Avertissement : comme je lis la saga Potter en anglais, j'ai spontanément réutilisé les noms propres de la V.O. Et j'ai pris l'option de ne pas faire de transposition à l'occasion de la mise en ligne, donc Hogwarts Poudlard, Snape Rogue, Slytherin Serpentard (il aurait été dommage de se priver de l'allitération en "s"), Sprout Chourave ...

Disclaimer : les personnages inventés par JKR sont toujours à elle, par contre les autres sont sortis de ma seule imagination (notamment Isolfe ) – ainsi que les actions et les pensées qui relient les uns et les autres.

Résumé : le cadre temporel est celui du prisonnier d'Azkaban, puisque Remus Lupin est professeur de DCFM, mais c'est le seul lien avec le troisième tome. Par ailleurs je suis partie du postulat que le fait d'être un loup-garou rend un homme stérile, en fait je pourrais presque dire que toute l'histoire est basée sur cette impossibilité.

Le texte se présente comme la première entrée du journal intime de Remus Lupin – plus tard vous aurez le droit à celui d'Isolfe Dazurs, d'où le titre (pas génial d'ailleurs ) de "Journeaux croisés".

C'est la première fan fiction que j'écris, après beaucoup d'années passées à ne sortir que du blabla professionnel. Drôle d'expérience de se remettre à manier des mots, des phrases et des sentiments. Donc merci de me dire si tout cela tient la route !

Journal de Remus, 16 septembre

Je bascule soudain en arrière dans le temps, mi-septembre, vers ce moment précieux entre tous, quelques jours après l'avoir vue pour la première fois, le 16 septembre exactement, 7 heures du soir et quelques minutes, le corridor de l'aile des professeurs plongé dans l'ombre encore dorée du soleil couché, je vois marcher dans ma direction Isolfe Dazurs, au même rythme que ses pas me reviennent en mémoire toutes les fois que je l'ai vue, le soir de la rentrée, tendue et anxieuse, contrôlant sa panique, dans son ample robe noire à col montant - tous les mots que nous avons échangés – sur des sujets professionnels, conversation entre deux collègues venant de prendre leur poste – et sur le rythme de ses pas pénètre en moi la certitude que c'est la femme que je vais me mettre à aimer dès qu'elle sera arrivée à mon niveau, elle que je vais aimer et que cet amour unira intiment cœur, cerveau et sexe, elle que je vois avancer vers moi dans sa future plénitude, amante, épouse et mère, encore quelques pas, encore deux, encore un, nous sommes exactement au même niveau, devant une fenêtre, ce qui reste de lumière du dehors vient se poser sur elle, c'est le début de mon amour; la césure de ma vie, entre l' avant et l' après.

Une fois qu'elle est passée (nous avons dû échanger un banal bonsoir), je reste près de la fenêtre, il m'est impossible de déjà quitter le lieu de cette révélation, boulversant et lumineux telle une épiphanie. Je m'adosse au mur épais qui forme l'embrasure de la fenêtre, mes jambes fléchissent sous moi, comme si j'étais devenu trop lourd du poids de ce qui vient de m'arriver, je sens mon dos glisser contre le mur rugueux, qui accroche mon pull et ma chemise, je ressens le contact des pierres froides sur ma peau ainsi découverte, je suis maintenant accroupi, dos au mur, afin de m'accoutumer à la densité du sentiment qui vient de se dévoiler à moi. Je revis les seize jours de gestation silencieuse et discrète, depuis ma première vision d'elle jusqu'à ce moment où elle a été à ma hauteur, devant cette fenêtre, ce moment préparé par ces jours mais encore débarrassé du futur, comme dans l'euphorie d'une naissance, où je ne me dis pas encore que cet amour est illégitime, à cause de qui je suis, à cause de ce que je suis.

J'ai dû rester une demi-heure dans cet état d'acceptation bienheureuse, le jour a définitivement quitté la scène.

Puis je le vois, lui sombre, venant après elle, si lumineuse, le loup, mon moi réprouvé, s'avançant vers moi, démarche feutrée, puissante, irrémédiable. Il glisse son museau entre mes jambes et mes cuisses, sous mes bras, il frappe mon torse de sa tête, il veut que je me relève et que j'oublie ce qui vient de m'arriver. Il me dit - Arrête de rêver, nous ne pourrons jamais aimer une femme normalement.

Mais comment pourrais-je abandonner cet amour nouveau-né, tout condamné qu'il soit ?

C'est pour cela que j'ai décidé de commencer le journal de mes jours à Hogwarts, pour qu'il puisse quand même avoir une existence, fût-elle de papier.