Posté le : 29 Octobre 2014. Bien du temps est passé, dis donc. JE DÉDICACE CE CHAPITRE À SAM. PARCE QUE C'EST SAM.


Note d'auteur : « Attention mesdames et messieurs, dans un instant, ça va commencer. Installez-vous dans votre fauteuil bien gentiment. (…) C'est toujours la même histoire depuis la nuit des temps. » Bon, ok je calme ma race. Mais ça fait tellement longtemps que j'avais envie d'écrire ce bonus et aujourd'hui, touchée par le saint chrême, j'arrive enfin à finir ce motherfucking chapitre. Même si ça n'en est pas réellement un, ça fait super plaisir de retrouver les personnages du Baba.

J'ai profité de ce bonus pour aborder des thématiques que je n'avais jusqu'ici pas abordées (même si dans ma tête, la fic continue de s'écrire dans les tréfonds de mon cerveau, comme une espèce de compteur jusqu'à la fin du monde (ok, c'est creepie mais j'y peux rien)). Depuis la dernière publication qui remonte en 2012, il s'est passé un milliard de trucs dans ma vie que je ne pourrai citer et puis bon, merci quoi, c'est pas le journal de Bridget Jones.

Pour ce qui vous concerne, hormis le fait que je sois célibataire *regard entendu vers la foule*, j'ai de nouvelles fics en cours, dont la monstrueuse Nyx is watching you. J'ai aussi mon bichon A Dragon in the Wind, qui retrace la saga, mais avec Draco à Gryffondor. Un zabnott *bave* et tout plein d'autres trucs. Bref, allez voir mon profil, reviewez, etc. En parlant de reviews, j'en reçois des fantastiques sur cette fic, même si elle est finie depuis des années. C'est très dur (voire impossible) pour moi d'y répondre, car je réponds en priorité aux commentaires de mes fics en cours. Mais ça ne veut pas pour autant dire que je ne les lis pas, qu'elles ne me font pas sourire comme un gnome pendant des heures, que je ne suis pas nostalgique de cette période, etc.

Écrire un bonus est une manière globale pour moi de toutes et tous vous remercier de m'avoir suivie, de continuer à le faire à travers le temps et l'espace *les sœurs Halliwell, sortez de ce corps*. J'espère que vous n'êtes pas trop déçus de ne pas avoir obtenu de réponse alors que vous m'écrivez de si gentils mots. Malheureusement, je n'ai pas encore de Dobby pour gérer ma correspondance à ma place. Mais promis, j'en achèterai bientôt un (haha, joke).

Sinon... euh, vous pouvez rejoindre mon groupe facebook « The Baba O'Riley » (eh oui, il porte le nom de cette gentille fic). J'y suis tous les jours et quasi H24. Je dors, mais les yeux ouverts donc ça me permet de me dédoubler (just kidding). Je croise les doigts très, très, très forts pour que ce bonus vous plaise. Ce n'est jamais évident de ce remettre dans le bain après un laps de temps aussi énorme. J'attendrai telle une taupe vos commentaires. En attendant, bonne lecture à tous. Et à la revoyure !

p-s : Ce chapitre n'est pas corrigé. Je voulais tellement poster au plus vite que je me suis dit « Allez, on s'en fout. C'est le Baba. Je peux entrer les pompes crottées. »


BABA O'RILEY

Bonus Track : Part. III

« C'est dans ses rêves que l'homme trouve la liberté,

cela fut, est, et restera la vérité. » – Le cercle des poètes disparus.

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Un silence de plomb régnait dans la salle. Blaise lançait des regards éloquents en direction de Aleksei qui filmait la performance, tout en se mordant les lèvres. Il était devenu si difficile pour lui de se retenir d'éclater de rire que ses joues étaient couvertes de larmes. Un couple d'octogénaires étaient outrageusement penchés en avant, comme s'ils n'avaient jamais vu quelque chose de semblable au cours de leur très longue vie.

Mel était également sorti de sa caverne et marmonnait de temps à autre dans sa barbe des choses comme « Non, je ne peux pas assister à ça » ou encore « C'est insupportablement long ». Draco, accoudé contre un pilier, ne regardait pas devant lui, mais plutôt sur le côté, comme s'il défiait quiconque de dire quoi que ce soit de déplacé. Il mâchait si vite son chewing-gum qu'il se mordit la langue puis poussa un juron.

– Chut ! s'exclama une amatrice d'art qui, elle aussi, enregistrait tout sur son téléphone portable.

Cette dernière était accroupie, à quelques centimètres de l'énorme bâche en plastique qui recouvrait les deux tiers de la salle. Au milieu de celle-ci se trouvait Harry, uniquement vêtu d'un string couleur nude. Il trempait de temps à autre ses fesses dans des bacs de peintures bleues, rose ou orange, puis étalait son postérieur sur la gigantesque toile de papier en des mouvements lascifs et savamment calculés. De loin, on aurait cru qu'il faisait l'amour à son œuvre et Aleksei était désormais pris de spasmes convulsifs, lui faisant trembler la caméra qu'il tenait au poing.

– C'est une pépite d'or ! glapit-il. Je ne regrette pas de m'être levé un dimanche matin !

– C'est assez... fascinant et perturbant à la fois, répondit son compagnon, la tête penchée vers le côté.

– Chuuut ! s'impatienta la femme de tout à l'heure.

Harry ne semblait même pas voir le monde tout autour de lui et continuait de peindre avec ses fesses ce qui se vendrait certainement d'ici quelques heures à un prix excessivement élevé. L'année dernière avec la découverte de ses graffitis par le musée d'art contemporain de Londres, Harry avait réussi à acquérir une certaine notoriété dans le milieu artistique. Il était une des nouvelles étoiles montantes du milieu et, grâce à son parcours plus qu'atypique, était aussi talentueux en graff, qu'en peinture ou en dessin.

Depuis quelques semaines, il s'essayait aussi à la sculpture avec Luna, curieux de découvrir une nouvelle forme d'expression. L'originalité de ses thèmes ou des formats que Harry abordait dans ses toiles l'avait mené à exposer à Glasgow, Marbella, ou encore à Aigue-Morte, une petite ville dans le sud de la France. Ce n'était pas encore de grandes expositions, mais c'était un début tout à fait prometteur pour lui qui avait si durement cherché sa place. Harry rêvait toujours de pouvoir tagguer à New York, ou de réaliser des fresques à Tokyo. Mais ce n'était pas pour maintenant. Là, il peignait.

La plupart des spectateurs ne comprenaient pas ce qu'il était en train de réaliser, mais continuaient de regarder ça avec des yeux exorbités. En fait, ça ne ressemblait pas à grand-chose hormis un cafouillis de jaune, de vert citron et de mauve. Draco tenait à assister à chacune de ses représentations, comme s'il espérait que cela découragerait les hommes un peu trop entreprenants. Blaise continuait de se tordre le cou pour essayer de deviner une forme.

– Je crois que c'est un papillon, dit-il après de longues secondes d'hésitation, ou... un cheval.

Aleksei lui jeta un regard torve.

– C'est sûr qu'entre un papillon et un cheval, la marge d'erreur est très mince, dit-il de son habituel ton cassant. Moi, je pense que ça ressemble plutôt à un gros ours.

Aleksei était sans doute le plus proche de la réalité, car, à présent, Harry griffait sa toile de papier, créant des espèces de poils violets à la forme de son dessin. Il se dirigea vers un pot gris, se peinturlura les fesses d'une généreuse dose, puis s'assit brutalement au sol, ce qui fit trembler le parquet. Deux sphères au milieu de la toile étaient bien visibles. Harry effleura son postérieur et dessina avec le reste de la peinture grise les contours d'une forme qui semblait être un visage.

– Oh, ce sont des narines ! s'écria Blaise en comprenant tout à coup.

– Chuuuuuuut ! s'énerva la femme en lui accordant une oeillade glaciale.

L'oeuvre se peaufinait de plus en plus tandis que Harry était pris d'une véritable frénésie créative. Harry caressait le papier du plat de sa paume, avec ses doigts, et parfois même avec sa bouche tout en prenant bien garde de ne pas avaler de peinture. La figure qu'il dessinait semblait tout à fait familière pour Aleksei qui n'avait maintenant plus aucune véritable raison de rire.

Ce qu'était en train d'accomplir Harry était très beau, et pourtant, Aleksei était quelqu'un de terriblement obtus lorsqu'il s'agissait de création. Il était d'une nature bien trop terre-à-terre et bornée pour apprécier un bon livre ou une photographie. Les couleurs qui semblaient avoir été ajoutées au hasard formaient désormais une harmonie parfaite et audacieuse, recréant sous leurs yeux les traits de Mel. Ce dernier, abasourdi et ému ne disait plus rien. Quand Harry eut fini, il adressa un sourire radieux à son assistance et souffla :

– Je crois que ça y'est. J'ai réussi à faire ce que je voulais.

On l'applaudit poliment tandis que Harry se levait et sortait du cadre qu'il avait lui-même créé. Draco lui enfila aussitôt un peignoir en repoussant du coude un étudiant les yeux brillants d'admiration. Il embrassa Harry à la nuque d'une manière possessive et voulut l'attirer aussitôt vers les vestiaires. Cependant, Harry entendait bien d'abord répondre à toutes les questions que sa performance avait pu susciter :

– J'ai décidé de reproduire aujourd'hui le visage d'un homme qui a changé ma vie, éluda Harry en repoussant une mèche imprégnée de peinture derrière son oreille. Je n'ai pas toujours eu la chance dans ma vie d'exprimer ce que je ressentais, ou d'avoir accès à... à certains types de formations. J'ai dû m'accrocher pour en arriver là et j'ai été très bien entouré. Si je n'étais pas tombé sur le Baba O'Riley, je crois que je serai sans doute encore en train de vivre une relation toxique avec mon ex. (Blaise se racla la gorge et prétendit aller chercher un gobelet d'eau à la fontaine) Mel ouvre les portes de chez lui quasiment vingt-quatre heures sur vingt-quatre aux personnes comme moi, qui cherche un ancrage. Donc merci, Mel.

Harry s'apprêtait à le serrer dans ses bras quand il s'aperçut qu'il était encore sale.

– Bon, plus tard alors, dit-il avec un sourire désarmant.

Draco l'accompagna dans la pièce d'à côté. Il ferma aussitôt la porte à clef.

– Je déteste comment ce type de tout à l'heure t'a regardé !

– Quel type ? dit Harry en ôtant son peignoir désormais bon à laver ainsi que son sous-vêtement.

– Mais tu sais très bien... Le grand dadais avec ses airs de chanteurs pour midinettes, s'énerva Draco.

– Tu sais bien que je ne vois personne quand je suis lancé. Tu n'as pas de raison d'être jaloux.

– Je vais finir par devenir vieux, bientôt. Je suis sûr que tu prépares un plan de sortie.

Harry roula des yeux et s'enferma dans la cabine de douche.

– Je suis certain que même Blaise fantasme encore sur toi, ragea Draco.

– Tu crois ?

– … Bien sûr, c'est mon pote. Je sais ce qui se trame dans sa cervelle d'abruti. Pourquoi ? Il t'intéresse encore ?

La pointe d'inquiétude dans sa voix était difficilement dissimulable. Harry entrouvrit la paroi de la douche et murmura.

– Déshabille-toi et viens plutôt me rejoindre. Je vais te montrer à quel point il me manque, tiens.

Draco arbora un large sourire et commença à ôter son costume. Il sortait tout juste d'une journée affreusement longue au travail où Valérie et lui avaient dû écouter des partenaires financiers déblatérer pendant des heures sur la viabilité du marché des écrous à huit faces contre celles à sept. Un vrai cauchemar.

Sans oublier que, par-dessus le marché, son père l'avait réquisitionné tout le midi pour un déjeuner d'affaires avec un investisseur indien particulièrement capricieux. Le pire dans tout ça, on était un dimanche ! Il avait eu envie de se tirer une balle à trois reprises depuis ce matin. Le pire du pire, c'est qu'une pile de dossiers l'attendaient à la maison, qu'il devait nourrir son python en pleine mue, et que – putain ! – ça serait à nouveau lundi.

Depuis que Harry devenait un peu célèbre dans son milieu, Draco avait l'impression que le temps lui manquait. Plus particulièrement le temps passé à ses côtés. Harry était souvent en déplacements, peignait pour exposer ou pour réaliser des commandes auprès de particulier. Tant et si bien qu'ils ne faisaient que de se croiser. Draco ne pouvait rien dire. Ce moment-là, Harry l'avait sans doute attendu toute sa vie. Il ne pouvait pas gâcher ça avec des caprices. Il ne pouvait plus être égoïste maintenant qu'ils étaient en couple. C'était fini ce genre de conneries. Harry avait toujours été là pour lui, même aux pires moments de sa vie. En échange, Draco devait l'accompagner vers le meilleur.

Une fois parfaitement dévêtu, Draco se glissa à ses côtés dans la cabine de douche. À leurs pieds, l'eau qui rejoignait le siphon était violette, orange, verte. Harry l'enlaça aussitôt.

– J'étais comment ?

– Epoustoufflant.

– Menteur, rigola Harry. Tu me regardais avec les yeux d'un prêtre qui aurait vu un blasphème.

Draco baissa la tête en pouffant de rire.

– Désolé, mais c'est encore dur pour moi de te partager.

– Il n'est pas question que tu me partages, mon cher, susurra Harry avant de l'embrasser.

Ils continuèrent de rester l'un près de l'autre, tandis que l'eau coulait sur eux.

– Tu sens bon, grogna Draco, le nez dans son cou. Beaucoup plus bon que lorsqu'on s'est rencontré la première fois.

Harry éclata de rire.

– Ne te fiche pas de moi. Je ne sentais pas si mauvais !

– Tu puais, Harry. Des gens ont changé de wagon par ta faute, raisonna-t-il. En plus, un vendredi matin, quoi. Vraiment, sans honte. (Harry continua de rire) Quand je t'ai vu là, tout seul dans ce métro, puant je ne sais quelle immondice, je me suis demandé ce que tu faisais dans la vie. Et artiste faisait bien partie de mon top cinq.

– Je ne puais pas tant que ça, râla Harry tout en se retenant de sourire. Ce n'était pas de ma faute en plus. J'étais parti à une fête qui avait dégénéré.

– C'est parce que tu es dingue que ça a fonctionné entre nous, rétorqua Draco, moqueur. Non, c'est vrai ! Ne me regarde pas comme ça. Tu imagines un peu la tristesse si tous les deux nous avions été sages et calmes sous tout rapport ?

– C'est vrai... Je me serai ennuyé comme un rat mort avec un mec sérieux.

Draco lui frotta consciencieusement le dos afin de lui enlever chaque trace de peinture.

– Au fait, mon père cherche à exposer un artiste chez lui. Il va faire un gala de bienfaisance...

– C'est parfait ! Je pourrai lui prêter mes toiles !

– Je suis désolé, mais je ne crois pas que mes parents voudront de tes fesses sur leurs murs, répondit Draco. Mais, je t'assure que j'ai essayé de leur en glisser un ou deux mots. Ils se disaient juste que... que maintenant que tu connais pas mal d'artistes, de musées, de tout ça, tu pourrais leur donner deux ou trois noms. Fin, de gens qui feraient des trucs assez conventionnels.

– Conventionnels ? répéta Harry en arquant un sourcil. Tu veux dire comme deux marguerites dans un champ et une prune à côté ?

Draco sembla réfléchir.

– Dans ce goût-là, ouais.

– Va te faire foutre, Draco.

Harry sortit de la douche.

– Je ne me tape pas le fils d'un des types les plus puissants de la City de Londres pour qu'il embauche quelqu'un d'autre à ma place ! C'est une question de confiance, c'est ça ?

– Mes parents te font confiance...

– Tu parles, interrompit-il. La dernière fois que j'ai voulu serrer la main à ton père, il l'a regardé puis m'a demandé où je l'avais mise récemment. Ils ne me prennent pas au sérieux.

– Pour que mes parents prennent une de mes relations au sérieux, il aurait fallu que je me marie, maugréa Draco. Pour eux, rien n'existe tant qu'un couple n'est pas marié.

Ils enfilèrent leurs vêtements. Harry avait ramené avec lui un sac de rechange.

– Ils sont un peu vieux jeu, que veux-tu, ajouta Draco. Mon père ne digère toujours pas le fait que notre lignée soit sur le point de s'éteindre, donc on va y aller doucement quand même.

– C'est n'importe quoi. Ton père est fou.

– C'est toi qui es complètement marteau à entrer dans son jeu dès qu'il te provoque.

– Ce sont ses petits yeux de fouine ! Tu as vu comment il me regarde à chaque fois ! En plus, il se permet de te donner du travail à ne plus savoir quoi en faire.

Quand Draco eut fini de renouer sa cravate, il déposa un baiser sur sa tempe. Il en avait marre d'être pris à partie par Harry. D'ailleurs, il ne trouvait pas cela très charitable qu'il critique l'attitude de ses parents vis-à-vis de leur couple quand lui ne l'avait toujours pas présenté à son oncle et sa tante.

– Bon, on se voit ce soir.

Harry semblait encore avoir beaucoup de choses à dire, mais il ne lui en laissa pas le temps. Dans la pièce d'à côté, Mel pleurnichait sur la toile en répétant « C'est mon bébé qui a fait ça. Avec ses fesses, oui. » Même si le portrait avait quelque chose d'assez spectaculaire, Draco ne pouvait s'empêcher de penser que ce n'était pas sa meilleure toile. Une des plus belles était sans doute chez eux, dans leur maison flottante, sur le mur jouxtant la cuisine.

Il se souvenait parfaitement des circonstances de création de ce graffiti. Ils étaient en froids tous les deux parce que Harry le pensait encore avec Cédric. Et lui, trop bête, trop fier, avait été incapable de lui dire la stricte vérité. Cédric, il s'en foutait. C'était lui qu'il voulait. Lui qu'il avait toujours voulu sans oser se l'avouer. Alors il avait payé. Draco avait sorti son chéquier pour que Harry reste auprès de lui au moins une journée.

D'accord, c'était glauque dit comme ça, mais ça se rapprochait le plus de la vérité. Harry était fauché comme les blés. Il avait toujours eu besoin d'argent, c'était sa corde sensible. Draco n'avait fait qu'appuyer dessus. « J'aurais besoin que ma maison me ressemble un peu. Viens peindre sur mes murs, je te paierai grassement » Il n'y avait pas eu que le fric, bien sûr. Harry aimait les tête-à-tête. Ce jour-ci en avait été assurément un, vu comment tout cela s'était terminé sur un arrière-goût de cigarette et de café.

– On déjeune ensemble ? proposa Blaise en le rejoignant près de l'ascenseur. Aleksei est parti chercher Khady à la boxe.

Malgré la très grande douceur de leur fils unique, Aleksei avait insisté pour l'endurcir un peu en l'inscrivant à un sport de combat. À leur grand étonnement, Khady s'était révélé prodigieusement doué pour cogner les autres enfants, et le tout, avec le sourire.

– Pourquoi pas, formula Draco. Ça va m'aérer l'esprit. Cette semaine a été atrocement longue. La tienne ?

– M'en parle pas. Du boulot par-dessus la tête. Avec Harry, ça va, tu tiens le coup ?

– De quoi tu parles ?

– Eh bien, du fait qu'il commence à avoir sa petite notoriété, qu'il réussisse par lui-même... (Draco fronça des sourcils) Allez, arrête un peu de mentir. Je sais bien que ça te fait quelque chose. Ça te plaisait de l'entretenir toutes ces années, non ? Là, il commence à gagner son propre fric et tu as la trouille.

– Je n'ai pas la trouille.

– Si tu l'as. Et c'est normal. Moi aussi je me sentirais mal à l'aise si Aleksei pouvait du jour au lendemain avoir un compte en banque aussi rempli que le mien. Je veux dire, je suis Blaise Zabini, le mec pété de thunes par excellence. Personne ne devrait avoir autant d'argent que moi, sinon je perds mon identité. Harry qui n'est pas à découvert, c'est le monde à l'envers !

– C'est vrai que ça apporte de nombreux changements dans notre couple, mais je ne suis pas inquiet. Je sais qu'il gardera les pieds sur terre. Je le soutiens dans ce qu'il fait.

L'ascenseur arriva au rez-de-chaussée. Londres était ensoleillée. Ils se dirigèrent vers un restaurant non loin.

– On se pose ici ?

– Pourquoi pas, répondit Draco d'un ton morne.

La terrasse n'était pas encore bondée. Draco sortit une cigarette et en profita pour fumer.

– T'as l'air à cran, formula Blaise. C'est quoi qui te gêne ?

– Mmh, à peu près tout en ce moment. La carrière de Harry évolue diablement vite et je n'ai pas le temps de m'y faire. Tous les soirs je fais ce putain de cauchemar où il rencontre un peintre bandant et talentueux. Tu sais, ce genre de mec à tomber par terre, avec plein de muscles.

– Comme moi quoi.

– Tu peins depuis quand, Blaise ? demanda Draco, dédaigneusement.

– Je suis un artiste incompris. Je peins des chefs d'oeuvre avec ma semence, voilà tout.

Draco souffla d'impatience. Blaise n'était définitivement pas la bonne personne pour parler de truc sérieux, comme sa vie de couple par exemple.

– Il est raide dingue de toi depuis le début, ajouta Blaise. Tout le monde te le répète et tu crains encore d'être mis sur le carreau.

– Parce que je sais au fond de moi que je ne suis pas si génial que ça ! Harry finira bien par s'en rendre compte, non ?

– Non, t'inquiète pas pour ça, dit Blaise en attrapant un menu. Il a très mauvaise vue et aime tout ce qui est médiocre.

Draco lui lança un regard plein d'animosité.

– Je ne te permets pas de dire ça, mec.

– Trop tard, je l'ai dit, rétorqua Blaise d'un ton égal. Tiens, je m'enfilerai bien des brochettes...

– Non mais t'atterris de temps en temps ? Harry va me larguer, je le sens !

Blaise déposa le menu, enfila ses lunettes de soleil et lança :

– Ecoute, quand Harry et moi nous étions ensemble, il lui a bien fallu qu'on atterrisse une ou deux fois aux urgences avant de me quitter. Et il l'a fait simplement à contrecoeur. Harry n'est pas du genre à couper les ponts comme ça. Il place la fidélité au-dessus de tout. Alors, même s'il croisait demain son âme soeur, je pense qu'il y réfléchirait à deux fois avant de tenter quoi que ce soit.

– Toi, tu n'as pas peur que Aleksei se casse un jour ?

– Pas trop, non. Il me menace au moins six fois par jour sans passer à l'acte. Il aboie, mais ne mord pas.

Draco eut un rire sarcastique.

– C'est ça, et je simulais le jour où il m'a tiré dessus.

– C'était une bavure, ça. Rien de bien important.

Blaise s'amusa à plier son menu plastifié sous le regard sévère d'une serveuse. Draco sortit son téléphone portable et commença à faire défiler ses notifications tandis que Blaise se plaignait qu'on les ignore pour prendre leur commande.

– Je suis certain qu'on les intimide, finit-il par dire. Du genre, ils n'ont jamais eu des clients aussi beaux alors ils marchent à reculons. Hey, tu m'écoutes ? (Blaise assomma Draco avec son menu) Je suis sûr que tu regardes un truc nul à chier, en plus.

– Comment tu sais ? dit Draco en rangeant son smartphone.

– Bah, parce que je ne t'ai rien envoyé dernièrement. Alors c'est forcément nul, tu comprends.

– Evidemment...

– Avoue que mes messages sont pas mal drôles, non ?

– Si tu le dis.

Ils déjeunèrent en parlant plus de travail qu'autre chose. Draco, toujours aussi préoccupé, avait du mal à se concentrer la conversation. À chaque instant, il regrettait d'avoir laissé Harry seul à la galerie. Il s'imaginait qu'un étudiant en art très imbu de sa personne et très charismatique commençait à le draguer. Et ça commençait à le démanger. Il voulait ressortir son portable, appeler Harry, vérifier que son honneur était sauf. Mais il n'avait jamais été comme ça. Il avait passé des années avec Harry sans se sentir inquiété le moins du monde.

Alors qu'est-ce qu'il se passait en ce moment ? Pourquoi devenait-il chaque jour un peu plus jaloux ? Qu'est-ce que les gens ordinaires faisaient pour ne plus ressentir ça ? Blaise était tellement sûr de lui qu'il était inconcevable à ses yeux qu'on puisse le quitter. À chaque fois, il éclatait de rire en disant : « Me quitter ? Pour aller vers qui ensuite ? C'est comme si tu refusais du steak de Kobé pour bouffer celui congelé du supermarché. Ça défie toutes lois de la logique ! » En général, Draco se vexait, car ça voulait dire – implicitement – que lui était le steak surgelé.

– Tu sais, c'est normal de douter, dit Blaise en recevant l'addition. Si tu ne doutais jamais de ton couple, c'est le signe que tout va mal. Remettre les choses en question prouve que tu tiens suffisamment à Harry pour ne pas l'imaginer acquis. À sa place, je serais plutôt flatté, acheva-t-il avec philosophie.

– Oui, tu as sans doute raison.

Draco sortit sa carte bancaire, plongé dans ses pensées. Pourquoi était-il aussi tiraillé ? Pourquoi avait-il si peu confiance en lui depuis quelque temps ? Qu'est-ce qui ne tournait pas rond ? Où était passé Lithium ? Il poussa un grognement d'énervement tout en s'ébouriffant les cheveux.

– Putain, qu'est-ce qui ne va pas avec moi !

– L'amour mon grand, prononça Blaise. Ça peut foutre en l'air n'importe qui. (Son téléphone sonna) Quoi encore ? … Non, je ne disais pas ça pour être impoli. Je... Écoute, Aleksei, je ne peux pas être partout à la fois, d'accord ? Mais oui, c'est bon. J'y penserai, évidemment. Ça ne me ressemble pas d'oublier les choses, tu le sais bien (Blaise accorda un clin d'oeil à Draco). Ouais, c'est ça. Moi aussi. Ciao. (Blaise cacha une partie de son visage dans sa veste et se mit à chuchoter) Au fait, tu as pensé à, um, tu sais quoi ? Non, pas ça, l'autre. De quoi je parle ? Tu sais très bien de quoi je parle ! Um, um, tu as acheté une plaquette de beurre ? (Draco devait presque se pencher pour entendre ce qu'il disait) C'est une métaphore, espèce d'idiot. Non, ne t'énerve pas. Je n'oserai jamais t'insulter. Tu as mal entendu, je t'assure. Du beurre, Aleksei ! Pour quoi faire ? Te tartiner le cul, bon sang ! Je parle de lubrifiant ! Bon, je te laisse.

Draco avait littéralement explosé de rire. Blaise le toisa superbement en rangeant son portable dans sa poche.

– Je dois te laisser là, dit Blaise en rassemblant le semblant de dignité qui lui restait.

– C'est ça, va rejoindre ta femme fatale.

Blaise lui envoya un doigt d'honneur. Quand il fut au coin de la rue, Draco se rendit compte qu'il n'avait pas payé sa part.

– Enculé, marmonna-t-il.

Une fois l'addition réglée, Draco se dirigea vers le métro. Il avait besoin de se ressourcer, et le seul endroit où il pourrait le faire était auprès de son mentor. Les jours où il exposait, Harry passait des heures avec ses admirateurs à discuter de choses aussi futiles qu'abstraites. Draco n'y était pas dans son bain et se contentait alors de rester droit comme un piquet dans un coin à attendre que le calvaire se termine.

À côté de ça, Draco n'avait pris que très peu de temps pour lui et sa propre passion. Il fallait remédier à ça. Il était justement en train de se glisser à l'intérieur d'un majestueux cabaret datant du 19ème siècle. C'était ici, il y a plus de dix ans, que Draco était tombé sous le charme étincelant de la magie. Il était naturellement doué pour ça. Il aurait aimé être magicien à plein temps. Inventer des tours. Repousser la limite de certains classiques. Avoir son propre show. Faire une tournée.

Tout ça sentait le rêve à plein nez. Mais de l'autre côté, il y avait son père, sa société, ses obligations et Harry aussi. S'il arrêtait de travailler, Harry ne pourrait sans doute plus s'acheter toute la peinture dont il avait besoin. S'il arrêtait de travailler, Harry ne pourrait jamais se consacrer à sa vie d'artiste et exprimer tout son potentiel. C'était ça aussi, le deal.

– Je ne m'attendais pas à te voir là, prononça une voix grave sur sa droite.

Severus Rogue se tenait là en jouant avec une espèce de corde, perché sur un tabouret. Rogue était un prestidigitateur mondialement réputé qui avait accepté de le prendre sous son aile. De nombreuses fois, il avait demandé à Draco de tout plaquer pour devenir magicien, en vain. Draco préférait user de son savoir-faire pour quelques petites soirées au Baba O'Riley, rien de grandiose.

– J'ai besoin de m'exercer, avoua Draco à demi-mot.

– Tu as besoin de conseil, rectifia Rogue en créant comme par magie un nœud sur sa corde juste en la serrant dans son poing. Tu viens toujours ici pour m'en réclamer, Draco. Ça fait des années que cela fonctionne ainsi, et tu sais pourquoi ? Tu es trop frileux dans tout ce que tu entreprends. Pour faire de la magie comme pour affronter la vie, il ne faut pas avoir froid aux yeux. (Draco aurait voulu rétorquer quelque chose, mais ses cordes vocales refusaient de lui obéir) Je ne suis pas payé assez pour t'entendre gémir. Enlève ta veste et mets-toi au boulot.

Severus monta sur scène où une gigantesque vasque d'eau était posée sur un socle.

– Mon prochain numéro consistera à animer l'eau par la pensée, dit-il. Le public n'est pas censé savoir que j'utilise la force magnétique. Je vais mettre quelques paillettes de métaux solubles dedans et, pouf ! Magie, dévoila Severus sans un brin d'enthousiasme.

– Beau stratagème, complimenta Draco, encore chamboulé de cet accueuil en demi-teinte.

La dernière fois que les deux hommes s'étaient vus, ils avaient longuement évoqué une tournée. Draco s'était fermé tout net à cette idée, refusant de quitter Harry plusieurs mois pour se rendre à l'autre bout de la planète. Avait-il juste fait une grossière erreur ? Et si leurs carrières, leurs envies, étaient foncièrement incompatibles ? Est-ce que la magie était-elle faite de chair ? Pourrait-elle compenser l'éloignement de Harry ? Tiraillé, Draco tenta de se concentrer sur l'exercice et d'animer l'eau froide sous ses mains.

Ooo

Luna versa de l'eau chaude dans la tasse de thé de Théodore. Ce dernier découpait dans un magasine un masque pour enfant qu'il garderait de côté pour Teddy. Luna le lui aurait bien dérobé, mais Teddy pouvait être si adorable lorsqu'il se déguisait. Luna tournoya sa petite cuillère afin que le miel se dissolve légèrement. Elle fixa Théodore de ses grands yeux gris cendré.

– Je peux savoir ce que tu as comme ça ?

– Rien, se défendit-elle aussitôt.

– J'ai quelque chose entre les dents ?

– Non, c'est juste que... que je... j'aurai besoin de conseil. (Théodore arqua un sourcil) Concernant ma vie sentimentale.

Cette fois, Luna avait toute son attention. Étant une calamité amoureuse sur patte, Théodore était généralement le dernier que l'on consultait en temps normal. D'abord, on parlait à Harry, car Harry savait tout sur tout en matière de cœur et de sexe. Ensuite, à Mel car il avait l'expérience et le recul. Puis, dans la limite des stocks, à Tonks car elle était raisonnable. Enfin, venait Blaise, de nature pragmatique. Au bout de la chaîne alimentaire arrivait Théodore. En fait, il fallait vraiment être désespéré pour lui demander en être arrivé là, pensa-t-il tout à coup en mettant de côté son découpage.

– Je t'écoute.

Le Baba était curieusement vide en ce dimanche après-midi. Ils étaient sans doute encore tous à la galerie à regarder Harry peindre avec ses fesses, ce qui n'intéressait nullement Théodore ! Luna changea de place, se mettant dans l'énorme sofa bleu en velours, juste à côté de lui. Elle baissa la tête et une longue mèche blonde tomba sur son visage. Théodore la mit derrière son oreille, soucieux.

– Qu'est-ce qu'il y a ?

– Tu peux garder un secret ?

– Bill n'a jamais su que je me suis fait un foursome un jour. Donc, oui.

Luna regarda à droite puis à gauche et sortit de son sac un écrin à bijou. Théodore le sortit et fut stupéfait d'y trouver une bague en or blanc.

– Wow, elle est sublime. Je pourrai en tirer un bon prix si...

– Elle n'est pas à vendre. Valérie me l'a offerte.

– Pour quoi faire ? … Oh ! Ben ça alors, dit-il d'un air extrêmement surpris. Elle t'a demandé en mariage ? chuchota-t-il tandis qu'un groupe d'adolescents passaient en fanfare dans la cuisine. Pour de vrai ? (Luna hocha de la tête) Et tu as dit quoi ?

– Je ne savais tout simplement pas quoi répondre. Il y avait comme un brouillard dans ma tête. Je n'arrêtais pas de bégayer. C'était affreux, gémit Luna en se prenant la tête entre les mains. Elle doit sûrement me détester à l'heure qu'il est !

– Valérie ? Psst. Elle t'adule. Elle pourrait attendre trente-cinq ans au sommet d'une montagne sans eau potable pour toi. (Luna lui lança un sourire de remerciement) Et puis, tu en vaux largement le coup. Personnellement, je vous vois vraiment toutes les deux. Vous êtes parfaites ensemble. Seulement... Si tu ne te sens pas à l'aise à l'idée de franchir ce cap avec elle, vaut mieux que tu le lui dises tout de suite.

– Ce n'est pas ça. J'aime Valérie. C'est juste qu'une part de moi... à tellement peur. On ne se connaissait pas très bien à l'époque où je sortais avec Woodrow, mais on s'était promis tellement de choses toutes les deux que j'ai peur que ça recommence. J'ai peur que Valérie trouve quelqu'un de mieux et finisse par m'abandonner brutalement. Ça me ferait trop de mal.

– Ca ne se reproduira pas, assura Théodore. Draco a son adresse, tu sais. Il pourrait bien lui botter le cul au nom de l'égalité entre les sexes.

Luna rigola légèrement tout en rangeant la bague dans son sac.

– Je voudrais tellement que tout soit plus facile. Si je ne prends pas la bonne décision, je m'en voudrai sans doute toute ma vie.

– … Ou tu peux faire comme moi et laisser l'univers choisir à ta place, plaisanta-t-il à moitié. Ce qui m'a vaguement réussi si on y réfléchit bien.

– Valérie est importante pour moi. Alors, je vais peser le pour et le contre. Mon avenir est en jeu.

La porte s'ouvrit sur Harry, étincelant de joie.

– Devinez qui a fait une prestation du tonnerre ? C'est moooi !

Théodore se protégea le visage avec son magazine.

– Ne m'approche pas, grommela Théo. Tu pues la peinture.

Harry n'en tint pas compte et s'allongea en travers de Luna, un sourire aux lèvres.

– J'ai raté quelque chose ?

– Rien d'intéressant, répondit Luna.

– Harry, si tu pouvais poliment dégagé, ça serait appréciable, formula Théo en essayant de dégager ses jambes. Je ne supporte pas ton corps tout gras.

Harry ne bougea pas d'un iota.

– Mel va afficher son portrait quelque part par-là, dit-il en pointant un endroit du living-room avec son index.

– Tu as peins un portrait d'un vieux avec ton postérieur ? s'ulcéra Théodore d'une voix frisant les suraigus. Mais tu es désaxé ma parole !

– J'ai trop fréquenté Draco pour mon propre bien. D'ailleurs, il est là ?

– Non, on ne l'a pas vu de la journée, déclara Luna. On pensait qu'il viendrait avec toi.

– Ah ? (Harry se redressa) Il doit sûrement encore être avec Blaise en train de mijoter je ne sais quel plan grotesque.

– Tu as pris une douche ? demanda tout à coup Théodore en l'inspectant avec le nez froncé. Non parce que tu as de la peinture dans les cheveux. Si tu m'as sali, tu vas le payer.

– Tu n'as pas besoin de moi pour te salir, Théo. Tu le fais assez bien tout seul avec le foutre de Bill.

– Oooooh, s'exclama Mel derrière son comptoir. Je n'aurais pas aimé à ta place !

Le propriétaire du Baba O'Riley ricana suffisamment longtemps et fort pour foutre en rogne Théodore. Harry se redressa.

– Tu es sûr que ça va, Luna ? Tu as l'air... sur la lune.

Théodore lança un regard torve à Harry.

– Tu es le garçon le plus original que j'ai croisé tout au long de ma vie, dit-il. Sincèrment. Félicitation.

– Oh, la ferme.

– Arrêtez de vous disputer mes chatons ! s'écria Luna.

Quelques instants plus tard, Harry reçut une poignée de perles sur la tête.

– Aïe ! Qu'est-ce que c'est... ? Haha, très drôle Mel.

Mel, écroulé de rire, venait de leur balancer une poignée de croquettes. Le propriétaire du Baba ressortit, histoire de trouver des livres abandonnés près de la décharge.

– Je n'en peux plus de cette maison de fous ! s'emporta Théodore de manière théâtrale. C'est trop pour moi, vraiment.

– Fais attention à ne pas te perdre... chaton, lança Mel.

Théodore lui envoya un regard assassin avant de franchir la porte du Baba O'Riley. Le lustre oscilla légèrement.

– Quelqu'un est dans le baisodrome ? demanda tout à coup Harry.

– Pas que je sache, non, informa Luna.

– Quelqu'un est allé vérifier ? Parce que si c'est le cas, je réserve. Je vais remonter le moral de Draco tout à l'heure. Je vais préparer des gâteaux. Il aimera ça, je crois.

– Je vais t'aider.

Luna aimait par-dessus tout faire des rainbow cake. Parfois, quand Harry avait le dos tourné, elle ajoutait une pincée de weed dans le saladier, histoire de décontracter tout le monde.

– Tu arrives à vendre tes photographies ?

– A quelques magazines, oui, dit Luna. Mais pas de quoi vivre, finalement. Valérie m'a trouvé un job dans une crèche d'entreprise. C'est temporaire, bien sûr. En tout cas, je peux toujours continuer à faire ce que j'adore.

– C'est l'essentiel, répondit Harry. Il ne faut jamais, jamais, abandonner son art. Lorsqu'on laisse tomber, on est foutu de toute manière. (Il déposa deux gouttes de colorant bleu dans un bol) En parlant de Valérie, Draco m'a dit qu'elle méritait une promotion. Je ne suis pas censé te le dire, mais... je crois qu'elle risque de bientôt recevoir un très gros chèque. Vous pourrez sans doute partager un week-end quelque part. Aleksei adore Paris. Il connaît de bonnes adresses.

Luna lui adressa un sourire crispé.

– Oui... sans doute.

Harry continua de réaliser ses pâtisseries en sifflotant. Bill franchit la porte de la cuisine et déposa un baiser sur le sommet du crâne de Luna.

– Mon petit ange, murmura-t-il en l'étreignant.

– Je n'ai pas le droit à un bisou, moi ?

– Draco me ferait aussitôt coudre les lèvres si c'est ça que tu cherches, rétorqua Bill en l'embrassant tout de même. Gardez-moi une grosse part de gâteau de côté. Où est Théo ?

– Il est parti bouder dehors. Tu ne l'as pas vu ?

Bill fit non de la tête et grimpa l'escalier. Là-haut, Tonks fabriquait des colliers en perles de bois avec des amies à elle. Elle comptait les vendre pour acheter un vélo flambant neuf à son fils. Teddy avait maintenant trois ans et fusait d'un bout à l'autre de l'impasse sur son tricycle en grands éclats de rire. Harry était fou de Teddy et le forçait parfois à passer du temps avec lui malgré les protestations du petit garçon, avide d'aventures. Avec l'argent qu'il gagnait, Harry mettait de côté pour que Teddy et Rose – la fille de Hermione et Ron – puissent avoir un avenir serein. Ils les considéraient comme ses propres enfants, alors il était naturel pour lui de subvenir à une partie de leurs besoins.

Harry glissait les cupcakes dans le four quand on toqua à la porte d'entrée. Il se retourna vivement. En fait, on ne toquait jamais au Baba O'Riley. On entrait, et puis c'est tout. Mel n'était pas encore revenu, Harry se présenta.

– Bonjour, dit un jeune homme d'un blond tirant vers le roux. Je m'appelle Devan. Je... J'ai vu une petite annonce qui disait qu'il y avait une chambre à louer ici. Je me suis sans doute trompé.

– Non, non, c'est bien là.

Harry eut du mal à cacher sa surprise. Il était tellement occupé avec sa carrière qu'il ignorait que Mel cherchait un nouveau colocataire ! Tonks et Remus ayant déménagé dans un appartement bien à eux deux stations plus loin avaient déserté les combles réaménagées. C'était un cruel manque à gagner pour le Baba qui dépensait énormément d'argent en alcool et nourriture et électricité.

– Je peux te faire visiter, déclara Harry. Suis-moi.

Ils traversèrent le living-room qui commençait à se remplir de lecteurs. Une jeune fille avait ramené son propre sac de couchage et logeait dans un coin, près d'une étagère, plongée dans un exemplaire de Moby Dick.

– C'est normal tout ce monde ? demanda Devan, à voix basse.

– Oh, là, c'est plutôt calme. Mais ne t'en fais pas. Tu pourras fermer ta chambre à clef. Tu as aussi ta propre salle de bain.

Ils grimpèrent au premier, passèrent devant la réserve, le baisodrome, le bureau de Mel ainsi que sa chambre. Un autre escalier – bien plus étroit que le précédent – se trouvait au fond du couloir. Harry grimpa et ouvrit la porte avec une curieuse appréhension. Cela faisait un long moment qu'il n'avait pas remis les pieds dans cette pièce qui avait été autrefois sa chambre.

Même si la peinture avait été changée, même si les meubles n'étaient plus tout à fait les mêmes, Harry se retrouva comme projeté dans ses souvenirs. Il sourit en repensant au soir où, complètement torché, Draco l'avait rejoint dans son lit. Ou encore des stratagèmes qu'ils avaient mis au point pour rester là-haut, ensemble, sans que personne ne s'en aperçoive.

– C'est grand, dit aussitôt Devan. J'adore cet endroit. On peut y faire plein de choses.

– Je peignais ici, avant.

– Ah ouais ?

Harry acquiesça.

– J'adore cet endroit, et je pense que toi aussi tu vas l'adorer aussi si tu y déposes tes valises.

– Je suis vraiment fauché. C'est le seul endroit que je peux me permettre de louer.

– J'ai été en retard sur toutes mes mensualités et pourtant Mel m'a gardé. C'est un chic type. Tu verras, rassura Harry. Et puis, peut-être même que tu rencontreras suffisamment de gens cool pour partager des moments géniaux. C'est grâce au Baba que j'ai rencontré mon copain. Pourtant, au début, je le détestais presque.

– J'ai rompu avec ma petite-amie il y a peu de temps. J'espère qu'il m'arrivera la même chose qu'à toi.

Devan fit le tour de la pièce. Ils discutèrent un peu de formalités et Mel arriva peu après, caressant sa barbe. Harry les laissa seuls, redescendant en cuisine pour vérifier où en étaient ses cupcakes. Il trouva Aleksei occuper à se servir un verre de soda tandis que Khady léchait le glaçage de son gâteau.

– Bonjour, s'extasia le petit garçon de son habituelle voix adorable. Ils sont très bons. Merci de les avoir préparés.

Dès que Khady se mettait à parler, Harry luttait contre l'irrépressible envie de le serrer contre lui. C'était sans doute l'enfant le plus mignon qu'il n'avait jamais rencontré.

– C'était comment la boxe ?

– Pas mal, répondit Khady. J'ai gagné tous mes combats. Le coach a dit que j'étais une graine de champion.

– Il était temps, marmonna Aleksei en déposant des gâteaux dans un tupperware.

– Qu'est-ce que ça veut dire ? demanda Harry.

– Ca veut dire que mon fils ne se fera plus taper dessus à l'école sans pouvoir se défendre. Le sport est très important dans ma famille. Il est donc naturel pour Khady d'en pratiquer un. Si Blaise veut continuer à être flemmard et gras, c'est son problème.

Harry roula des yeux et donna un essuie-tout à Khady qui commençait à se salir. Le petit garçon se rendit dans le living-room et disparu avec une bande dessinée sous le bras.

– Alors, tu as aimé ma performance de tout à l'heure ?

– Oh oui, souffla Aleksei en réprimant difficilement un rire. C'était grandiose. J'ai tout filmé. Je regarderai ça dès que j'aurais une sale journée.

– Sais-tu faire autre chose que de te foutre de moi ?

– Je crains que cela fasse partie de mes qualifications principales, désolé.

Aleksei se pencha sur le côté pour attraper un torchon tomber par terre. Harry vit dépasser son sous-vêtement. Il était d'un rose éclatant. Harry se mit à rire.

– Tu portes un slip rose ?! Non, mais je rêve ! Je t'ai contaminé !

– Ce n'est pas un slip, mais un boxer. Blaise me l'a offert, figure-toi, dit Aleksei en tentant de sembler digne. Ça arrive qu'entre couple de retraités, on se montre notre affection.

– De retraités, bien sûr... Ça fait... Oh merde. Ah oui, ça fait longtemps que vous êtes ensemble.

Tonks entra en coup de vent prendre du jus de fruit dans le frigo.

– Ne faites pas attention à moi, murmura-t-elle en se faufilant entre eux.

– J'ai cru entrevoir un truc sur ton boxer, continua Harry.

– Ah ça ? dit Aleksei. Il y a marqué « Blaise-moi sans hésitation ». (Tonks se mordait nerveusement les lèvres pour ne pas étaler son euphorie) Sans commentaire.

Harry ne se priva pas de pouffer de rire. Aleksei le darda d'un regard si polaire que Harry finit par vite se calmer.

– Et toi, où se trouve ton prince charmant ?

– C'est la question que tout le monde se pose, marmonna Harry en tapotant contre le comptoir de la cuisine. Tu es sûr qu'il n'est pas avec Blaise ?

– Je n'en ai pas l'impression, non. Mon boxer ne m'envoie aucun signaux allant dans ce sens. (Harry lui coula un regard condescendant) Très bien ! s'écria Aleksei. Puisque tu insistes, je vais lui envoyer un message pour connaître son positionnement géographique.

Harry retourna au glaçage de ses gâteaux tandis que Aleksei tapotait fébrilement un message. Théodore arriva peu après, s'asseyant sur une chaise haute.

– Oh, mon rival charnel, prononça Aleksei sans lever les yeux de son écran.

– Bonjour, sale bête.

Harry les regarda alternativement, pas encore certain de ce qui est en train de se jouer sous ses yeux. Ah oui, Blaise. Aleksei n'avait jamais supporté Théodore, car il savait que celui-ci avait été fou amoureux de Blaise. En fait, maintenant qu'il y réfléchissait, Harry n'était pas réellement au courant de ce qu'il se passait entre Bill et Théodore. En tout cas, en public, ils s'ignoraient soigneusement.

Leur histoire ayant été tumultueuse, il leur fallait sans doute un temps d'adaptation avant de pouvoir agir « normalement ». Bill avait brisé la confiance de Théodore en organisant des fiançailles derrière son dos. Maintenant qu'il y pensait vraiment, ça avait dû être une épreuve de chaque instant pour Théo de voir Blaise aimer quelqu'un d'autre, fonder une famille avec, etc. Jusqu'ici, Harry avait naïvement pensé que la rivalité entre Aleksei et Théodore n'était qu'un jeu. Mais ce n'était qu'une surface de quelque chose de bien plus profond et qu'il ne pourrait sans doute jamais comprendre.

– Je vais dire un mot à Luna, glissa Harry, trouvant un prétexte pour s'éloigner.

Luna était allongé sur un sofa, fixant le faux plafond étoilé. Mel y avait étendu de la toile cirée imitation galaxie avec l'aide de Lee, le mois dernier. Luna adorait s'y perdre.

– Tu n'as pas l'air au meilleur de ta forme...

– Hein, quoi ?

– Non, rien. Laisse tomber.

Luna se rallongea, plus pensive que jamais. Harry vit Devan et Mel échanger une poignée de main. Alors, le contrat était conclu. Il y aurait un nouveau locataire pour le Baba O'Riley. Une pointe de tristesse le tirailla. D'accord, il adorait la maison flottante où Draco et lui vivaient. Mais le Baba avait toujours semblé être son chez lui, en quelque sorte.

– Tu le trouves comment ? demanda Mel tandis que le jeune homme franchissait la porte.

– Il a l'air cool, répondit Harry d'un ton égal.

Bill le dévisagea.

– Il est jaloux, prononça-t-il.

– N'importe quoi !

– Si, tu es jaloux. Je le sais parce que quand Draco flirtait avec d'autres personnes, t'avais exactement la même tronche. Détends-toi, on dirait que tu vas nous pondre un muffin.

Harry lui envoya un doigt d'honneur plein de poésie. Mel ébouriffa les cheveux de Harry.

– Mais personne ne pourra te remplacer, mon bichon. Tu as peins mon visage avec tes fesses. C'est une preuve d'amour universelle.

Tonks leva son verre. Mel tapa dans ses mains si fort que Luna sursauta :

– Bon, qui m'aide à organiser les préparatifs de ma petite sauterie ? (Bill leva l'index pour se désigner) Parfait ! Ce soir c'est la réunion des Barbes Frémissantes.

– C'est quoi le thème ? demanda Harry qui, mentalement, se préparait à partir plus tôt que d'ordinaire.

– Le Trône de Fer ! Évidemment, nous serons tous déguisés. Je serai Robert Barathéon. J'ai commandé mon costume sur un site spécialisé. J'ai dû prendre trois kilos pour rentrer dedans.

– Comme si se goinfrer fut une véritable épreuve, marmonna Bill en le suivant jusque vers la cave où étaient entreposés les fûts d'hydromel.

– Luna ! glapit Mel. Je vais recevoir trois tonneaux de bière et un de vin. Tu signeras pour moi le reçu ? J'irai faire quelques courses avec Bill ensuite.

Luna leva le pouce en guise de réponse sans bouger d'un iota. Harry retourna en cuisine et prépara avec Théodore et Aleksei une quantité prodigieuse de pommes de terre au four, des légumes sautés ainsi que de la viande par kilos. Mel avait vu les choses en grands (comme à chaque réunion des Barbes Frémissantes). Vers sept heures, Aleksei et Khady rentrèrent chez eux, car il y avait école pour le petit garçon le lendemain. Draco n'était toujours pas dans les parages et ne répondait à aucun de ses appels. Harry était inquiet.

Soudain, la porte s'ouvrit en grands fracas sur un long bruit de cor. Harry se boucha les oreilles : Albus Dumbledore arriva, déguisé en Marcheur Blanc. Il avait peint sa peau d'un blanc tirant à la fois vers le gris et le bleu, ses lentilles étaient d'un cyan perturbant et il possédait un long glaive en acier. Mel sauta des escaliers et fendit légèrement le plancher, dans sa cuirasse en bronze. Albus et Mel se tapèrent le torse l'un contre l'autre, échangèrent quelques bourrades de bienvenues sous les airs consternés de Théodore.

Celui-ci déposa un monticule de côtes d'agneau sur la table basse, sachant qu'elles disparaîtraient sûrement dans la demi-heure qui viendrait. Hagrid dut se pencher pour arriver, déguisé en Gregor Clegane, dit la Montagne. Sirius était méconnaissable sous les traits de Khal Drogo et Grindewald dansa sur quelques notes de swing, vêtue de sa toge de mestre. Il incarnait Pycelle. En revanche, Harry crut bien défaillir quand il vit son beau-père arriver dans le living-room du Baba. Lucius Malfoy était déguisé en Daenerys Targaryen, une réplique de dragon collé sur l'épaule.

– Je n'accepterai aucun commentaire désobligeant, dit-il d'emblée de son habituelle voix traînante. C'était le seul qui restait en magasin.

Mel se mordait le poing pour ne pas rire, sa couronne en forme de cerfs glissant sur son front.

– On a rien dit Loufiouf, articula-t-il. Je veux dire, Lucius.

Le concerné claqua des doigts et Harry remplit sa coupe de vin. En retournant dans la cuisine, Théodore était plié de rire.

– Ils sont fous là-dedans ! chuchota-t-il.

– Ne m'en dis pas plus. J'ai dû supporter ça une fois par mois quand je vivais ici.

– Ils sont désaxés, je crois.

– Non, vraiment ? s'étonna faussement Harry. On peut aller là-haut, dans le grenier. Profitons-en tant qu'il est vide.

Théodore acquiesça vivement. Il le suivit en prenant un plateau de nourriture tandis que Luna fermait la marche, son ordinateur portable sous le bras. À leur grande surprise, Bill était déjà là-haut, fumant un joint.

– On se cache pour fumer ?

– Je suis pauvre, plaida Bill. Et je ne raffole pas particulièrement de vos microbes. Qui sait où tu as mis ta bouche dernièrement.

– Sur la queue de mon copain, si ça t'intéresse tant que ça, cingla Harry en s'affalant sur son ancien matelas. Et, ni l'un ni l'autre, n'avons la moindre maladie si ça peut te rassurer.

Bill lui offrit un clin d'oeil ainsi que le joint. Luna lança son ordinateur et ils se mirent d'accord sur un film d'horreur. Ils dévorèrent du pop-corn, serrés les uns contre les autres d'appréhension. Théodore – d'une nature plutôt froussarde – poussait des petites plaintes de temps à autre, ou se cramponnait au bras de Harry. Les scènes devenaient de plus en plus inquiétantes et glauques.

Subitement, la porte du grenier s'ouvrit en grand en un grincement effroyable. Luna poussa un hurlement effroyable et Bill balança le saladier de pop-corn vers la porte.

– Putain ! C'est quoi ce délire ?!

Quelqu'un alluma la lumière. C'était Draco.

– Pourquoi est-ce que je dois toujours me prendre des trucs dans la face ? s'énerva-t-il en se massant le front.

– C'est la question que je me pose tous les jours, murmura Théodore, plus pour lui-même.

Draco croisa le regard de Harry.

– Je suis venu te chercher. Tu viens ?

– Maintenant ? s'étonna-t-il. Bon, eh bien... D'accord, j'arrive.

Le temps de dire au revoir à tout le monde et de récupérer ses affaires, Draco avait déjà fini sa cigarette.

– Tu peux me dire ce que mon père fout dans ce living-room habillé en femme ? dit Draco en lui prenant la main.

– J'en sais rien. Mais j'admets que c'est plutôt une bonne question.

Draco esquissa un sourire.

– J'ai un peu discuté avec lui. Je lui ai dit qu'il avait tout intérêt à accrocher tes toiles sans son foutu salon. Je lui ai mis un coup de pression et il a fini par céder. (Harry leva des yeux étonnés vers lui) Tu mérites d'être connu. Je veux dire, ton art, tout ça... Je serai toujours là pour te soutenir, tu le sais ça ?

– Oui, bien sûr.

– … Ces derniers temps, j'avais peur que tu l'oublies. Enfin, que tu m'oublies. (Draco marqua une courte pause) Il s'est passé tellement de choses depuis qu'on t'a exposé la première fois que j'ai l'impression que les choses vont trop vites. Je ne me suis pas encore fait à l'idée que tu puisses... réussir sans moi. Mon égo en a pris un coup. Inconsciemment, je pensais que tu aurais toujours besoin de moi. Financièrement, je parle. Ce n'est pas que je n'ai pas envie que tu t'en sortes loin de là. C'est juste que... que si je ne suis plus le mec qui rapporte de l'argent, c'est comme si je perdais une partie de mon identité. Tu vois ?

Harry ne voyait pas du tout. En fait, il n'avait jamais considéré Draco comme « le mec qui rapporte de l'argent ». Il ne s'était jamais limité à ce genre de critères. Pourtant, il comprenait ce que Draco tentait de lui faire comprendre. Ses repères étaient chamboulés, il avait besoin d'être rassuré.

– Si j'arrive à peindre de si belles choses aujourd'hui, c'est parce que tu me laisses m'exprimer. Tu ne m'enfermes pas et... tu veilles à ce qu'il ne me manque jamais rien. Je ne te tournerai pas le dos maintenant que tout à l'air d'aller pour moi. Ce succès, c'est pour nous deux. (Harry l'embrassa) Maintenant, c'est à moi d'apporter l'argent à la maison pendant que tu te consacreras à ta passion. Tu pourrais faire plein de spectacles, j'en suis sûr ! Tu as des tas de numéros géniaux qui n'attendent que...

– Je ne sais pas, hésita l'autre. Ça fait longtemps que je ne me suis plus produit. Et puis... je ne suis certainement plus à la page.

– Connerie. Si j'ai craqué sur toi, Draco, c'est parce que tu avais quelque chose de magique. Tu dois continuer d'être magicien. C'est une partie de toi.

Draco sourit.

– J'ai préparé un numéro de lévitation, dit-il. (Harry fronça des sourcils) T'emmener au septième ciel.

Harry lui envoya un coup de poing dans l'épaule et marcha vers la station de métro, les lumières du Baba O'Riley dans le dos.

– J'étais sérieux ! s'exclama Draco, réprimant difficilement un rire.

– Tu n'es jamais sérieux.

Le téléphone de Harry vibra. Il venait de recevoir un message de Luna :

« Ne prévois rien la semaine prochaine. J'ai besoin d'un témoin près de l'autel. »

Il resta un long moment circonspect avant de sourire largement. Harry avait toujours adoré les mariages.