à bien. Et c'est ce qu'il s'apprêtait à faire.
Tim et Damian avaient été plus que clairs dans leur briefing. Dick avait plus de chance d'obtenir des aveux au milieu de la nuit. S'il simulait avoir fait un cauchemar. Dick n'avait pas besoin de simuler, ses cauchemars le suivaient partout où qu'il aille depuis cette représentation maudite.
Dick serra Zitka contre lui, se rassurant avec la douce odeur de la peluche. Il observait son réveil digital. Lorsque les chiffres rouges indiquèrent 2:37, Dick repoussa ses couvertures.
Emportant Zitka avec lui, il sortit de son lit, se dirigeant vers la porte. Dick savait que parcourir le couloir de nuit serait un moment critique. Il fallait absolument qu'il évite Alfred. Le majordome le renverrait dans sa chambre, après un chocolat chaud, mais il ne le laisserait pas déranger Bruce. Et Dick était sûr qu'il serait capable de deviner tout le plan.
Quant à Damian, Tim et Cassandra, Dick savait qu'ils feraient semblant de rien, pour le bien de la mission. Clark n'était pas au manoir, Damian s'en était assuré. Dick était rassuré, il ne voulait pas revivre la fois où il était entré dans la chambre de Bruce sans prendre garde à ce qui se passait à l'intérieur.
Il ne restait plus que Jason. Dick ignorait ce que ferait l'adolescent s'il le croisait dans les couloirs au milieu de la nuit, en sachant ce qu'il s'apprêtait à faire. Peut-être le dénoncerait-il juste pour énerver Damian et Tim ? Il ne semblait pas beaucoup les aimer. Mais il était difficile de dire s'il ne les préférait pas à Dick. Et okay, peut-être que Dick pouvait comprendre le sentiment. Sans doute que lui aussi ne serait pas très enchanté de trouver quelqu'un d'autre à sa place auprès de Bruce. Mais ça n'excusait pas tout le comportement de Jason. Dick allait juste devoir l'éviter pour ce soir.
Sur la pointe des pieds, Dick se glissa dans le couloir. N'ayant pas allumé la lumière dans sa chambre, ses yeux étaient parfaitement adaptés à l'obscurité. Il n'eut donc aucune peine à se diriger dans le manoir jusqu'à la chambre de Bruce. Par précaution, il pressa son oreille contre la porte en bois, afin de s'assurer que l'adulte soit seul. On n'était jamais trop prudent.
N'entendant rien de suspect, Dick prépara sa meilleure bouille, celle qui faisait craquer jusqu'à Alfred. Puis, il entra. En piste !
D'un pas léger, il rejoignit le lit de Bruce en tenant Zitka contre lui. Il se glissa sous les couvertures, rampant jusqu'au corps encore endormi de l'adulte.
Ce n'était pas la première fois que ça arrivait, qu'il venait chercher du réconfort au milieu de la nuit dans l'étreinte d'un parent. C'était arrivé avec ses parents, avant. Et maintenant, avec Bruce, Damian, parfois Tim, lorsque celui-ci dormait. Alors, il savait parfaitement comment les réveiller, s'il en avait besoin. Parfois, juste les sentir à côté de lui était suffisant, mais parfois, il avait besoin d'être réconforté.
Dick se tortilla afin de coller ses pieds froids contre la peau de Bruce. Un grognement plus tard, celui-ci se tourna face à l'enfant.
— Dick, marmonna-t-il, la voix encore lourde de sommeil.
— Bruce, chuchota Dick en retour.
Il sentit les bras de l'adulte l'entourer. Un petit sourire de contentement lui échappa. Bruce et Damian faisaient les meilleurs câlins. Dans leurs bras, Dick se sentait en sécurité, comme si rien ne pourrait jamais l'atteindre.
— Dis-moi, fit Bruce en se calant contre les oreillers.
À ce moment, Dick fut sur le point d'oublier le plan et de tout raconter à Bruce. Toutes les nuits qu'il passait les yeux ouverts sur son plafond à revoir encore et encore ses parents tomber. Toutes les petites choses qui les lui rappelaient et lui retournaient les entrailles. Toute la joie qu'il ressentait dans sa nouvelle vie et qui le faisait se sentir coupable.
Seulement, ses frères et sa sœur comptaient sur lui.
— Est-ce que Clark et toi vous allez vous marier ? demanda-t-il alors.
Dick savait que Bruce verrait parfaitement le détournement d'attention. Mais il savait qu'il le laisserait faire, car il comprenait la douleur de Dick. Sans doute mieux que n'importe qui.
— Hmm, fit Bruce, semblant prendre son temps pour répondre. Seul le temps nous le dira.
— Mais toi, est-ce que tu en as envie ? insista Dick en arrangeant Zitka dans ses bras.
— Je ne pense pas avoir besoin de me marier à une personne pour être heureux avec elle.
— Et tu es heureux avec Clark ?
— Oui, souffla Bruce, comme s'il lui avouait quelque chose d'inavouable, d'interdit.
Dick laissa passer un instant de silence, comprenant une partie de ce que son mentor venait de lui révéler, dans l'obscurité de sa chambre.
— Comment tu as rencontré Clark ? demanda-t-il finalement en se serrant contre Bruce.
— À un gala.
— Oh, comme dans un conte de fées ?
Cela sembla amuser Bruce, dont Dick pouvait deviner le sourire.
— Quelque chose comme ça.
Un bâillement, interrompit Dick. Il frotta un instant son visage contre le tissu usé de sa peluche.
— Il est vraiment journaliste ? demanda Dick en fermant les yeux.
— Oui, vraiment.
— Hmmm, tu n'aimes pas les journalistes.
— Oui, mais Clark c'est spécial, fut la dernière chose que Dick entendit avant de s'endormir, bercé par la chaleur de Bruce.
Bruce laissa Clark poser son front contre le sien et emmêler leurs jambes. Bruce n'avait jamais été du genre câlin après l'amour. Une partie venait sans doute du fait qu'il ne ressentait rien pour ses conquêtes. L'autre partie, qu'il n'était pas quelqu'un de très tactile. Pourtant, il y avait peu de choses qu'il aimait autant que cet instant, se laisser dériver dans les bras de Clark après un moment intime.
— Je t'aime, murmura Clark, ses lèvres frôlant les siennes.
Bruce se contenta d'un soupir de bien-être. Il savait très bien que Clark avait entendu les accélérations de son cœur à ces trois mots. Bruce se coula encore plus contre lui, posant son front sur son épaule, laissant ses mains parcourir la peau parfaite de Superman.
Ils restèrent ainsi pendant plusieurs délicieuses minutes.
Puis, un petit rire secoua Clark.
— Que se passe-t-il ? souffla Bruce, ne voulant pas briser la paix qui l'avait envahi.
— Tes enfants, résuma Clark.
Cela eut le don d'intriguer Bruce, le faisant se redresser un peu pour observer Clark.
— Que disent-ils ?
Avoir un copain avec des super sens avait des avantages en toute circonstance. Notamment pour pouvoir espionner les théories fumeuses, à son grand désespoir, de ses enfants.
— Tim et Damian restent persuadés que je profite de toi d'une manière ou d'une autre.
Bruce ne put s'empêcher de sourire, il reconnaissait bien là ses deux aînés, toujours méfiants.
— Je n'en reviens toujours pas que tu ne m'aies pas dit, fit Clark, quelque chose de doux dans le regard.
— C'était pour tester tes capacités de détective.
Un reniflement peu élégant échappa à Superman.
— Est-ce que c'est ta manière de dire que je suis meilleur enquêteur que tes enfants ?
— C'est vrai qu'ils ont été plutôt décevants sur ce point-là. Comment tu t'en es rendu compte ?
— Grâce à Jason. Il me suivait, alors je l'ai suivi à mon tour. J'ai reconnu le casque et entendu sa conversation à travers son oreillette. Le reste n'était que de la déduction.
— Hmmm, reporteur, hein…
— Oui, mais tu aurais quand même pu me dire que tes enfants étaient tes acolytes.
— Non, cela aurait été beaucoup moins amusant.
Certes, s'amuser ainsi aux dépens de sa famille et de son petit ami n'était pas très sympathique. Mais pour ses enfants, cela faisait partie de leur entraînement. Après tout, il fallait bien qu'ils soient à même de reconnaître les membres de la Justice League. Au cas où ceux-ci se faisaient corrompre et les attaquaient sous leur identité secrète. Visiblement, Bruce avait encore des choses à leur apprendre à ce niveau.
— J'ignorais que tu avais un sens de l'humour Bruce.
— Très drôle Clark, répondit Bruce avant de se jeter sur lui.
Quelques baisers, mordillements, chatouilles et attaques en traître plus tard, Bruce rendit les armes.
— Il faudrait leur dire.
— Mmmh, fit Clark, les yeux fermés.
— Grayson, les biscuits, souffla Damian en s'installant devant la Batcomputer.
— C'est mon snack, prépatrouille, se plaignit Richard.
— Je suis à peu près sûr que ce n'est pas approuvé par l'Agent A, fit Drake en finissant de boucler sa ceinture utilitaire.
Richard ne répondit rien, bien trop occupé à se goinfrer. Damian pris note d'avertir Père à propos de l'excès de l'enfant. Pas forcément pour qu'il subisse une remontrance, l'addiction de Richard au sucre était bien au-delà de toute remontrance. Mais juste pour qu'il soit au courant de l'état de l'enfant. Parfois, cela pouvait faire toute la différence.
— Bah, laisse-le s'étouffer, pointa rageusement Todd.
Celui-ci était aussi en train de se préparer à sortir, farfouillant dans le casier contenant ses affaires. Derrière lui, Cassandra lui asséna une tape sur la tête, le réprimandant efficacement, sans que Damian ait à intervenir.
— Grayson, va te préparer. Père va bientôt descendre.
— Mouif, répondit Richard, la bouche encore pleine, en se dirigeant vers son propre casier.
Damian reporta son attention sur le Batcomputer, étudiant les dernières données de l'enquête qu'il avait en cours. Il espérait pouvoir faire de l'avance ce soir. Il sentait qu'il était presque au bout, qu'il allait bientôt toucher la résolution du bout des doigts. Et c'était l'un des meilleurs sentiments au monde. Damian avait mis un certain temps à le comprendre. Mais quand il en avait saisi toute la beauté, cela l'avait rapproché de son père.
D'ailleurs, en parlant du loup, Damian l'entendait descendre les escaliers métalliques de la Batcave.
— Père, salua-t-il en se détournant du Batcomputer.
— Damian, tout est prêt ? demanda-t-il en retour.
— Oui, Grayson vient de partir se changer et il a encore abusé des biscuits.
Père se contenta d'un grognement, mais Damian pouvait voir qu'il n'était pas surpris ni particulièrement heureux. Pendant un instant, il parut considérer quelque chose.
— Bien, finit-il par soupirer. J'ai quelque chose à vous dire, continua-t-il en direction des autres.
Cain et Drake se postèrent aux abords du Batcomputer. Todd traîna les pieds et s'affala contre la console, semblant prêter qu'une oreille à Père. Richard arriva en sautillant, finissant de boucler sa ceinture, un biscuit entre les dents.
— Bien, fit encore Bruce, en les observant tour à tour.
Un silence tendu plana sur la Batcave, Damian avait le sentiment qu'il n'allait pas aimer la suite.
— Je suis déçu, commença donc Bruce. Je vous ai laissé plusieurs semaines et aucun d'entre vous n'a réussi à résoudre l'énigme.
— Quoi !?
— Quelle énigme !
Un brouhaha s'empara de la cave. Damian fouillait dans sa mémoire à la recherche d'une énigme posée par Père. Mais il ne trouva rien.
— De quoi tu parles ? demanda-t-il, sa voix couvrant celle des autres.
— De Superman, souffla Cain.
Tous se tournèrent vers elle.
— Qu'est-ce que tu racontes ? demanda Todd.
Un encouragement de Bruce la poussa à continuer.
— Superman est Clark Kent.
De nouveaux éclats interrompirent la discussion. Damian avait juste l'impression qu'on lui faisait une mauvaise blague. Mais ce n'était vraiment pas le genre de Cain de faire des blagues.
— Père, coupa-t-il l'indignation générale. Est-ce que c'est vrai ?
— Oui, répondit Bruce, avant d'appeler. Clark.
En un battement de cil, un vent violent se leva dans la Batcave, juste avant que Clark Kent apparaisse aux côtés de Batman.
— Oui ?
Un sourire diabolique aux lèvres, Bruce embrassa Superman.
Damian était en plein cauchemar.
FIN