Disclaimer : les personnages sont de JK Rowling, l'histoire de Ramos. Lien vers les fics de l'auteur dans mes favoris.

Titre original : Unfinished Business.
Classement de la Guilde des Romantiques : quatre cœurs brisés.

Traduction benebu, février 2006 - mai 2007.


« Hermione, » souffla Neville Londubat, « y'a pas un truc qui cloche avec ces fleurs ? »

« Non, » répondit-elle sur le même ton, en remuant leur chaudron avec précaution et en vérifiant que le Professeur Snape n'était pas à portée de voix. « Elles sont exactement comme sur la gravure du livre, non ? »

« Oui, c'est vrai, » admit Neville, « mais c'est juste que je leur trouve un truc. »

« Est-ce que tu veux aller demander au Professeur Snape si tu peux en avoir d'autres ? Tu l'as entendu dire combien il avait eu du mal à se procurer ces boutons de Belles de Nuit. »

Haussant les épaules, Neville ajouta les têtes de fleurs séchées dans leur potion. En quelques secondes, la concoction vira au bleu. Il tâta la gelée épaisse du dos de sa louche, regardant la surface iridescente se rider en espérant que, juste une fois, le Professeur Snape trouve quelqu'un d'autre à torturer. Hélas, ce ne serait pas pour aujourd'hui.

« Eh bien, » ironisa une riche voix de baryton, faisant sursauter les deux élèves. « On a déjà fini, Miss Granger ? On avait encore besoin de faire son intéressante ? »

« Oui, Monsieur. Je veux dire, non, Monsieur, » balbutia Hermione. Même maintenant, à la moitié de leur dernière année, Snape continuait à leur mener la vie dure à la moindre occasion.

« Si vous avez fini, et si vous avez tout fait correctement, ce dont je doute, cette potion devrait vous endormir pour quelques instants. Lequel de vous deux va la tester ? »

« Je vais le faire, » annonça Hermione avec détermination, avant que Snape ne puisse terrifier Neville plus avant. Elle préleva une dose de la mixture bleue, prit une profonde inspiration, et à la réflexion positionna le tabouret du laboratoire de façon à tomber dessus, avant de boire une gorgée de la potion. Les yeux noirs de Snape furent la dernière chose qu'elle vit avant de sombrer dans l'inconscience.

« Bon, d'accord, elle fonctionne, » aboya Snape quand Hermione s'écroula sur le plan de travail, faisant tomber la louche sur le sol. Il se pencha sur le chaudron. « Mais je retire cinq points quand même, parce qu'elle n'a pas la bonne couleur. Elle devrait être bleu nuit, pas bleu marine. Maintenant, réveillez votre partenaire et nettoyez-moi ça. »

« Oui Monsieur, » bredouilla Neville. Il tendit la main pour secouer Hermione. Elle ne réagit pas. Il la secoua de nouveau, avec un peu plus de vigueur. « Hermione. Réveille-toi. »

« Est-ce que même réveiller votre camarade est au delà de vos compétences, Monsieur Londubat ? » demanda méchamment Snape. Ses longs doigts se saisirent du bras d'Hermione et il la secoua sans ménagement. « Réveillez-vous, Miss Granger ! »

Au lieu de se réveiller, Hermione glissa en arrière. La seule chose qui l'empêcha de tomber au sol tête la première fut la prise de Snape sur son bras.

Mais tomber ou pas n'aurait fait aucune différence, au bout du compte.

« Comment ça, je suis morte ? Qu'est-ce que vous entendez par 'vous êtes morte' ? » Hermione, les mains sur les hanches, tapait du pied. Seulement, l'effet tombait un peu à plat parce que son pied incorporel ne faisait pas de bruit sur le sol.

La Dame Grise poussa un petit soupir d'exaspération. « Nous vous l'avons expliqué à plusieurs reprises déjà. Vous avez été empoisonnée par la dernière potion de Neville Londubat. »

« La dernière potion de Neville ? Il est mort lui aussi ? »

« Non, » répondit le fantôme de Serdaigle. « Le Professeur Snape a demandé à tous vos camarades d'arrêter ce qu'ils faisaient, et il a scellé la salle de classe quand il n'a pas réussi à vous réveiller. »

« Alors ce n'était pas la dernière potion de Neville, pas vrai ? » Hermione se concentra sur ce point. « Il préparera d'autres potions. » La Dame Grise soupira une fois encore.

« C'est toujours comme ça au début, » intervint Sir Nicholas. « Les nouveaux défunts ont un peu de mal à s'adapter au début, mais ils finissent toujours pas se faire à la situation. »

« Défunt ? » Hermione fulminait. « Je n'ai même pas encore passé mes ASPICs ! Comment pourrai-je être morte ? »

« Comme nous vous l'avons dit et répété, Hermione – je peux vous appeler Hermione ? – vous avez été empoisonnée. C'était un accident, bien sûr, mais il n'en demeure pas moins que vous n'avez plus votre place parmi les vivants. »

« Vous êtes l'une d'entre nous maintenant, » annonça gaiement Sir Nicholas. « Ca va être si bien, d'avoir un nouveau fantôme dans le château. Nous n'avons pas eu de nouveau membre depuis que Mimi Geignarde a rejoint notre petite famille. »

« Mais je ne VEUX pas être un fantôme, » s'obstina Hermione. « J'ai encore des choses à faire ! Je n'ai pas fini mes études – et Voldemort est toujours dans les parages. »

« Vous vous rendrez compte que ces choses comptent moins pour vous aujourd'hui qu'autrefois, » essaya de la calmer la Dame Grise. « Après tout, ce sont des préoccupations de mortels. »

« Mais je suis encore vierge ! » s'écria Hermione, apprenant à cette occasion que les fantômes pouvaient rougir. La Dame Grise semblait approuver, mais les joues de Sir Nicholas prirent une drôle de teinte gris-argent.

Levant les yeux au ciel, Hermione tourna le dos aux deux fantômes amicaux et commença à errer dans les couloirs déserts. Elle s'aperçut qu'il était affreusement tard, elle pouvait voir le clair de lune qui passait par les fenêtres hautes et étroites. Elle ne savait pas exactement à quel endroit du château elle se trouvait, mais elle était incontestablement à Poudlard. Elle se souvenait vaguement d'avoir emprunté ces couloirs, dans un sens ou un autre, mais ça ne lui fut d'aucune aide.

Elle continua ses pérégrinations, et finalement trouva un escalier qui descendait, puis un autre. Bientôt, elle se retrouva en territoire connu : le couloir qui menait à la Grande Salle.

« Vous pouvez traverser les murs maintenant, vous savez ? » intervint une voix amicale.

Hermione sursauta et laissa échapper un petit cri.

Sir Nicholas avait l'air un peu blessé. « Vraiment, Miss Granger. J'essayais seulement de rendre service. »

« Je suis désolée, Sir Nicholas. Vous m'avez surprise. » Elle fit la moue en voyant que ses chaussures étaient à un vingtaine de centimètres du sol, et qu'elle était en train de flotter dans les airs, mais un effort de concentration lui permit de redescendre pour se retrouver de nouveau les deux pieds au sol.

« Eh bien, vous êtes l'une d'entre nous maintenant, chère demoiselle. Vous aussi vous pouvez surprendre les autres. C'est l'un des avantages d'être vitalement contrarié. »

« Formidable, » marmonna t'elle sans conviction. « Mais ce que je voudrais vraiment, ce sont des réponses. La dernière chose dont je me souvienne, c'est du cours de Potions. Je vais commencer par là, et voir ce que je peux trouver. »

« Excellente idée, Miss Granger. Après tout, plus vite vous vous ferez à votre nouvelle condition, mieux vous vous sentirez. N'hésitez pas à faire appel à moi si vous avez besoin d'aide ! » Sir Nicholas essaya d'ajuster son col de travers et lui fit un grand sourire.

Hermione réussit à lui adresser un sourire crispé, et s'éloigna, pleine de pensées rageuses sur ce que le gentleman qu'elle quittait pouvait aller rajuster.

Les escaliers qui menaient aux cachots étaient dans le noir total, mais ça ne posa pas le moindre problème à Hermione. En fait, maintenant qu'elle y pensait, elle n'avait pas peur de trébucher, elle n'avait pas faim, ni soif, elle n'était pas fatiguée ou quoi que ce soit. Elle était irritée, c'est vrai, mais certainement pas inquiète.

Devant la porte de la classe de potions, Hermione s'arrêta pour frapper, et vit son poing pâle et transparent. Elle regarda ses deux mains, écartant les doigts, mais ils étaient les mêmes que d'habitude, sauf qu'elle pouvait voir à travers. La manche de sa robe noire était tachée, Ron y avait renversé de la sauce au déjeuner. Son petit badge de Préfète en Chef était un peu de travers, parce qu'elle s'était habillée en vitesse, son dernier matin. Son uniforme, après inspection, était convenable, même si une de ses chaussettes descendait un peu. Comment une chaussette fantôme pouvait-elle perdre son élastique ? Haussant mentalement les épaules, Hermione leva le poing une fois de plus pour frapper.

Il passa à travers la porte. « Oh, zut, » se dit-elle. Elle prit une inspiration inexistante, ferma les yeux, et plongea à travers la porte.

Elle ouvrit les yeux avec précaution une fois de l'autre côté, et poussa un soupir de soulagement. La classe était vide, bien entendu, mais il y avait de la lumière qui passait sous la porte qui menait au bureau du Professeur de Potions. En approchant, elle put voir Severus Snape assis à son bureau, en train de corriger des copies. Ses cheveux noirs lui pendaient devant le visage, et ses traits secs et anguleux semblaient plus impressionnants encore à la lueur de la bougie.

Puisqu'elle ne pouvait pas frapper, Hermione s'éclaircit la gorge. « Professeur Snape ? »

« Il est tard, Miss Granger, bien après le couvre-feu. J'espère que vous avez une excellente raison… » Il s'interrompit tout à coup. « Miss Granger ? » interrogea t'il, sa voix de baryton montant soudain dans la gamme des ténors. De surprise, il renversa son encrier.

Avec un juron étouffé, il redressa le petit pot d'argent, et laissa la main dessus, comme s'il avait peur qu'il mette à courir sur son bureau. « Miss Granger, » répéta t'il, d'une voix plus contrôlée. « Voilà un développement inattendu. » Il leva la main et regarda l'encre en couler avec dégoût.

« Sans blague, » répliqua t'elle, un peu exaspérée. « Imaginez ma surprise. »

Le regard perçant de Severus ne l'impressionna pas le moins du monde. « J'avais espéré, Monsieur, que vous voudriez bien m'expliquer ce qui m'est arrivé. Depuis combien de temps est-ce que je suis morte ? Qu'est-ce qui s'est passé ? »

« Ah, » dit-il, ce qui ne l'aidait pas. Puis il indiqua la chaise qui faisait face à son bureau d'un geste de sa main tachée d'encre. « Asseyez-vous, je vous prie. »

Hermione approcha de la chaise de bois un peu nerveusement, mais réussit à s'asseoir dessus plutôt que de passer à travers. Elle sourit, soulagée, et accorda toute son attention au Maître de Potions qui s'essuyait les doigts avec un mouchoir blanc.

« Pour répondre à votre première question, Miss Granger, vous êtes morte il y a une semaine. Vendredi. Vous travailliez sur une potion avec Neville Londubat. »

« Les Gouttes de Nuit instantanée, » confirma Hermione, fronçant les sourcils à mesure qu'elle se souvenait. « Mais nous l'avions réussie ! » protesta t'elle.

« Oui, c'est vrai, » admit Snape à regrets. « Cependant, au lieu de vous endormir, vous en êtes morte. Quasi-instantanément, en fait. Suivant la suggestion de Mr Londubat, j'ai demandé au Professeur Chourave d'examiner les bourgeons de Belle de Nuit que j'avais distribués. Il s'avère qu'ils étaient contaminés par un parasite quelconque. »

Il marqua une pause, et déglutit. « En fait, Miss Granger, vos camarades de classe doivent probablement la vie au fait que vous ayez fini et testé votre potion avant tout le monde. Si vous aviez tous testé vos potions en même temps, toute la classe serait probablement morte en quelques minutes. »

« Oh, » répondit Hermione, soulagée que toute sa classe n'ait pas été exterminée, mais toutefois moins que ravie de son propre sort. « Eh bien, j'imagine que votre fournisseur a entendu parler du pays, » conclut-elle un peu sèchement.

« C'est le moins qu'on puisse dire, » répondit-il avec une douceur trompeuse. « Je crois qu'il prévoit de créer une bourse d'études en votre nom. »

« Oh, Mon Dieu ! » s'exclama t'elle, se souvenant soudain. « Et mes parents ? Et Harry, et Ron ? Ils doivent être dans tous leurs états ! »

« Vos parents étaient assez bouleversés, » admit Snape. « Ils ont récupéré votre corps après la cérémonie du souvenir, lundi. Vos funérailles ont eu lieu hier après-midi. Vos amis étaient présents, et la plupart de vos professeurs aussi. »

« Vous êtes allé à mon enterrement ? » demanda t'elle, surprise.

Il eut l'air un peu embarrassé. « Vous êtes morte dans ma classe, Miss Granger. Etre présent à votre enterrement était la moindre des choses que je pouvais faire. »

« Comment vont Harry et Ron ? » demanda t'elle, doutant que l'homme qui lui faisait face s'en inquiète assez pour pouvoir répondre. « Je ne peux pas imaginer à quel point ils doivent être perturbés. »

« Ils… Ils s'accrochent, je crois. »

« Il faudrait que j'aille les voir, » pensa Hermione à voix haute.

« Il est très tard, Miss Granger, » lui fit remarquer Snape. « Vous devriez peut-être attendre demain matin. »

« Oh, vous avez certainement raison. » Hermione pencha la tête sur le côté, pensive. « Pourquoi vous montrez-vous si gentil ? » demanda t'elle. « Vous êtes bien plus méchant d'habitude. » Au moment où elle prononça ces mots, elle aurait voulu pouvoir les retirer, du moins jusqu'au moment où elle saurait si les fantômes pouvaient perdre des points pour leur ancienne maison.

« Vous êtes morte, Miss Granger, et c'est grâce à vos actions, et non aux miennes, que le reste de votre classe n'a pas subi le même sort. Vous pouvez certainement comprendre que je me montre patient avec vous en de telles circonstances ? » Derrière ces mots sans aigreur, la personnalité habituelle de Snape refaisait peu à peu surface.

« Je suppose, » concéda t'elle.

« Bien. Maintenant, disparaissez. J'ai des choses à faire, et aucune d'entre elle n'inclut de vous laisser gaspiller plus de mon temps. »

Hermione ne fut pas surprise que Snape retrouve soudain son attitude habituelle. En fait, elle était plus étonnée qu'il ait pris la peine de répondre à ses questions. Elle se leva de la chaise, sans faire attention au fait que ses pieds étaient à quelques dizaines de centimètres du sol.

« Merci, Monsieur. J'espère que je ne vous ai pas trop dérangé. »

Il ne daigna pas répondre à ces dernières paroles, et Hermione sortit de son bureau, plongeant à travers la porte après seulement une petite hésitation. Par contre, elle hésita, au dehors, se demandant ce qu'elle allait pouvoir faire.

Elle passa les heures qui suivirent et le petit matin à explorer les cachots, passant la main, puis la tête à travers les murs au hasard, trouvant parfois un cagibi ou un autre couloir. L'ironie du fait qu'elle avait maintenant un accès illimité aux réserves d'ingrédients de Snape, alors qu'elle ne pouvait plus rien en faire, ne lui échappa pas. Le temps qu'elle prenne suffisamment d'assurance pour plonger aveuglément à travers les murs, les premiers rayons de soleil commençaient à filtrer à travers les petites fenêtres de ce qu'elle supposait être le dortoir des Serpentards, d'après les rideaux verts et argents qui pendaient aux lits.

Plusieurs élèves et professeurs arpentaient déjà les couloirs, et Hermione se fraya un chemin parmi eux pour se rendre à la Tour de Gryffondor. Il était malpoli pour un humain de passer à travers un fantôme, et elle se figura que l'inverse était vrai également. Elle ne se souvenait pas qu'un fantôme l'ait traversée de son vivant, mais il fallait dire qu'elle n'avait jamais fait attention à eux. Maintenant, elle le regrettait.

La Grosse Dame n'eut que le temps de prendre une inspiration surprise avant qu'Hermione ne la traverse pour entrer dans la salle commune. Il y avait plusieurs élèves dans la salle, mais ils avaient l'habitude de voir des fantômes. Personne ne leva les yeux quand elle entra, et personne ne vit que leur ancienne Préfète en Chef était devenue un fantôme.

Le dortoir des garçons de septième année était en haut des escaliers. Hermione ne se fatigua pas à essayer de frapper, mais passa à travers la porte. Seamus Finnigan poussa un cri aigu en la voyant, et serra précipitamment ses robes sur son caleçon.

« Harry et Ron ne sont pas là ? » demanda t'elle, en balayant du regard le dortoir vide.

« Entraînement, » croassa Seamus après un moment, en désignant de la main le terrain de Quidditch, pour se recouvrir aussitôt avec sa robe qui avait glissé.

« Ne t'en fais pas, Seamus, » le rassura Hermione. « Je n'étais pas intéressée l'année dernière, et je ne le suis certainement pas cette année. » Elle recula et disparut de la vision de Seamus avant qu'il ne puisse articuler une réponse.

Le terrain de Quidditch était du côté ouest de l'école, et la structure massive du château bloquait quasiment toute la lumière du soleil levant. Hermione hésita sur le seuil, se demandant si elle pourrait sortir du bâtiment ou non, mais elle ne ressentit aucune résistance quand elle mit le pied sur le gazon. Même si la rosée semblait fraîche sous son pas, elle ne laissait pas d'empreintes derrière elle.

Elle trouva les deux garçons en train de se traîner avec morosité le long du terrain de Quidditch, leurs balais sur l'épaule. Tout dans leur allure, leurs épaules basses, le silence lourd qu'ils partageaient, dénotait de leur état d'esprit actuel. Un temps, Hermione eut une réticence à s'immiscer dans leur chagrin, jusqu'à ce qu'elle se souvienne de sa raison probable.

« Harry ? Ron ? » appela t'elle doucement.

Les garçons s'arrêtèrent. Nerveusement, ils s'entre-regardèrent, puis, rassemblant visiblement leur courage, se retournèrent pour regarder derrière eux. Leurs cris furent remarquablement semblables.

« Oh, c'est pas vrai ! » les rabroua Hermione. « Qu'est-ce qui ne va pas chez vous ? On a vu des fantômes tous les jours depuis qu'on est arrivés à Poudlard ! »

« Her-Her-Her, » bégaya Ron.

« Hermione ! » réussit à dire Harry.

« Tu es un fantôme ! » dirent-ils à l'unisson.

Hermione leva les yeux au ciel. « L'avenir du monde magique, vraiment. »

« Tu es un fantôme ! » répéta Ron. « Un vrai fantôme, un vrai de vrai. »

Comme un seul homme, les deux garçons essayèrent de la prendre dans leurs bras, et ne réussirent qu'à s'étreindre l'un l'autre parce que leurs bras passèrent à travers elle.

« Beurk, » commenta Ron en s'extrayant des bras de Harry.

Harry remonta ses lunettes. « Eh bien, je suis content de te voir, même si je ne peux pas te serrer dans mes bras. Tu nous a tellement manqué, Hermione. »

« Oui, » confirma Ron, la gorge nouée. « Tu nous a vraiment manqué. Ça a été terrible. Pendant toutes ces années, on a été terrifiés que Harry se fasse enlever par Tu-Sais-Qui, et c'est toi qui meurt empoisonnée par des fleurs débiles. »

« Eh bien, tu m'en vois désolée. Je suis loin d'être ravie, de mon côté. »

« Comment est-ce que ça s'est passé ? » demanda Ron. « Tu es morte ! »

« D'après la Dame Grise, il me restait des choses à faire, alors je suis devenue un fantôme. »

« Quel genre de choses à faire ? » demanda Harry.

« Eh bien, j'ai été un peu obsédée par les ASPICs ces dernières semaines. »

« …ces derniers mois… » marmonna Ron.

« Alors… Me voilà. » Hermione leur tendit les bras, comme pour se désigner elle-même. « Je voudrais pouvoir vous serrer dans mes bras. » confessa t'elle.

« Moi aussi, » répondit Harry. « Mais de t'avoir ici, comme ça… ça fait un peu moins mal déjà. »

« Oui. C'est toujours moche, mais je suis content de t'avoir avec nous, » dit Ron, l'ombre d'un sourire sur son visage triste. Harry aussi avait l'air plus heureux.

Hermione leur rendit leurs sourires, toute aussi contente de retrouver ses amis. Une autre idée lui traversa l'esprit, alors qu'elle repoussait une mèche de cheveux. « Est-ce que vous pourriez prévenir mes parents pour moi ? J'ai un peu de mal à tenir une plume pour le moment, mais j'aimerais leur envoyer un mot. »

« Bien sûr, » affirma Harry. « Mais je ne suis pas sûr que ça rende les choses beaucoup plus faciles pour eux. Ce n'est pas comme si tu pouvais aller leur rendre visite après tout. »

« Je ne peux pas ? » se demanda Hermione à voix haute. « Les fantômes n'ont pas le droit de voyager ? Ou est-ce qu'ils en sont incapables ? »

« C'est pas vrai, elle est morte, et elle continue à poser des questions, » grogna Ron, un sourire joyeux, soulagé lui éclairant le visage. « J'imagine que tu vas vouloir vérifier ça à la bibliothèque, pas vrai ? »

« Bien sûr, » répondit Hermione avec un sourire malicieux. « J'ai des tonnes et des tonnes de choses à apprendre. »

Un voix venant du terrain appela Harry et Ron, et ils répondirent d'un signe du bras.

« Il faut qu'on y aille, » expliqua rapidement Harry. « On a déjà manqué deux entraînements, et si j'en manque un troisième je vais devoir démissionner de mon poste de capitaine de l'équipe. »

« On te retrouve à la bibliothèque après le déjeuner, » lui proposa Ron. « Ca fait vraiment du bien de te voir, Hermione. Je suis content de savoir que tu seras toujours dans les parages. »

Hermione leur fit signe de la main pendant qu'ils couraient vers le terrain de Quidditch, le cœur plus léger de voir que leur pas avaient retrouvé une vigueur nouvelle maintenant qu'ils savaient qu'elle était toujours leur amie et confidente, même si elle n'était plus tout à fait la même. Souriant toute seule, elle retourna au château, et réalisa combien le simple fait de se retrouver à l'intérieur de l'édifice massif lui donnait le sentiment d'être à l'aise et en sécurité.

Quand elle se retrouva de nouveau devant la porte de la Tour de Gryffondor, elle se souvint de s'excuser auprès de la Grosse Dame avant de traverser le portrait. Elle n'avait pas la moindre idée du mot de passe, et elle s'en fichait complètement. La salle commune était déserte, ce qui fit penser à Hermione qu'on devait être samedi. Les autres Gryffondors étaient au petit déjeuner ou faisaient la grasse matinée.

A l'étage, elle fut un peu choquée de voir qu'il n'y avait plus que deux lits dans la chambre qu'elle avait partagée avec Parvati Patil et Lavande Brown pendant six ans. A l'endroit qu'avait occupé son lit ne restaient que quelques cartons dont l'un contenait ses livres de cours. Aucune trace de son coffre ni de ses vêtements, et même les bols de nourriture et d'eau fraîche de Pattenrond avaient disparus. Elle accorda une pensée au chat qui avait été son compagnon pendant cinq ans, et se dit que ses parents avaient dû l'emmener à la maison avec eux.

La voix de ses deux anciennes camarades de chambre se fit entendre dans les escaliers, et Hermione se redressa, s'attendant à des retrouvailles émouvantes avec ses amies. Au lieu de ça, les filles entrèrent dans la pièce en continuant de discuter, et aussitôt qu'elles virent la silhouette fantomatique d'Hermione, laissèrent tomber leurs affaires de toilette et se mirent à hurler.

« Oh, fermez-là, toutes les deux ! » ordonna t'elle.

Contrairement à Harry et Ron, les deux filles se contentèrent de changer de note et hurlèrent plus fort encore, s'accrochant désespérément l'une à l'autre avant de se souvenir qu'elles avaient des pieds et de se sauver à reculons vers la porte. Le bruit, cependant, avait attiré l'attention des autres Gryffondors qui revenaient du petit-déjeuner. Une foule curieuse commença à se rassembler dans le couloir.

« Vous voyez, je ne suis pas fou ! » s'exclama Seamus, complètement habillé maintenant. Il désigna Hermione du doigt. « Je vous avais dit que je l'avais vue ! » A côté de lui, Neville et Dean acquiescèrent.

« Que signifie ce charivari ? » demanda une vois sévère. Les étudiants se rapprochèrent à regrets de la Directrice de leur Maison. Le Professeur McGonagall écarta de son chemin une sixième année, et s'arrêta net au seuil de la pièce. « Dieu du ciel, » s'exclama t'elle en voyant Hermione debout devant les boites contenant ses affaires.

« Bonjour, Professeur, » dit-elle poliment.

McGonagall ouvrit et ferma trois fois la bouche avant de réussir à articuler un son. « Bonjour. Etes-vous le fantôme d'Hermione Granger ? »

Amusée par la tournure de la phrase, Hermione acquiesça.

« Je vois, » répondit la vieille sorcière. « Et quelles sont vos intentions ? »

« Je n'ai aucune intention, » répondit Hermione, perplexe. « Je viens juste de me réveiller, ou de me matérialiser, ou je ne sais pas quoi. Je voulais savoir ce que j'avais manqué. » Elle désigna les boites qui contenaient l'intégralité de son parcours scolaire. « Apparemment, j'arrive trop tard pour faire une différence quelconque. »

« Vous vous inquiétez pour vos livres ? » résuma brièvement le Professeur McGonagall. « Vous voulez que nous en fassions quelque chose ? »

Un peu exaspérée, Hermione croisa les bras. « Rien de spécial. Ginny Weasley peut les prendre, si elle en veut. »

« Miss Weasley ! » appela McGonagall sans se retourner. « Avancez, s'il vous plait. »

La jolie rouquine apparut à la porte et fit un timide signe de la main. « Salut Hermione. Comment vas-tu ? »

« Apparemment, je suis morte, » répondit Hermione avec un sourire. Celui que lui rendit Ginny était un peu crispé, et Hermione soupira. « Est-ce que tu voudrais de mes livres ? Tu n'en auras pas besoin avant l'année prochaine, mais j'aime autant te les donner à toi. Visiblement, mes parents… » La voix d'Hermione se brisa soudain, mais elle se força à continuer, « …mes parents n'ont pas souhaité les emmener. »

Ginny acquiesça et lévita le carton de livres d'un mouvement de baguette. Les élèves pressés derrière McGonagall s'écartèrent pour laisser passer la boite.

Une fois Ginny partie, McGonagall fixa fermement Hermione une fois de plus. « Pour le reste de vos affaires ? »

« Je m'en fiche, » répondit Hermione. « Attendez… Qu'est devenue ma baguette ? » Elle chercha dans ses robes, mais les poches de son uniforme étaient vides.

« Votre baguette a été incinérée pendant votre cérémonie du souvenir, » l'informa McGonagall. « Est-ce que vous avez besoin de savoir autre chose ? »

Je voudrais savoir pourquoi vous vous comportez de façon tellement étrange, pensa Hermione. Mais elle n'en dit rien, et secoua la tête.

« Dans ce cas, Miss Granger, je vous rappelle que les fantômes de Poudlard n'ont pas le droit de hanter les quartiers des élèves : ni la salle commune, ni les dortoirs. Vous êtes libre de hanter le reste du château, mais la Tour de Gryffondor vous est interdite.

Hermione eut l'impression qu'on venait de lui donner une gifle. Pire, elle eut l'impression qu'elle venait d'être reniée. Dévisageant les traits sévères et sans compromis de McGonagall, et les visages mal à l'aise et gênés de ses camarades, Hermione ne trouva personne pour la regarder dans les yeux.

« Je comprends, » murmura t'elle. Sans vraiment savoir comment, Hermione disparut de leur vue.