Auteur : Arsinoé de Blassenville
Traduction : benebu, avril 2005
Jeune fille lisant : portrait d'un préfet.
Chapitre premier : La salle de lectureHermione était passée devant ce tableau pendant des semaines. En bas de l'escalier venant de la salle commune de Gryffondor, après l'arche qui menait vers la bibliothèque, il y avait une pièce étroite et poussiéreuse qui s'ouvrait soudain en une alcôve vitrée accueillante. Elle avait parcouru le château jour après jour, nuit après nuit, à la recherche d'un endroit pour lire.
Le tableau était sur le mur sud, près du rebord de fenêtre aménagé en siège. Hermione aimait ce tableau, parce qu'il représentait une jeune fille en train de lire tranquillement, son profil pâle offert à la vue du spectateur. C'était une magnifique représentation de la Bibliothèque de Poudlard, et la jeune fille était assise à la table même, et dans la chaise même qu'Hermione préférait.
Elle avait trouvé cet endroit par accident, par un samedi après-midi ensoleillé pendant sa sixième année. Tout le monde était allé à Pré-Au-Lard pour une orgie adolescente de Bièraubeurre et d'achat de bonbons. Elle avait décidé de s'immerger dans l'histoire peu connue de Thulian Magus, quand elle fut distraite par une série persistante et subliminale de raclements de gorge et de soupirs. Elle leva les yeux pour voir Madame Pince qui la dévisageait.
« Oui, Madame Pince. Qu'est-ce qu'il y a ? »
« Mademoiselle Granger, il est presque quatre heures. » Hermione la regarda sans comprendre. Les horaires de la bibliothèque étaient affichés : de neuf heures à midi, et de une heure à cinq heures le samedi. « Mademoiselle Granger, » continua la bibliothécaire, « avez-vous remarqué que vous étiez la seule élève présente ? »
Hermione la regarda, désorientée parce qu'elle lui prennait son livre des mains. Il n'y avait pas un bruit dans la bibliothèque en dehors de leur conversation. Pas un élève de première ou deuxième année pour fureter entre les étagères, ou murmurer une discussion. Pas même le lot habituel d'élèves plus âgés qui avaient été privés de sortie à Pré-Au-Lard. Le temps clément les avait apparemment attirés vers d'autres activités. Hermione ouvrit la bouche, mais la bibliothécaire continua. « Est-ce que vous écrivez un devoir pour l'une de vos classes ? » Hermione secoua la tête. « Vous faites des recherches à la demande de l'un de vos professeurs ? »
« Non, Madame Pince, mais je… » commença Hermione en rougissant.
« Non, vous n'en faites rien. » La bibliothécaire plissa les yeux. « Vous me prenez mon temps avec votre lecture personnelle. Vous pourriez emprunter ces livres et me laisser profiter d'un week-end de répit de temps en temps. Au lieu de cela, vous me forcez à rester enchaînée à mon bureau par un magnifique après-midi. Vous pourriez lire dans votre chambre. Vous pourriez lire dehors. Vous pourriez lire dans la salle commune de Gryffondor. » Madame Pince se leva, brossant une poussière invisible de sa robe immaculée. « Je devrais parler au Directeur de fermer la bibliothèque les week-ends de sortie à Pré-Au-Lard. C'est absurde de la laisser ouverte pour une seule élève, et une élève qui n'en a même pas besoin pour ses devoirs. »
Hermione, maintenant rouge d'embarras, avait refermé ses livres et les avait apportés au bureau de la bibliothécaire, et elle attendait avec impatience pendant que la bibliothécaire passait sa baguette dessus, en la regardant sévèrement.
« Merci, » lâcha Hermione, avant de sortir furieusement de la bibliothèque en marmonnant. « Je pensais pouvoir avoir un moment de tranquillité dans la bibliothèque ! Je ne savais pas que j'avais besoin de ma SALLE DE LECTURE personnelle ! »
Au cri peu digne d'une dame de « SALLE DE LECTURE », une peinture quelconque de Helga Poufsouffle Soignant les Hobbits Purulents glissa sur le côté, révélant un hall étroit qui semblait éclairé dans le fond. Hermione s'avança prudemment, et elle vit une fenêtre gothique, ornée d'un vitrail représentant l'Arbre de Vie. Elle remarqua le renfoncement sous la fenêtre, qui formait un siège profond, et la poussière qui recouvrait tout, preuve que la salle n'avait pas été utilisée depuis longtemps, et réalisa qu'elle avait trouvé une pièce de Poudlard pour son usage personnel. Elle se détourna de la fenêtre et vit un grand tableau d'une jeune fille dans la bibliothèque de Poudlard. Elle s'approcha, et la fille leva les yeux et lui sourit brièvement, avant de retourner au livre qui était posé sur la table devant elle.
Depuis lors, elle avait réduit le temps qu'elle passait à la bibliothèque, mettant un point d'honneur à ne plus jamais être la dernière élève à en sortir. Il lui était facile d'emprunter les livres, d'attendre un moment que le couloir soit libre, avant de murmurer le mot de passe et de se glisser dans le couloir qui menait à sa retraite. Elle y avait depuis apporté des coussins, et elle s'installait confortablement sous la fenêtre. Un « Lumos !», et elle était dans sa salle de lecture personnelle, loin des règlements de Madame Pince, du bruit de la salle commune, et des imbécillités de ses camarades de chambre. Elle décida de garder ce secret même de Ron et Harry, ne voulant pas que son refuge secret ne devienne une annexe de la salle commune de Gryffondor.
Le temps passa, et elle étudiait et apprenait, pendant que la fille du tableau lui tenait compagnie en lisant près d'elle. Le silence régnait, interrompu seulement par le murmure des pages tournées par une jeune fille en chair et en os, et, plus discrètement encore, par une jeune fille dans un tableau.
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Peut-être que l'habitude avait émoussé sa discrétion. Peu avant Halloween, Hermione décida de rester lire un vendredi soir. Elle était pressée de se débarrasser de ses amis et de se plonger dans Ars Animagi. Se glissant hors de la bibliothèque, elle avait attendu dans l'ombre que le dernier élève ne sorte. Anthony Goldstein et sa piètre petite amie lambinaient, pendant que Tony se vantait, comme toujours.
« Nous autres préfets assumons une lourde tâche, Mandy, » se lamentait-il. « Le Professeur Flitwick m'a confié que j'ai toutes les chances d'être nommé préfet en chef l'an prochain. Les grands honneurs s'accompagnent de lourdes responsabilités. » Hermione leva les yeux au ciel.
« Oh, Tony, » compatit Mandy, en serrant la main sur la sienne, « j'aimerais tant savoir comment t'aider ! » Tony la regarda avec espoir, alors qu'elle s'appuyait contre le mur.
« Eh bien, Mandy, il y a bien quelque chose que tu peux faire… Quelque chose qui signifierait tant pour moi…. » Il s'interrompit au bruit de pas rapides et bottés qui s'approchaient de la bibliothèque. « Hé ! » Mandy le regardait, interloquée. Tony attrapa son bras et la tira dans l'autre direction. « C'est Rogue ! » souffla t'il. « Vite ! »
Ils disparurent tous deux, pendant qu'Hermione se ruait vers le tableau à la gloire des Poufsouffle, donnait le mot de passe, et traversait en courant le couloir décrépit. Elle marmonna « Lumos ! » étala ses livres autour d'elle, s'installa confortablement au milieu des coussins, et se plongea dans l'étude de la Transfiguration Personnelle Avancée.
Elle avançait à un bon rythme, passant en revue les techniques de méditation nécessaires à la visualisation d'un alter ego animal. Peut-être que cette année, le Professeur McGonagall acceptera de m'apprendre. Quel animal serai-je ? Elle s'imagina en chat. Oups, ça risque de créer des situations embarrassantes avec Pattenrond, je ne crois pas être prête à ça ! Elle ne pouvait pas s'imaginer en chien. Je ne suis simplement pas une fille à chiens. J'espère que je ne suis pas un serpent ou quelque chose comme ça. Je n'aime même pas les reptiles au zoo. Un oiseau, peut-être ? Ca pourrait compenser mon manque de talent pour le vol. Oui, j'aimerais bien un oiseau. Une hirondelle, un rouge-gorge, ou quelque chose de plus grand ? Une cigogne, un corbeau, une grande CHAUVE-SOURIS NOIRE !
« Merlin ! » s'exclama t'elle, en posant une main sur son cœur.
« Non, Miss Granger, je ne crois pas. Qu'est-ce que vous faites ici ? » Penché vers elle, La Grande Chauve-Souris Noire elle-même le fixait avec son regard patenté. Hermione se leva maladroitement de son recoin, laissant tomber Ars Animagi dans un nuage de poussière. Je ne l'ai même pas entendu. Comment est-ce qu'il FAIT ça ? Oh, Circé, j'ai oublié de refermer le tableau derrière moi. Idiote, idiote, idiote !
« J'étudie, Professeur Rogue, » bredouilla t'elle, la voix faible et gamine dans le silence. Il marqua une pause, et leva un sourcil avec un sourire moqueur.
« Tout ce que j'ai vu, c'est que vous jetiez un livre de valeur appartenant à Poudlard sur le sol poussiéreux. C'est une interprétation intéressante du terme 'étudier'. Prévoyez-vous de maltraiter d'autres volumes de la même manière ? Allez-vous également les piétiner ? Et pourquoi ici ? Est-ce que la salle commune de Gryffondor à été détériorée par vos amis ? Peut-être que votre dortoir a été saccagé par les Vandales, les Goths, les Weasley, ou les Potter ? »
« Je cherchais simplement un endroit tranquille, Monsieur, et j'ai vu cette porte ouverte… »
« Le couvre-feu est passé, Mademoiselle Granger, » dit-il sans amabilité. « Il y a plus d'une demi-heure. Même un préfet de Gryffondor devrait avoir plus de respect pour les règlements qu'elle connaît depuis des années. Vous venez de perdre vingt points pour votre maison. Vingt-cinq, » corrigea t'il, en voyant Ars Animagi par terre. « Maintenant rassemblez ces livres aussi soigneusement que vous en êtes capable et retournez dans votre dortoir immédiatement. »
Il se tenait à côté d'elle, tout en noir et intimidant, ne faisant pas un geste pour l'aider, alors qu'elle ramassait prestement Ars Animagi pour l'ajouter à la pile de livres qu'elle avait rassemblés sur le siège de la fenêtre. Elle osa un regard vers Rogue, qui regardait curieusement vers l'alcôve. Il se plaça devant le tableau, et son visage se figea.
« Est-ce que je dois arrondir à trente points, Mademoiselle Granger, ou allez vous bouger ? » articula t'il, sa voix de baryton curieusement altérée. Hermione se pressa, les bras pleins de livres. Elle accéléra devant le tableau et fila jusqu'à la tour de Gryffondor, laissant derrière elle un Maître des Potions irrité.
Il se retourna vers le portrait de la jeune fille dans la bibliothèque. Il lui ressemblait beaucoup. Pâle, des traits délicats, d'épais cheveux roux retenus en arrière et lui tombant presque jusqu'à la taille, une cravate Gryffondor nouée autour d'un long cou gracieux.
La jeune fille leva les yeux, regarda à deux fois, et demanda, choquée « Severus ? Est-ce que c'est toi ? »
Rogue s'éclaircit la gorge. « Bonsoir, Lily. »
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revu et corrigé le 07/09/05